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23 janvier 2008 3 23 /01 /janvier /2008 00:00

Editorial de la feuille d’annonce hebdomadaire de la Paroisse Saint Léon à Paris (15e), parue ce dimanche 20 janvier 2008.

 

 

Rainer Maria Rilke écrivait, en 1898 : « Dieu est la plus ancienne oeuvre d’art. Il est très mal conservé. » On travaille avec acharnement, dans la plupart des pays occidentaux à la conservation et à la restauration du patrimoine. Il n’en était pas ainsi, en France, pour cette « oeuvre d’art » dont parlait Rilke, puisque le mot Dieu avait été évincé du discours public au profit de celui de religions, ou valeurs ou aspirations ou croyances. C’est pourquoi les dernières interventions du Chef de l’État ont provoqué tant de réactions : pour l’intelligentsia médiatico-parisienne, il s’agit d’un manque d’éducation, ou d’une intolérable intrusion dans la conscience individuelle, ou du signe d’une dérive totalitaire, ou même, pour certains de ces nouveaux clercs, plus qu’un crime, d’une faute.

 

Et cela est bien singulier pour un observateur. Il y a, de la part de ces directeurs auto-proclamés de la conscience publique, une incroyable sensibilité à ce mot : « Dieu ». On peut comprendre que ceux qui ont travaillé à extirper Dieu de leur vocabulaire, de leur (mauvaise) conscience, de leurs références, de leurs choix, de leur vie et de la culture ne veuillent pas voir revenir par la fenêtre celui qu’ils ont chassé par la porte. Mais de deux choses l’une : soit Dieu n’existe pas, et alors il faut entendre qu’ils ont une hypersensibilité à ce qui n’existe pas, et ça se soigne ; soit Dieu existe, et alors ils s’érigent en maîtres du discours, et ça se soigne aussi.

 

C’est une façon de dire aussi que notre monde franco-français est bien malade. Mais c’est aussi pour nous l’occasion de nous ressaisir d’un travail nécessaire : la question de Dieu, la question de l’existence de Dieu, doit être posée à tout homme, car il en va de l’intelligence humaine, de son étendue, de son aptitude à saisir le réel, de sa capacité à rendre compte de ce qui existe, de la légitimité de sa prétention à gouverner le monde. Car le Dieu dont nous parlons, ce n’est pas un dieu de la mythologie qui n’est bien souvent que la personnification d’une passion humaine. Le Dieu dont nous parlons, c’est le seul être nécessaire qui rend compte des êtres contingents, c’est l’infini qui contient le fini, c’est le Créateur Intelligent qui donne l’existence à un univers intelligible. Si lui n’existe pas, alors rien ne peut exister, car du néant rien ne peut sortir ; si tout était contingent (c’est-à-dire non nécessaire), alors rien ne pourrait exister ; si à l’origine de tout le réel il n’y avait pas un Créateur, alors rien ne recevrait l’existence ; si ce Créateur n’était pas intelligence, alors tout ne serait que chaos et l’esprit humain ne pourrait saisir cet ordre universel qui lui permet de formuler des lois, de reconnaître des régularités, de rendre compte d’une rationalité dans les choses.

 

Ce Dieu perçu par la raison, c’est lui qui s’est révélé en plénitude en Jésus. Nous en sommes tous témoins.

 

 

Père Olivier Rolland
Vicaire
© Paroisse Saint Léon

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commentaires

H
Matthieu, le président est peut-être en cohérence avec le candidat Sarkozy, mais il ne me semble pas en plein accord avec les principes chrétiens, et notamment de l'Eglise Catholique, alors qu'il en parle fréquemment. Entre ses discours sur la religion qui apporte une espérance et sa politique inspirée par le matérialisme et la réussite individuelle, il y a un certain écart. Je crois comme Aude qu'il peut y avoir une place pour le religieux dans la vie publique, mais N. Sarkozy bien que "chanoine honoraire" ne met pas en pratique un certain nombre de valeurs évangéliques. Quelqu'un comme Mme Boutin serait plus crédible pour parler de spiritualité, de famille, d'accueil des plus faibles, etc.En espérant que tu m'aies compris, je te souhaite un bon repos dominical.
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M
Et pourquoi ne serait-ce tout simplement pas parce que notre Président de la République se fait une certaine idée de la laïcité, et qu'il entend la mettre en oeuvre pour ce qu'il considère être le bien du pays? Tes questions, Aude, trouvent leur réponse, me semble-t-il, dans le passé du Président, dans son attachement jamais démenti à la laïcité, et sa conception personnelle du rôle des religions dans la République, qu'il avait publiquement exprimée en particulier dans un petit livre intitulé "La République, les religions, l'espérance", dont la quatrième de couverture (en sa version Pocket) disait ceci : "Nicolas Sarkozy souhaite inventer une laïcité ouverte et apaisée, où chacun puisse vivre son espérance et participer à la construction de la société démocratique."  Ce n'est pas nouveau : le livre est paru en 2004.L'attitude du Président me semble donc être en parfaite cohérence avec les positions du candidat Sarkozy qui s'était présenté aux suffrages des électeurs. Manquerait plus que l'on reprochât aux hommes politiques de tenir leurs engagements électoraux!On peut certes ne pas partager les idées du Président sur ce point. Mais je pense qu'il n'est pas juste de lui prêter de mauvaises intentions sur ce coup là.
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A
Vous déformez mes propos Matthieu...après "perplexe", il y avait deux points, ouvrant sur les raisons de ma perplexité, qui ne sont pas "qu'a-t-il besoin de parler de religion" mais "dans quel but parle-t-il de religion, et pourquoi cette insistance, cette valorisation de ce qui ne semble pourtant pas en adaptation avec le reste de sa politique".
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M
"l'hommage appuyé que rend notre président aux valeurs religieuses (qu'elles soient chrétiennes ou musulmanes d'ailleurs) me laisse perplexe".N'est-ce pas cela pourtant la laïcité? Et le chef de l'Etat n'a-t-il pas pour rôle d'en être le garant?Cf. un autre lien intéressant, signalé par Patrice de Plunkett : http://www.rue89.com/2008/01/25/les-medias-francais-boycottent-injustement-les-catholiques ---> "La laïcité est une liberté religieuse et si la République ne reconnaît aucun culte, cela ne la dispense aucunement de les connaître et de leur parler."
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A
Merci pour vos liens Matthieu.Loin de moi l'idée de récuser les racines chrétiennes de la France, ou de refuser à M. Sarkozy le droit d'en faire mention (notons au passage que l'envolée poétique du "long manteau d'églises" a, paraît-il, été pompée sur Victor Hugo ;-)Je maintiens cependant que l'hommage appuyé que rend notre président aux valeurs religieuses (qu'elles soient chrétiennes ou musulmanes d'ailleurs) me laisse perplexe : envie, comme le dit M. Duhamel, de lancer un "faux débat" pour faire oublier les vrais problèmes ? Tentative de récupération d'un électorat chrétien ? Voire, aveu de l'impuissance des politiques à restaurer la confiance des citoyens en l'avenir ?A mon sens, le président resterait bien mieux dans son rôle en faisant simplement valoir ce que peut apporter à chaque citoyen (quelles que soient ses convictions) l'étude des religions en termes de culture, d'histoire, d'art, de philosophie... Exclure l'idée de Dieu de notre société ? Mais comment le pourrait-on ? Il faudrait fermer bien des musées, détruire bien des bâtiments, brûler bien des livres...bref, à mon sens même si c'était possible, ce serait nous appauvrir de manière dramatique (si, si, je me sens toujours athée ;-)D'après M. Sarkozy, l'instituteur ne saurait jamais remplacer le curé ou le pasteur...certes. Mais le président, si ? Moi je préfère que chacun aie d'abord à coeur de bien remplir les fonctions qui lui sont propres, et de ne pas trop mélanger les genres. (A propos, savez-vous, Matthieu, qui disait "l'instituteur à l'école, le maire à la mairie et le curé à l'église" ?)
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H
Bien que catholique pratiquant (et dans la même paroisse que Matthieu et le P. Olivier Rolland ;-) ), sur ce sujet, je serais plutôt d'accord avec Aude. Le président de la république française n'a pas été élu pour s'afficher comme "chrétien", alors que d'un autre côté, il est fréquemment  sur des positions différentes de l'Eglise Catholique : sur l'accueil des étrangers, les évêques lui ont écrit leur désaccord avec ses projets; il veut faciliter le divorce par consentement mutuel sans juge (ce qui banalise le mariage) - et on est obligé de constater que sa situation est peu compatible avec l'indolussibilité du sacrement du mariage- ; encourage le travail le dimanche et a une vision généralement plus matérialiste que spirituelle. Bien qu'ayant des convictions religieuses, il ferait mieux à mon avis de ne pas afficher autant son attachement au catholicisme et de tenter de le mettre en pratique, plus discrètement. Comme Maritain, je préfère les hommes qui agissent "en chrétiens" , sans afficher leur Croix, plutôt qu'en se déclarant chrétien pour se rallier une partie de l'électorat. Je pense comme Aude que le président français est souvent dans une contradiction.Cela dit, je ne soutiens pas les laïcistes qui veulent complètement exclure l'idée de Dieu de notre société !
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M
Chère Aude,Est-ce se comporter en Ayatollah que d'affirmer les racines chrétiennes de la France? Je ne crois pas.Cf. http://plunkett.hautetfort.com/archive/2008/01/23/81-des-français-pas-de-contradiction-entre-racines-chretienn.htmlCf. http://www.liberation.fr/rebonds/305536.FR.php
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A
Mais je ne prétends pas avoir à porter une appréciation sur la vie spirituelle du chef de l'Etat ! La seule chose (concernant ses discours sur la religion) que je reproche à notre président, c'est de "déborder" assez largement de ses fonctions (étrange, on dirait pourtant qu'il lui reste du boulot ailleurs)... Un président de la République n'est pas sensé, pour moi, être un guide spirituel du peuple, mais vous êtes peut être d'un avis différent ?Quant à son histoire personnelle, j'essaie d'éviter de la juger  - pas facile au vu de l'étalage qui en est fait - ; en revanche je pensais que revendiquer haut et fort son attachement au catholicisme, sans pour autant pratiquer, relevait de la contradiction pure et simple (ou bien peut être, du choix délibéré d'une position..."consensuelle" ?)Ceci dit, cette attitude me paraît très répandue en France aujourd'hui - auquel cas il ne nous reste plus qu'à nous féliciter de la représentativité de notre président dans au moins un domaine...
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M
Chère Aude,Je me garderai bien de porter le moindre jugement sur la vie spirituelle du Président de la République! Il serait sans doute injuste toutefois de lui reprocher sa non participation aux messes dominicales (au regard de son histoire personnelle) ; et sans doute plus judicieux de se réjouir du "travail" de l'Esprit Saint en son coeur, de l'encourager dans ses velléités, de re-méditer Matthieu 9. 12-13, et surtout de beaucoup-beaucoup prier pour lui!Sur la laïcité, la pensée du chef de l'Etat me semble rejoindre celle de l'Eglise catholique (lire : http://totus-tuus.over-blog.com/article-3590219.html). Et puis celle des anthropologues aussi : http://plunkett.hautetfort.com/archive/2008/01/17/sarkozy-et-la-laicite-querelle-de-mots.html.
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A
En tant qu'athée, je ne suis pas chagrinée de voir un président qui se définit comme rattaché au catholicisme, aller au Vatican recevoir un titre (honorifique, et qui n'exige pas de lui chasteté et pauvreté ;-). Il peut même y emmener des amis, on ne va pas se mettre à interdire le Vatican à quiconque sous prétexte d'humour douteux...(A quand Charb au Vatican ?)Ce qui me gêne, c'est qu'il me semble qu'au travers des ses discours récents le président de la République n'est pas dans son rôle, dans sa fonction (une fois de plus, dirais-je). La question de Dieu doit être posée à tout homme, oui, cent fois oui. A minima en cours de philosophie (quant au contenu réel de ces cours en l'état actuel des choses, c'est une autre histoire). Mais est-ce le rôle d'un président ? Le président se doit-il d'être un guide spirituel de la nation ? A-t-il été élu pour cela ? Non, je ne suis pas en train d'agiter le mouchoir rouge "si ça continue, il va ordonner le bûcher pour ceux qui sèchent la messe", ni même "c'est un retour en arrière". Je reconnais à M. Sarkozy le droit de parler de ses convictions, au même titre que de sa santé, parce que tout cela a une influence sur ses fonctions (sur sa politique, ou sur sa capacité à la mener). Contrairement à ce que certains veulent faire croire, nombreux sont les athées qui ne confondent pas "laïcité" et "tabou sur la religion".Cependant, M. Sarkozy a une fâcheuse tendance à confondre "parler de" et "étaler, insister grossièrement, déformer, jeter un os à ronger aux médias".Ce qui est le plus singulier pour l'observatrice que je suis (avec sa vision réduite et subjective, mais vision quand même), ce n'est même pas d'entendre notre omniprés(id)ent dire que les gens ont "besoin d'espérance". "Les lendemains qui chantent" ont été servis dans des discours fort éloignés de la religion, il me semble. Mais encourager les gens à espérer, pour un homme politique, ce devrait être encourager les gens à voter, à se présenter aux élections, à s'impliquer, à participer, plutôt que d'embrayer sur "et c'est pour ça que la religion c'est formidable soutien" (d'autant qu'ensuite le discours ressemble à "et d'ailleurs qu'importe le flacon, pourvu qu'on aie l'ivresse").Par ailleurs, l'attachement déclaré de M. Sarkozy à la religion s'assortissant 1) d'une pratique apparemment intérieure et aléatoire (corrigez moi si je me trompe, mais il me semblait que le rassemblement de la communauté pour la messe était fondamental pour les chrétiens) 2) d'une politique exaltant la réussite individuelle et le consumérisme le plus poussé...personnellement si j'étais profondément catholique, je crois que je serais très gênée par les discours présidentiels sur la religion et les divisions qu'ils suscitent (alors qu'"ensemble, tout devient..." ;-).Et vous, qu'en pensez-vous ?
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