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22 septembre 2009 2 22 /09 /septembre /2009 18:27

Le combat n’est pas tant pour la destruction du mal que pour la croissance du bien. A travers lui, notre foi superficielle (…) doit se creuser, descendre dans l’intelligence et le cœur, devenir cette foi que la charité brûle assez pour qu’elle puisse traverser les flammes.

Le diable sans le vouloir sert à chasser le diabolique (…). Et c’est bien l’attention d’un Dieu de tendresse qui en dispose ainsi, non l’amusement d’un génie dramaturge. Car
on pourrait croire, à la manière d’un Sénèque, que le Seigneur se donne un spectacle et prend plaisir à damer des pions. Ce serait le confondre avec l’Adversaire. Dieu ne manipule personne. Sa Providence n’est obscure qu’à force de lumière. En elle, point de ténèbres. Seulement, par un don sans repentance, il a voulu des créatures libres et capables de mérite : que ces créatures s’adonnent volontairement au mal, il n’y peut rien, mais il fait tout pour que ces maux puissent se corriger l’un l’autre (tandis que l’Adversaire fait tout pour que, l’un l’autre, ils s’excitent) : les cailloux ternes et tranchants qu’on secoue dans un sac finissent par se polir et devenir brillants et lisses.

Fabrice HADJADJ, in "La Foi des démons ou l'athéisme dépassé", Salvator 

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10 septembre 2009 4 10 /09 /septembre /2009 08:47

Homélie du Cardinal André Vingt-Trois prononcée en la fête de l’Annonciation à Lourdes, le 26 avril 2008.

Trois mois de bonheur. Entre Elisabeth et Marie sa cousine, trois mois à savourer la joie des enfants qu’elles attendent, chacune : Elisabeth attend Jean-Baptiste qui a tressailli dans son sein et Marie attend Jésus. Pour chacune d’elles, cet enfant qui va venir, qui est déjà présent, qui bouge et qui tressaille, c’est le signe de Dieu vivant. Trois mois de bonheur, trois mois de joie. Comme nous voudrions entrer dans cette joie, partager ce bonheur, nous réjouir avec elles. Qui ?
Qui voudrait ne pas être heureux ? Qui voudrait ne pas chercher le bonheur ? Personne. Tout le monde veut être heureux. Tout le monde veut connaître le bonheur. Et pourtant… Pourtant, tout le monde ne le connaît pas. Alors peut-être faut-il chercher ensemble quelques instants la clef de ce bonheur que l’on cherche sans le trouver, de ce bonheur que l’on croit avoir trouvé et qui se révèle moins « bonheur » qu’on ne le pensait et même quelquefois un peu malheur, ce qui fait qu’au lieu de se laisser porter par la joie de vivre, l’allégresse, on est un peu écrasé par le doute, la mélancolie, la tristesse… On cherche toujours la clef. Qui nous donnera la clef du bonheur ? Qui sera capable d’ouvrir pour nous la porte du bonheur ?

Voilà ce que nous allons essayer de comprendre en regardant et en écoutant Elisabeth et Marie. Qu’est-ce qui les rend heureuses ? Qu’est-ce qui fait que Marie exulte de joie ? Qu’est-ce qui lui fait chanter « Magnificat » ? Ce n’est pas la richesse : elle n’est pas riche. Ce n’est pas la notoriété : elle n’est pas connue ; pas encore ; elle le sera plus tard mais elle ne sera plus sur notre terre. Ce ne sont pas les choses extraordinaires qu’elle fait : elle ne fait rien d’extraordinaire. Ce qui lui fait connaître la joie, c’est d’avoir cru à la Parole du Seigneur. Elle a cru ce que Dieu lui a dit par le message de l’Ange, elle a cru que Dieu voulait faire quelque chose avec elle, elle a cru que Dieu faisait appel à elle pour changer quelque chose dans ce monde. Elle a cru et elle a fait confiance. Cette confiance qu’elle a accordée à la Parole du Seigneur va changer toute sa vie. Non seulement elle va avoir un fils, mais quel fils ! Non seulement elle va être témoin de ce qu’il fait : des paroles, des signes, mais encore elle va être entraînée avec lui jusqu’à donner tout ce qu’elle a : son fils, son fils unique, qui sera cloué sur la croix. Malgré les épreuves, malgré les souffrances, malgré ce Mal absolu, ce fils, qui est le don de Dieu, c’est sa joie.

Essayons cette clef du bonheur sur notre serrure, sur notre vie.
Où cherchons-nous le bonheur ? Qu’espérons-nous ? Où croyons-nous que nous allons trouver la joie ? On peut trouver un peu de joie en buvant, et on peut trouver beaucoup de tristesse en buvant trop. Pas seulement parce que l’on a le vin triste, mais parce que la joie que donne l’effet artificiel laisse la place au vide. On peut trouver un peu de joie en achetant beaucoup de choses, en courant le monde, en cherchant à vivre des « trucs » extraordinaires, mais ce que l’on achète s’use, se perd, ne nous plaît plus ; les retours ne sont pas toujours joyeux, et il n’est pas donné à tout le monde de vivre des « trucs » extraordinaires. La joie, le bonheur que Dieu nous propose, il nous le donne gratuitement, sans payer, sans argent. Nous y entrons en prenant l’eau et le pain et le vin qu’il nous donne et sa Parole qu’il met en nous. Alors, si vous voulez vraiment progresser sur le chemin du bonheur, prenez ce petit sentier, où il y a quelquefois des pierres sous vos pas et des épines qui accrochent, mais où l’eau coule gratuitement, où le pain est partagé gratuitement, où le vin de la fête est donné gratuitement, où la joie est donnée gratuitement.

« Cherchez le Seigneur pendant qu’il est proche » : il est toujours proche, mais nous nous approchons. Il y a des moments où nous sommes un peu plus proches, et des moments où nous sommes un peu plus loin. En ce moment, nous sommes un peu plus proches, grâce à ce que nous vivons ici : alors, cherchez-le maintenant, pendant qu’il est proche, invoquez-le pendant qu’il vous écoute, parlez-lui dans vos cœurs, faites-lui vos confidences ; parlez-lui de vos désirs, de vos espoirs, de vos doutes, de vos peurs, parlez-lui de ce que vous voudriez, mais par dessus tout, écoutez-le ! Ecoutez sa voix qui vient toucher votre cœur. Elle vous indique le chemin du bonheur : « Il y a plus de bonheur à donner qu’à recevoir ». Celui qui veut connaître la joie doit apprendre à aimer, pas apprendre à se faire aimer. Apprendre à aimer ; apprendre à se mettre au service des autres ; apprendre la joie d’avoir pu faire quelque chose d’utile pour nos frères ; apprendre la joie d’avoir pu partager ; apprendre la joie d’avoir pu vivre ces quelques jours ensemble, même si c’est un peu difficile ; apprendre la joie de faire des choses que l’on n’est pas capable de faire tout seul ; apprendre la joie d’entendre une parole, un chant, un silence, une présence.

Ce chemin, c’est le chemin de la sainteté. Le Christ nous appelle à devenir des saints comme il est Saint. Nous devenons des saints comme il est Saint si nous apprenons, comme lui, à nous faire serviteurs des autres, à nous mettre au service des autres (…). Répondez à l’appel du Seigneur ! Ne fermez pas votre cœur : vous connaîtriez le regret et la tristesse. Ouvrez vos cœurs ! Peut-être, quelques-uns et quelques-unes d’entre vous, vous serez appelés pour rendre service à travers le monde pendant quelque temps ; vous serez appelés à aller partager ce que vous avez appris, vous serez appelés à aller aider des pays plus pauvres. Ne fermez pas vos cœurs ! Ouvrez vos cœurs ! Beaucoup d’entre vous découvriront l’amour d’un homme et d’une femme, et ils seront appelés à devenir heureux dans cet amour.
Apprenez à devenir heureux par les autres, ouvrez vos cœurs. Dieu veut faire des vous des saints. Devenez des saints en devenant des serviteurs de l’amour.

+André cardinal Vingt-Trois, archevêque de Paris

 

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11 janvier 2009 7 11 /01 /janvier /2009 16:43

Chers amis,

En cette année 2009, nous allons reprendre notre réflexion sur l'existence de Dieu.

Nous allons continuer à explorer les preuves de l’existence de Dieu, et découvrir, émerveillés, que la raison nous conduit naturellement à Dieu – contrairement à une idée reçue trop bien enracinée –, pour peu que l’on raisonne objectivement sur le réel positif, c’est-à-dire sur la nature, l’univers, le cosmos.

Pour relancer le débat en ce début d’année, je souhaiterais partir d'un texte publié par le Pasteur Eric George sur son Blog, dans le cadre de l’Année Calvin (chez les protestants).

Dans un court passage tiré du livre « l’Institution Chrétienne » de Jean Calvin, le Pasteur relève « un petit point important dans la pensée du protestantisme : ni la foi, ni la reconnaissance de l’inspiration de l’Ecriture ne nous viennent de notre raison. Je ne crois pas en Dieu parce que mon intelligence m’a démontré qu’il existait, pas plus que je ne reconnais en la Bible la Révélation du Dieu unique après une longue série de déduction. Cela ne signifie pas qu’il soit interdit de faire jouer notre intelligence dans la lecture de la Bible, pas plus que cela ne nous interdit de confronter notre foi à notre raison… Mais notre foi ne nous vient pas de nous. »

« Ce constat emporte deux conséquences : cela implique d’une part qu’il est vain d’essayer de convaincre par nos arguments un non-croyant de l’existence de notre Dieu ou du bien-fondé de notre foi, notre rôle est bien d’annoncer mais pas de convertir ni de prouver Dieu.

« D’autre part, cela nous interdit de regarder de haut ceux qui ne croient pas. Notre foi n’est pas la preuve d’une plus grande clairvoyance ou d’une meilleure compréhension de l’univers ou d’une plus grande ouverture aux signaux divins. Elle est un cadeau qui nous est fait. Rien de plus. Rien de moins. »

Un grand merci au Pasteur pour ce texte qui nous donne à réfléchir.

1.
Premier point : « ni la foi, ni la reconnaissance de l’inspiration de l’Ecriture ne nous viennent de notre raison. » C’est un « petit point important dans la pensée du protestantisme » précise le Pasteur.

Eh bien… c’est un « petit » point important pour nous aussi, catholiques ! La foi est un don de Dieu. Nul ne peut se l’attribuer à soi-même. Et nul ne peut la communiquer à autrui.

La foi n’est pas une lumière que l’on peut partager aussi facilement que d’autres types de connaissances ; elle est d’abord et avant tout une grâce surnaturelle venant de notre Père des cieux.

Ainsi, quand
à Césarée de Philippe, Pierre déclare à Jésus qu’il est « le Christ, le Fils du Dieu vivant », Jésus lui révèle que cette confession de foi ne lui est pas venue « de la chair et du sang, mais de mon Père qui est dans les cieux » (Mt 16, 17).

Saint Jean dira, lui, que ce n’est pas nous qui avons aimé Dieu ; c’est Dieu qui nous a aimé le premier (1 Jn 4.10).

C’est de Dieu que vient l’initiative ; sans intervention divine à notre égard, nous serions incapables d’avoir la foi, quelque intelligents que nous puissions être. Car le mystère de Dieu et de Ses volontés est hors de notre portée.

La foi ne nous vient donc pas de notre raison, mais de Dieu.

Pour croire,
« l’homme a besoin de la grâce de Dieu qui prévient et assiste, et du secours intérieur de l’Esprit Saint qui touche son cœur et le fait se tourner vers Dieu, lui ouvre les yeux de l’âme et donne ‘à tous la joie de l’acceptation de la vérité et de la foi’ » (Dei Verbum, 5).

« Nul ne peut venir à moi si mon Père ne l’attire »
disait encore Jésus (Jn 6. 44). « La grâce de la foi [consiste précisément dans] cette « attraction » que Dieu exerce à l’égard de l’essence intérieure de l’homme et indirectement, à l’égard de toute la subjectivité humaine pour que l’homme réponde pleinement à (…) Dieu (…) en s’abandonnant à lui. » (Jean-Paul II, Audience générale du 10 avril 1985).

Que nos frères protestants en soient donc bien convaincus : les catholiques aussi croient dans le primat de la grâce de Dieu !

2.
« Je ne crois pas en Dieu parce que mon intelligence m’a démontré qu’il existait, pas plus que je ne reconnais en la Bible la Révélation du Dieu unique après une longue série de déduction. »

C’est ce qu’enseigne le Catéchisme de l’Eglise Catholique (pour ce qui est en tous les cas du second point) : « Le motif de croire n’est pas le fait que les vérités révélées apparaissent comme vraies et intelligibles à la lumière de notre raison naturelle. Nous croyons à cause de l’autorité de Dieu même qui révèle et qui ne peut ni se tromper ni nous tromper. » (§ 156).

Toutefois, si la foi est une grâce accordée par Dieu à qui il veut (cf. Mc 3. 16), cette grâce se déploie dans toutes nos facultés spirituelles, y compris notre intelligence. Il n’est donc pas juste de dire que la foi ne se communiquerait pas d’intelligence à intelligence, dans un échange d’arguments rationnels (
« après une longue série de déduction. »). Elle le pourrait dans la mesure où les deux intelligences en dialogue seraient toutes deux mues de l’intérieur par la grâce de Dieu.

La grâce de la foi, disait Jean-Paul II,
« est la source de l’illumination surnaturelle qui « ouvre les yeux de l’esprit » ; et la grâce de la foi embrasse donc particulièrement la sphère cognitive de l’homme et se concentre sur elle. Il en résulte l’acceptation de tous les contenus de la Révélation où se dévoilent les mystères de Dieu et les éléments du plan salvifique concernant l’homme ».

Il serait donc absurde d’attendre passivement le don de la foi pour commencer à réfléchir (sur Dieu ou sur la Révélation), comme il serait insensé de ne pas chercher à argumenter rationnellement avec les non croyants sur les motifs de crédibilité de notre foi. Car c’est dans le dialogue rationnel que la Lumière de la vérité jaillira (non en vertu de la supériorité d’un interlocuteur sur l'autre, mais par l’effet de la grâce de Dieu) ; et c’est dans la recherche active de Dieu que la grâce de la foi pourra être communiquée : « Celui qui cherche trouve », dit Jésus (Lc 11. 10).

3.
La foi est donc tout autant un acte de la volonté humaine qu’une grâce divine. Parce qu’elle est donnée à celui qui la recherche humblement ; et parce qu’elle est « obéissance » nous dit Saint Paul (Rm 1. 5), c’est-à-dire au sens étymologique : écoute de la Parole de Dieu qui se révèle, et assentiment de la raison et de la volonté humaine à cette divine révélation.

 

La raison a bien sa part dans l’acte de foi. Car la foi ne nous tombe pas dessus – sauf cas exceptionnels ! – comme une averse soudaine à laquelle nous ne pourrions échapper. Pour croire, il faut avoir été touché – en quelque manière – par la grâce de Dieu, et répondre à ce don de la grâce par un acte de l’intelligence et de la volonté : sans cette réponse positive de l’homme, il n’y a pas à proprement parlé de foi. Car la foi réside très précisément dans cette réponse personnelle de l’homme à Dieu qui se révèle.

On voit donc que Dieu ne fait pas tout : par sa grâce, il nous « attire », nous sollicite, nous fait la cour, pourrait-on dire, mais… il ne répond pas à notre place. Si la grâce de Dieu n’est certes pas totalement absente de la réponse même de l’homme – qu'elle a suscitée –, elle n’est jamais contraignante : notre liberté est engagée par l’acte de foi.

« Par sa nature même (…), l’acte de foi a un caractère volontaire puisque l’homme racheté par le Christ Sauveur et appelé par Jésus-Christ à l’adoption filiale, ne peut adhérer à Dieu qui se révèle que si, attiré par le Père, il fait à Dieu l’hommage raisonnable et libre de sa foi »
(Jean-Paul II, Audience Générale du 17 avril 1985).

« Croire est un acte de l’intelligence adhérant à la vérité divine sous le commandement de la volonté mue par Dieu au moyen de la grâce »
résumait St Thomas d’Aquin en une formule admirable.

4.
La foi, avons-nous dit, est un don de la grâce. Mais elle est aussi un acte authentiquement humain. Elle est pour chacun de nous affaire de conscience.

Nul ne peut ainsi se dire en lui-même : « Pas de chance ! Je n’ai pas la foi. Dieu ne m’a pas fait ce don. C’est comme ça, je n’y peux rien. La foi, c’est pour les autres ; pas pour moi ! Laissez-moi donc tranquille avec vos histoires. »

Car
« en vertu de leur dignité, tous les hommes, parce qu’ils sont des personnes, c’est-à-dire doués de raison et de volonté personnelle, sont pressés par leur nature même et tenus par obligation morale à chercher la vérité, celle tout d’abord qui concerne la religion. Ils sont tenus aussi à adhérer à la vérité dès qu’ils la connaissent et à régler leur vie selon les exigences de cette vérité » (Vatican II, Dignitatis humanae, 2).

Cela implique que soit exclue toute espèce de contrainte.
« Dieu, certes, appelle l’homme à le servir en esprit et vérité ; si cet appel oblige l’homme en conscience, il ne le contraint pas. Dieu, en effet, tient compte de la dignité de la personne humaine qu’il a lui-même créée et qui doit se conduire selon son propre jugement et user de sa liberté » (Vatican II, Dignitatis humanae, 11).

Ou comme le disait le savant empereur byzantin Manuel II Paléologue (cité par Benoît XVI dans sa remarquable conférence de Ratisbonne le 12 septembre 2006) :
« Dieu ne prend pas plaisir au sang et ne pas agir selon la raison est contraire à la nature de Dieu. La foi est fruit de l'âme, non pas du corps. Celui qui veut conduire quelqu'un vers la foi doit être capable de parler et de penser de façon juste et non pas de recourir à la violence et à la menace... Pour convaincre une âme douée de raison, on n'a pas besoin de son bras, ni d'objets pour frapper, ni d'aucun autre moyen qui menace quelqu'un de mort... » Seulement de son intelligence. Et de la grâce de Dieu, toujours offerte.

5.
« Je ne crois pas en Dieu parce que mon intelligence m’a démontré qu’il existait ». C’est là l’erreur classique, commise par beaucoup, y compris dans les milieux catholiques, et qui provient sans doute de l’ambiguïté du mot « croire » en français. Il convient en effet de bien distinguer ce qui relève de la croyance en l’existence de Dieu et de la foi. La croyance en l’existence de Dieu n’est pas la foi. Il ne suffit donc pas, par exemple, de croire en l’existence de Dieu pour être sauvé.

La foi, avons-nous dit, est l’assentiment de l’intelligence et de la volonté à la Révélation que Dieu fait de lui-même en Jésus-Christ. Elle suppose donc la Révélation divine, la grâce agissante dans l’âme de celui qui reçoit cette Révélation, et une libre reconnaissance de cette Révélation par l’âme qui fait l’offrande à Dieu de son intelligence et sa volonté.

La croyance en l’existence de Dieu est d’un tout autre ordre. Elle ne suppose ni n’implique aucune action de la grâce dans l’âme de celui qui réfléchit à cette question – qui est philosophique, plus que religieuse. L’existence de Dieu peut être découverte par la seule activité de la raison, sans le secours de la Révélation, à partir de la considération des choses créées.

Tout est grâce, dans la mesure où c’est Dieu Lui-même qui nous a fait don de la Création et de notre humaine intelligence. Tout ce que nous sommes, tout ce que nous avons, tout ce qui est, vient de Dieu. Le primat de la grâce est donc sauf, même ici, dans cette question métaphysique de l’existence de Dieu.

Ceci étant posé, il faut affirmer avec Jean-Paul II qu’
« avant même de prononcer son propre « Je crois », l’homme possède déjà quelque concept de Dieu qu’il atteint par l’effort de sa propre intelligence. » (Jean-Paul II, Audience générale du 20 mars 1985). Le Concile Vatican I déclarait ainsi que « Dieu, principe et fin de toutes choses, peut-être connu de façon certaine à partir des choses créées par la lumière de la raison naturelle ». Tout homme peut donc connaître l’existence de Dieu, et jusqu’à un certain point « son essence, ses perfections et ses attributs. Dieu invisible devient en un certain sens visible dans ses œuvres » (Jean-Paul II, op. cit).

« Le monde visible constitue pour l’intelligence humaine la base en vue de l’affirmation de l’existence du Créateur invisible (…). L’homme possède la faculté connaître Dieu par sa seule raison : il est capable d’une certaine « science » de Dieu, bien que de manière indirecte et non immédiate. Donc, près du « je crois » se trouve un certain « je sais ». Ce « je sais » concerne l’existence de Dieu, et aussi, jusqu’à un certain point, son essence. Cette connaissance intellectuelle de Dieu (…) se concentre sur la connaissance de Dieu comme cause première, et de même comme fin ultime de l’univers (…). Donc, selon l’Eglise, toute notre pensée sur Dieu, d’après la foi, a également un caractère rationnel et intelligible (…). »
(Jean-Paul II, Audience générale du 20 mars 1985).

« Cette connaissance de Dieu au moyen de la raison, en remontant à lui à partir des choses créées correspond à la nature raisonnable de l’homme. Elle correspond également au dessein de Dieu qui, dotant l’homme d’une telle nature, veut que celui-ci puisse le connaître »
(Jean-Paul II, Audience générale du 27 mars 1985).

Pour revenir au propos initial du Pasteur Eric Georges, je dirais qu’il est tout à fait possible de démontrer l’existence de Dieu par le moyen de l’intelligence. Cela ne donnera certes pas la foi à celui que l’on aura convaincu, mais aura quand même le mérite de le sensibiliser aux questions religieuses. Il n’aura plus d’obstacle intellectuel à considérer la Révélation divine en Jésus-Christ comme potentiellement authentique ; il sera enclin à l’examiner de plus près, dans un état nouveau de réceptivité propice à l’action de la grâce.

La Parole de Dieu portera ainsi d’autant plus de fruit que la terre ensemencée aura été préparée. L’évangélisation consiste tout autant, à mon sens, à annoncer explicitement la Parole qu’à préparer le terrain en disposant les âmes à la recevoir « optimalement ». Nous sommes tous en ce sens des précurseurs, à l’image de St Jean-Baptiste : comme lui, nous sommes appelés à préparer le chemin du Seigneur (Lc 3. 4-5), à tracer un sentier droit dans le désert aride de l’athéisme.

6.
« Il est vain, écrit le Pasteur, d’essayer de convaincre par nos arguments un non-croyant de l’existence de notre Dieu ou du bien-fondé de notre foi, notre rôle est bien d’annoncer mais pas de convertir ni de prouver Dieu. »

Notre rôle de chrétien n’est pas de convertir, on est bien d’accord. Si la foi est une grâce, un don de Dieu, elle ne peut être accordé que par Dieu Lui-même.

Tout évangélisateur devrait ainsi prendre à son compte cette parole très juste de Sainte Bernadette :
« Je ne suis pas chargée de vous convaincre ; je suis chargée de vous dire ! » Car telle est la mission évangélisatrice de l’Eglise.

« Evangéliser ne signifie pas seulement enseigner une doctrine mais plutôt annoncer Jésus-Christ par la parole et par les actes, c’est-à-dire se faire instrument de sa présence et de son action dans le monde (…) Aux origines de l’Eglise, ce n’est pas par la contrainte ni par des habiletés indignes que les disciples du Christ s’employèrent à amener l’homme à confesser le Christ comme Seigneur, mais avant tout par la puissance de la Parole de Dieu »
(Note doctrinale de la Congrégation pour la doctrine de la Foi, 14 décembre 2007). Car la vérité évangélique « ne s’impose que par la force de la vérité elle-même » (Vatican II, Dignitatis humanae, 11).

Il reste que notre témoignage de foi risque de bouleverser un grand nombre, et que de nombreuses questions ne manqueront pas de fuser : « Tu dis que Jésus est le Fils de Dieu, mais Dieu peut-il avoir un Fils ? Et puis ton Dieu, existe-t-il seulement ? Et qu’est-ce qui me dit que la Bible est la Parole de Dieu et le christianisme la « vraie » religion ? » etc… La transmission surnaturelle de la foi à notre interlocuteur dépendra peut-être de la réponse que nous donnerons à telle ou telle de ses questions. C’est pourquoi il faut être prêts à répondre (cf. 1 P 3. 15). C’est-à-dire à entrer en dialogue avec les non-croyants. L’évangélisation n’est pas un prosélytisme ni un bourrage de crâne : elle est une invitation au dialogue avec les hommes de ce temps qui ne connaissent pas Dieu. On ne peut donc pas se contenter d’annoncer, de proclamer, de marteler ; il faut aussi discuter, argumenter, répondre aux objections, en prenant soin de partir de là où se trouve notre interlocuteur. Ainsi l’évangélisation sera-t-elle un véritable service d’amour, une authentique œuvre de charité.

« L’évangélisation comporte aussi un dialogue sincère, qui tente de comprendre les raisons et les sentiments d’autrui. En effet, on n’accède pas au cœur de l’homme sans gratuité, sans charité ni sans dialogue, de sorte que la parole annoncée ne soit pas seulement proférée mais qu’elle parvienne aussi de manière appropriée dans le cœur des destinataires. Cela exige de tenir compte des espérances et des souffrances, et des situations concrètes de ceux à qui on s’adresse. En outre, c’est justement à travers le dialogue que les hommes de bonne volonté ouvrent plus librement leur cœur et qu’ils partagent sincèrement leurs expériences spirituelles et religieuses. Ce partage, signe d’une amitié vraie, est une occasion précieuse pour le témoignage et l’annonce chrétienne »
(Note doctrinale de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, 14 décembre 2007).

7.
« D’autre part, cela nous interdit de regarder de haut ceux qui ne croient pas. Notre foi n’est pas la preuve d’une plus grande clairvoyance ou d’une meilleure compréhension de l’univers ou d’une plus grande ouverture aux signaux divins. Elle est un cadeau qui nous est fait. Rien de plus. Rien de moins. »

L’évangélisation est une terrible responsabilité, il est vrai. Elle est un service rendu à nos frères, un « partage » comme dit la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Mais le danger est grand pour l’évangélisateur de tomber dans l’orgueil spirituel – sans doute le péché le plus redoutable ; l’orgueil de celui qui sait, et qui vient avec ses connaissances apporter son « savoir » à celui qui ne sait pas – avec tout ce que cela peut avoir « d’écrasant » pour celui-ci. L’évangélisateur devrait sans cesse demander à Dieu la grâce de l’humilité. Car, nous interroge l’auteur de l’Imitation de Jésus-Christ :
« Que vous sert de raisonner profondément sur la Trinité, si vous n’êtes pas humbles, et que par là, vous déplaisiez à la Trinité ? Les discours sublimes ne font pas l’homme juste et saint, mais une vie pure rend cher à Dieu (…) Quand vous sauriez toute la Bible et toutes les sentences des philosophes, que vous servirait tout cela sans la grâce et la charité ? » (Livre I, Chapitre premier). Et l’auteur de l’Imitation de nous avertir : « Plus et mieux vous savez, plus vous serez sévèrement jugés si vous n’en vivez pas plus saintement » (Chapitre 2).


 

Pour approfondir le sujet :
Ø relire "La métaphysique au service de l'évangélisation" et "L'Epiphanie de Dieu dans la Création".

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31 décembre 2008 3 31 /12 /décembre /2008 15:41

Chers amis lecteurs,

En cette nuit, une année s’achève pour laisser place à une autre. Comme chaque année, nous nous réunissons en ce soir de la Saint Sylvestre, en famille ou entre amis, pour célébrer la nouvelle année, avec tous les espoirs dont elle est porteuse pour chacun de nous de renouveau et de bonheur. Qui dit nouvelle année dit en effet nouvelle chance, nouveau départ. Tout redevient possible, et nous osons croire de nouveau en l’avenir. C’est sans doute la raison pour laquelle nous sommes dans la réjouissance et dans la fête. Les festivités – parfois un peu excessives ! – du réveillon du Nouvel An me paraissent révélatrice chez nos contemporains d’un immense acte de foi et d’espérance en l’avenir. Nous osons croire que les épreuves et difficultés de l’année passée sont derrière nous, et que l’année qui vient va nous sourire ; qu’elle sera bonne. En cette nuit du 31 décembre, nous accueillons dans notre cœur la Bonne Nouvelle d’un nouveau commencement, comme d’une nouvelle « naissance ». Et nous sommes dans la joie. Nous formulons les uns pour les autres des vœux de bonne santé, de réussite sociale, amoureuse et familiale. Nous appelons les uns sur les autres le bonheur et la paix.

« Appelez le bonheur sur Jérusalem :
Paix à ceux qui t’aiment !
Que la paix règne dans tes murs,
le bonheur dans tes palais ! »

(Psaume 121)

Je vous souhaite donc à titre personnel tous mes vœux de bonheur et de paix pour cette année 2009 qui commence. Mais au risque de vous surprendre, je ne vous souhaite pas d’abord d’être riche, en bonne santé, ou de trouver l’homme ou la femme de votre vie. Cela, je vous le souhaite aussi, mais je ne vous le souhaite pas d’abord, car le vrai bonheur est ailleurs. Le vrai bonheur – votre bonheur – ne dépend pas des circonstances extérieures de votre vie, qui vont, qui viennent ; qui un jour vous sont favorables, un jour défavorables – cette vérité, qui fut celle de l’année 2008 et des années précédentes, sera aussi, n’en doutons pas, celle de 2009 et de toutes les années à venir... L’année 2009 nous réserve ainsi de grands moments de joie et de vrai bonheur, mais aussi – nous le pressentons déjà –, des moments de peine et des épreuves... Il est donc vain et dérisoire de faire dépendre notre bonheur des circonstances heureuses de notre vie. Parce que ces circonstances heureuses, si elles surviennent – et je souhaite sincèrement aussi qu’elles surviennent pour chacun de vous –, ces circonstances heureuses passent, et ne durent pas.

Mon souhait le plus cher en ce début d’année, et pour chacun de vous, va au-delà du bonheur que la santé, l’argent ou l’amour humain peut procurer à un cœur d’homme. Ce que je vous souhaite à tous, c’est d’entrer dans le bonheur qui ne passe pas, et qui demeure par-delà les vicissitudes de nos existences ; des évènements, favorables ou défavorables, de notre vie.

Mais quel est donc ce bonheur qui ne passe pas ?

Le bonheur qui ne passe pas, ce n’est pas le bonheur lié aux évènements favorables et heureux de notre vie, qui passent ; c’est le bonheur d’un cœur enraciné dans l’Amour de Dieu qui, Lui, ne passe pas. Toutes les choses de ce monde passent ; seul l’amour de Dieu est éternel. Pour connaître le vrai bonheur sur cette terre, il faut planter sa tente dans l’Amour éternel de Dieu.

Le bonheur, c’est d’être en paix avec Dieu, c’est d’être réconcilié avec Lui. C’est découvrir qu’il est notre Père, et que nous sommes ses enfants. C’est faire l’expérience de son Amour miséricordieux pour chacun de nous, cet Amour miséricordieux qu’il nous a manifesté en son Fils Jésus-Christ. C’est apprendre de Lui qu’il est doux et humble de cœur, et qu’il veut notre bonheur. Qu’il ne nous a pas créé pour une existence misérable et malheureuse, mais pour le bonheur, le vrai bonheur, le bonheur qui ne passe pas. « Je sais les projets que j'ai formés sur vous, dit le Seigneur, projets de paix et non de malheur : je vais vous donner un avenir et une espérance. » (Jr 29. 11)

Ce que nous attendons de l’année nouvelle – le bonheur durable – l’année nouvelle ne pourra pas nous le donner, et nous le constaterons amèrement à la fin de l’année prochaine, comme à la fin de chaque année, et nous reporterons alors notre espérance sur l’année d’après. Mais ce que l’année nouvelle ne peut nous donner, nous pouvons le recevoir de Dieu ! « Ne vous y trompez pas, frères bien-aimés, les dons les meilleurs, les présents merveilleux, viennent d'en haut, ils descendent tous d'auprès du Père de toutes les lumières, lui qui n'est pas, comme les astres, sujet au mouvement périodique ni aux éclipses passagères. Il a voulu nous donner la vie par sa parole de vérité, pour faire de nous les premiers appelés de toutes ses créatures. » (Jc 1. 16-18).

De notre Père des Cieux, de qui vient toute bénédiction, nous pouvons recevoir la grâce d’un nouveau départ, d’une nouvelle vie, du vrai bonheur qui ne passe pas. En Lui, nous pouvons tout recommencer, nous pouvons tout espérer, qui que nous soyons, et où que nous en soyons dans notre expérience de vie – même si nous nous croyons incapables de faire quelque chose de beau avec notre vie, même si nous pensons qu’il est trop tard. Avec Dieu, tout redevient possible ! De Lui, nous pouvons recevoir la Bonne Nouvelle, la vraie Bonne Nouvelle qui nous vient de l’Evangile – qui signifie précisément « Bonne Nouvelle » –, et qui est cette intimité de vie avec le Dieu d’Amour, le Très-Haut qui s'est fait le Tout Proche en la personne de son Fils bien-aimé, Jésus-Christ. En Jésus-Christ, et par son sang versé pour nous sur la Croix, notre âme pacifiée et réconciliée peut connaître et goûter le vrai repos, la paix intérieure, et retrouver la capacité d’aimer – de s’aimer soi-même et d’aimer les autres. « Maintenant, en Jésus-Christ, vous qui étiez loin, vous êtes devenus proches par le sang du Christ. C’est lui, le Christ, qui est notre paix (…). Il voulait ainsi rassembler les uns et les autres en faisant la paix, et créer en lui un seul Homme nouveau. Les uns comme les autres, réunis en un seul corps, il voulait les réconcilier avec Dieu par la Croix : en sa personne, il a tué la haine. Il est venu annoncer la Bonne Nouvelle de la paix, la paix pour vous qui étiez loin, la paix pour ceux qui étaient proches. » (Eph 2. 13-17)

Nous venons de vivre deux années mariales intenses : 2007, qui fut marquée par le 90e anniversaire des apparitions de la Vierge Marie à Fatima, et 2008 qui fut l’année jubilaire du 150e anniversaire des apparitions de Lourdes. Je vous propose en ce début d’année 2009 que nous nous tournions de nouveau vers la Vierge Marie, elle que nous honorons dans la liturgie du 1er janvier comme la Mère de Dieu. Dans son important message du 25 décembre 2008 à Medjugorje, elle nous dit ceci :
« Chers enfants, vous courez, vous travaillez, vous amassez, mais sans la bénédiction. Vous ne priez pas ! Aujourd’hui je vous invite à vous arrêter devant la crèche et à méditer sur Jésus que je vous donne aujourd’hui encore, pour qu’Il vous bénisse et vous aide à comprendre que, sans Lui, vous n’avez pas d’avenir. C’est pourquoi, petits enfants, abandonnez vos vies entre les mains de Jésus afin qu’Il vous guide et vous protège de tout mal. Merci d’avoir répondu à mon appel. »

Je vous propose de garder ce message dans votre coeur tout au long de cette nouvelle année 2009, car
dans ce message se trouve le secret de votre bonheur.

Votre bonheur, nous dit Marie, se trouve en Dieu. Or, comment entre-t-on habituellement en relation avec Dieu ? Par la prière. Si nous voulons que quelque chose change dans notre vie, si nous voulons connaître le bonheur, le vrai bonheur, le bonheur durable et inaltérable qui se trouve en Dieu, alors nous devons prier. Comme disait le Padre Pio : « 
Dans les livres nous cherchons Dieu, dans la prière nous le trouvons. La prière est la clé qui ouvre le coeur de Dieu. » Saint Alphonse de Liguori ne disait pas autre chose, qui comparait aussi la prière à une clé : « la prière est la clef de tous les trésors divins ». « Chacun de nous peut tutoyer le Seigneur, disait le Pape Benoît XVI ; chacun peut l'appeler. Le Seigneur se trouve toujours à portée de voix. »

Prenons donc l’habitude de la prière. De nous « arrêter », comme dit Marie, « devant la crèche », ou devant une icône, un crucifix ; et de prier notre Père qui est là, dans le secret. Jésus nous dit qu’Il nous le revaudra (Mt 6. 6). Nous ne perdons pas notre temps quand nous prions ; nous enracinons notre vie dans le vrai bonheur. Nous ne nous en rendrons peut-être pas compte immédiatement, mais après quelques semaines, nous verrons les premiers fruits. Celui qui entre dans la vie de prière doit s’armer de patience, comme le cultivateur (Jc 5. 7). Et apprendre à aimer ces moments gratuits de présence à Dieu. Ne vous inquiétez pas à ce sujet du sentiment de répulsion que vous pensez avoir pour la prière : si la prière demande un effort personnel qui peut coûter au début, plus on prie et plus on aime prier. La prière vient en priant.

Cela dit, contrairement à la prière bouddhique, il ne s’agit pas dans la prière chrétienne de faire le vide en soi ; il s’agit tout au contraire de faire le plein ; de s’emplir d’une présence ; de la présence de Dieu manifestée dans l’humanité de Jésus. L’humanité de Jésus est le chemin qui nous conduit à Dieu. C’est pourquoi la Vierge Marie nous demande de « méditer sur Jésus ». Ouvrons pour cela notre Bible, et lisons les Evangiles qui sont le récit de la vie de Jésus et le recueil de ses Paroles. La Bible, nous le savons dans la foi, contient la Parole de Dieu. Il peut nous arriver parfois de nous plaindre du silence de Dieu. Mais combien de nous lisons habituellement la Bible ? « Ignorer les Ecritures, disait Saint Jérôme, c’est ignorer le Christ ». C’est donc ignorer aussi le bonheur et la paix que Dieu nous donne en son Fils.

Soyons conscient que la Parole de Dieu contenu dans la Bible est une nourriture. C’est ce que disait Jésus au démon dans le désert : « L’homme ne se nourrit pas seulement de pain, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu » (Mt 4. 4). De même que nous nourrissons notre corps plusieurs fois par jour avec de la nourriture terrestre, de même, il est important pour le déploiement de notre vie intérieure et… pour notre bonheur que nous nourrissions notre âme avec la Parole de Dieu. « 
Ne travaillez pas pour la nourriture qui se perd, dit encore Jésus, mais pour la nourriture qui se garde jusque dans la vie éternelle. » (Jn 6. 27).

La prière donc, et la parole de Dieu.
Ajoutons encore les sacrements. Spécialement le Baptême et la Confirmation pour ceux qui ne les ont pas encore reçus ; la Confession et l'Eucharistie pour les autres. C’est dans les sacrements de l’Eglise que nous recevons de Dieu le pardon des péchés et le don de sa vie, son Esprit Saint, qui est le Principe de la vie nouvelle en Dieu ; de tout recommencement. « Recevez l’Esprit Saint, dit Jésus à ses Apôtres en répandant sur eux son souffle, le soir de sa Résurrection. Tout homme à qui vous remettrez leur péché, ils leur seront remis » (Jn 20. 23). Nous avons tous besoin de ce contact direct avec la Miséricorde de Dieu. Dans les sacrements, et par le ministère de ses prêtres, la main de Jésus vient nous toucher et nous purifier, comme le lépreux de l’Evangile (Mt 8. 2-3). Normalement, quand une personne saine vient toucher une personne atteinte d’une maladie contagieuse, elle se trouve contaminée par la maladie. Dans l’épisode du lépreux, c’est l’inverse qui se produit : le lépreux est purifié par la main de Jésus qui le touche. Eh bien, c’est exactement ce qui se passe dans les sacrements, qui sont les lieux où Dieu nous touche, nous infuse sa grâce et nous guérit de la lèpre du péché. En prenant l’habitude de fréquenter l’Eglise, de participer chaque dimanche à la messe, et de nous confesser régulièrement, nous « abandonnons notre vie entre les mains de Jésus », ainsi que nous le demande la Sainte Vierge. Nous confions notre existence à Dieu. Et nous fondons notre vie sur le roc ; nous construisons notre bonheur sur du solide, non plus sur du sable. Et quand surviendra la tempête, le temps de l’épreuve, notre « maison » tiendra debout, et nous garderons la paix intérieure parce que nous aurons construit sur du stable, du permanent, et non sur du passager et du fluctuant.

Les vœux que je forme pour chacun de vous sont donc, vous le voyez, extrêmement ambitieux. Je vous souhaite à tous en cette nouvelle année 2009 de rencontrer Dieu, de Le connaître intimement et personnellement ; de faire l’expérience de son Amour miséricordieux pour vous. Sachez que Dieu vous aime d’un amour éternel et de manière inconditionnelle, tels que vous êtes ; qu’il vous attend et vous espère en cette nouvelle année 2009 ; et qu’il vous donne rendez-vous dans la prière, dans sa parole, et dans les sacrements de son Eglise.

Si vous cherchez le bonheur, cherchez-le en Dieu ; vous ne le regretterez pas. Sachez que si les hommes vous ont déçu, Dieu, Lui, ne vous décevra pas.

Bonne et sainte année 2009 à tous et à chacun.

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30 décembre 2008 2 30 /12 /décembre /2008 08:49

En cette fin d’année 2008, je vous propose de lire, méditer et propager largement autour de vous l’Appel à la paix du rassemblement de Sant'Egidio à Chypre, où deux cents responsables religieux, de tous pays et de toutes confessions, se sont réunis du 16 au 18 novembre 2008. Pour ce 22e rassemblement interreligieux depuis la grande rencontre d'Assise en 1986 et selon l'esprit suscité par Jean-Paul II, les membres de la communauté ont lancé un appel à la paix dans un monde déchiré par les conflits, accablé par la pauvreté.

Je dédie tout spécialement cet article à Camille et Eloïse, qui souffrent particulièrement de la situation dramatique en Terre Sainte, terre de leurs ancêtres. « On appelle Sion : « Ma mère ! » car en elle, tout homme est né. » (Ps 86. 5).

Hommes et femmes de religions et cultures différentes, nous nous sommes réunis à Chypre, sur cette île belle et blessée, pour prier, dialoguer, faire grandir une civilisation de paix, dont le monde a besoin pour ne pas devenir inhumain. Ces journées ont été des journées de paix, pleines de confiance que la paix est possible.

Nous vivons un passage difficile de l'histoire. La crise économique qui étrangle le monde ébranle beaucoup de nos certitudes. Beaucoup regardent l'avenir avec pessimisme. Les pays les plus riches donnent la priorité à la tutelle de leurs citoyens. Mais cette crise coûtera cher au grand monde des pauvres. Nous pensons avec inquiétude aux millions de pauvres nouveaux et anciens qui sont victimes d'un marché qui croit être tout-puissant.

En effet, ceux qui souffrent dans notre monde à cause de la guerre, de la pauvreté, de la violence sont bien trop nombreux. On ne peut pas être heureux dans un monde tant éprouvé par la souffrance. On ne peut pas vivre sans compassion. Nous sentons la douleur des peuples otages de la guerre, de ceux qui sont obligés de quitter leur maison à cause de la haine ethnique ou des nationalismes, de ceux qui sont victimes d'un enlèvement ou qui ont disparu. Ceux qui souffrent sont bien trop nombreux.

L'heure n'est pas au pessimisme. Mais il est temps d'écouter la souffrance qui accable tant d'hommes et de femmes et de travailler pour fonder un nouvel ordre mondial de paix.
La recherche de la justice, le dialogue, le respect des plus faibles sont les instruments pour construire ce nouvel ordre. Mais pour faire cela il y a besoin de plus d'esprit et d'une plus grande humanité ! Un monde sans esprit devient vite inhumain.

Nos traditions religieuses, différentes les unes des autres, disent d'une voix forte qu'un monde sans esprit ne sera jamais humain : elles crient que la guerre ne pourra pas piétiner l'esprit et l'humanité ; elles demandent la paix. Elles veulent la paix, elles la demandent, elles l'implorent de Dieu dans la prière. Les religions savent que parler de guerre au nom de Dieu est une absurdité et un blasphème. Elles sont convaincues qu'une humanité meilleure ne pourra naître ni de la violence ni du terrorisme. Elles ne croient pas au pessimisme de l'affrontement inévitable entre les religions et les civilisations. Elles espèrent et elles prient pour que les peuples et les hommes construisent entre eux une communauté fondée sur la paix.

Aucun homme, aucun peuple, aucune communauté n'est une île. L'autre, l'amitié, le pardon et l'aide d'autrui sont indispensables. Nous avons un destin global commun : ou nous vivrons ensemble en paix ou nous périrons ensemble. La guerre n'est jamais inévitable et elle endeuille aussi le cœur du vainqueur.

Il n'y a pas de haine, de conflit, de mur, qui puisse résister à la prière, à l'amour patient qui se fait dialogue, au pardon. Le dialogue n'affaiblit pas, au contraire il fortifie. C'est la vraie alternative à la violence. Rien n'est perdu avec le dialogue. Tout peut devenir possible. C'est pour cela que, ici à Chypre, nous prions pour que toute injustice, toute guerre, tout mal soient effacés le plus tôt possible et que les peuples puissent redevenir des frères, à partir de cette île, jusqu'au Moyen-Orient, à l'Afrique, à l'Amérique latine et au monde entier.

Que Dieu octroie alors au monde le grand don de la paix grâce à la prière de tous les croyants !

Ce n'est pas l'utopie d'un paradis sur terre mais le devoir de construire un monde plus humain. Ce monde est possible quand règne l'esprit et quand nous vivons en frères.
Aucune guerre n'est sainte !

Que Dieu donne au monde le grand don de la paix pour la prière de tous les croyants !


Source : La Documentation Catholique

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25 décembre 2008 4 25 /12 /décembre /2008 16:26

« Depuis qu'il a pris chair dans le sein de Marie, le Verbe ne se lasse plus d'être enfanté.

« Aujourd'hui, comme il y a 20 siècles, il se cherche une mère. Il se cherche des mères, car aujourd'hui comme hier, Jésus a besoin d'être enfanté au cœur de l'humanité.

« Telle est notre vocation mariale à tous : concevoir en nous, à la suite de Marie, le Verbe incarné afin de le mettre au monde.

« Telle est aussi la mission de l'Eglise : enfanter Jésus au cœur de l'humanité. »


Extrait d'un article de Mgr Léonard (évêque de Namur) publié dans la revue "Le Sacré Cœur de Jésus, source de l'amour" (septembre 2007).

 

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7 décembre 2008 7 07 /12 /décembre /2008 16:20

Chers amis,

Je voudrais réagir aujourd’hui à un petit billet publié récemment par le Pasteur protestant Eric George sur son Blog  (j’en profite pour le saluer bien fraternellement).

Dans un petit article intitulé "Soli Deo Gloria, radicalement", le Pasteur Eric écrit ceci : « Mon opposition à une coopération de l'homme à son salut s'explique par un refus de diminuer la gloire de Dieu. Tout mérite accordé à l'homme réduit en effet d'autant la part de Dieu.

« On me proposait l'image suivante : tombé dans un précipice, je m'accroche du bout des doigts à la corniche quand un sauveteur vient me tirer de là. Si je m'accroche à la main qu'il me tend, on ne peut pas vraiment dire que mon salut vienne de moi. C'est ainsi qu'il faudrait comprendre la coopération de l'homme à son salut.

« Soit. Poussons un peu l'image et imaginons qu'à coté de moi, accroché à la corniche, il y ait un autre homme. Un sauveteur arrive, il nous tend à chacun une main secourable. Je m'accroche, l'autre tombe. C'est donc bien de moi qu'est venu l'acte décisif du salut, l'acte qui a fait la différence. À mes remerciements à mon sauveur, je peux donc joindre une autocongratulation...

« Bref, à cette image, je réponds ce que je répondais au collègue qui m'expliquait que Dieu faisait 10.000 km vers nous alors que par notre réponse nous parcourions un micron vers lui. Il est certes dans notre nature de vouloir dire que nous avons coopéré, que nous avons fait quelque chose, que nous avons participé à notre salut mais un micron attribué à l'homme, c'est un micron volé à Dieu.

« Dieu seul me fait vivre et je n'y suis pour rien. Dieu seul me sauve et je n'y coopère en rien. A Dieu seul revienne toute gloire... »

Reprenons ce texte à son début. « Mon opposition à une coopération de l'homme à son salut, écrit le Pasteur, s'explique par un refus de diminuer la gloire de Dieu. » C’est là une intention bien louable que de vouloir rendre à Dieu seul ce qui lui appartient en propre ; que de refuser de diminuer sa Gloire. Le rôle du chrétien – et ce à quoi est appelé tout homme sur cette terre – est de rendre gloire à Dieu seul, et de rejeter l’idôlatrie – qui consiste précisément à attribuer la Gloire revenant à Dieu seul à une créature.

« Tout mérite accordé à l'homme réduit en effet d'autant la part de Dieu. »
dit le Pasteur. C’est sur cette phrase que je souhaiterais m’arrêter. Car c’est là – à mon sens – que se trouve le « hic » du raisonnement. Tout ce qui est attribué à l’homme serait en quelque sorte enlevé à Dieu (« volé » dit même le Pasteur : « un micron attribué à l'homme, c'est un micron volé à Dieu. »). Tel est le postulat de départ, le présupposé, à partir duquel notre frère va dérouler son raisonnement sur le Salut.

Reste à en vérifier la validité.

Comme je suis un peu taquin, j’aurais d’abord envie de demander au Pasteur sur quel fondement biblique il s’appuie pour poser une telle affirmation. Où est-il écrit dans la Bible que ce qui est donné à l’homme est enlevé à Dieu ? Bref, comment cette justification de la Soli Deo Gratia s’articule-t-elle avec la Sola Scriptura ?

Dans la Bible, on peut trouver une abondance de textes en faveur de la Soli Deo Gratia. Mais où est-il écrit que le mérite accordé à l’homme est enlevé à Dieu ; que ce qui est mis au crédit de l’homme est mis au débit de Dieu ? Ce raisonnement ne s’inscrit-il pas dans une logique comptable – ce que je donne d’un côté, je le prends de l’autre – plutôt que dans le registre de la grâce – qui se conçoit comme une surabondance – qui n’enlève rien à celui qui la communique – tout au contraire : qui enrichit – ou glorifie – celui qui la donne.

C’est en donnant que l’on reçoit, dit Jésus (cf. Lc 17. 33). Voilà un grand paradoxe ! Mais c’est une réalité que chacun peut expérimenter, et qui est la réalité même de Dieu. On pourrait presque définir Dieu comme « Celui qui donne » : Dieu est en tant qu’il donne ; c’est en donnant que Dieu est vraiment Dieu. Dès lors, quand Dieu donne, il ne diminue en rien sa Gloire. Tout au contraire : Il la manifeste ; il la fait resplendir.

Quand Dieu donne à l’homme d’exister, il ne se limite pas ; il ne se prive de rien, il ne s’ampute pas ; au contraire il donne la possibilité à son Amour de se répandre, encore et encore… De même : quand Dieu s’abaisse en Jésus-Christ, – particulièrement dans sa naissance et sur la Croix (cf. Phi 2) – en réalité, il ne s’abaisse pas : il s’élève, il est glorifié (cf. Jn 12. 32).

Quand Dieu créé l’homme, il fait advenir à l’être une créature dotée de libre-arbitre capable de répondre à son Amour. Certes, cette liberté s’est dévoyée, et a succombé à la tentation de l’idôlatrie : c’est ce que nous appelons le péché originel. Mais en son Fils Jésus-Christ, Dieu a restauré ce libre-arbitre de l’homme et l’a rendu à nouveau capable de dire OUI à son Amour. Dès lors, quand l’homme répond OUI à l’amour de Dieu en usant de son libre-arbitre conformément à ce pourquoi il lui a été donnée, c’est un acte méritoire pour l’homme – un acte de salut –, et la Bible ne lui retire pas ce mérite (cf. 1 Co 4. 5 ; Ap 22. 12) ; mais c’est aussi et en même temps le fruit d’une grâce, et donc : la plus grande gloire de Dieu ! Car c’est la plus grande réussite de Dieu que d’être parvenu ainsi à susciter dans l’être une liberté capable de répondre favorablement à son Amour. Par son OUI d’amour en réponse à l’Amour de Dieu manifesté le premier, l’homme est glorifié, et Dieu est glorifié en lui (cf. Jn 13. 31 ; 2. Th 1. 10), car tout est de Dieu et tout vient de Dieu. C’est Dieu qui a créé l’homme ; c’est Dieu qui l’a sauvé et racheté ; c’est donc Dieu qui a permis à l’homme de poser dans l’éternité ce OUI libre qui le sauve.

Sans Dieu, l’homme n’existerait pas, ni sa liberté, ni son OUI, ni son Salut! C’est Dieu qui a rendu possible ce OUI libre et salvateur de l'homme. Et quand l’homme accomplit ce pour quoi il a été créé par Dieu, c’est la plus grande gloire de Dieu ! Celle-ci n’est nullement diminuée par le mérite de l’homme, mais au contraire manifestée dans ce mérite même.

Tout mérite de l’homme peut donc être imputé à Dieu (doit être imputé à Dieu) pour la bonne raison que l’homme n’est pas le rival de Dieu ; il en est la créature. Toute la gloire qui revient à la créature revient aussi au Créateur, et même d’abord et en premier lieu au Créateur sans qui la créature n’existerait pas et ne serait pas capable de poser le moindre acte méritoire (cf. 2 Co 3. 4-6).

Prenons quelques images pour comprendre. Si un génial inventeur créait un robot capable de rendre de nombreux services, tout le monde serait bien content à cause de ce robot et de tous les services qu’il est capable de rendre. Mais il est évident que le monde saurait rendre hommage au génial inventeur sans qui le robot n’existerait pas. Le génial inventeur serait glorifié à cause de son robot et de tout ce qu’il est capable de réaliser. Non seulement les qualités du robot n’enlèveraient rien à son génial inventeur, mais elles manifesteraient aux yeux du monde sa puissance créatrice et son génie. L’idôlatrie consisterait à ne plus considérer le robot qu’en lui-même, ignorant ou méprisant son génial inventeur (en l’envoyant balader par exemple quand celui-ci aurait la prétention inouïe de vouloir en communiquer le mode d’emploi…)

Deuxième image : si je contemple un coucher de soleil, je peux être en extase devant ce spectacle de la nature et rendre gloire à Dieu pour la merveille de la Création. Cela peut arriver, même à un protestant je crois ! Pourtant, j’ai beau être plongé dans ma louange à Dieu, je suis quand même en extase devant un phénomène naturel, devant une splendeur de la nature ! Ce n’est bien sûr pas de l’idôlatrie en soi, et cela n’enlève rien à Dieu si je sais Lui rendre grâce de ce phénomène dont il est Lui-même à l’origine et qui me parle de sa Beauté. L’idôlatrie consisterait à ne considérer le coucher de soleil qu’en lui-même, et à ne rendre gloire et honneur qu’à la Nature seule.

Dernière image : celle évoquée par le Pasteur Eric George, de l’homme suspendu dans le vide à la corniche et sauvé in extremis. En méditant cette image, il m’est venu à l’esprit le Magnificat de la Vierge Marie : « 
IL s'est penché sur son humble servante, dit-elle ; désormais tous les âges ME diront bienheureuse. » (Lc 1. 48) « Il s’est penché » : c’est Dieu qui se penche sur l’homme, qui le créé et qui le sauve ; c’est Dieu qui lui donne tout et c’est l’homme qui en retire tous les bénéfices (« Tous les âges ME diront bienheureuse » ; «Bienheureuse celle qui a cru » dira Elisabeth  – Lc 1. 45). Pour autant, ces bénéfices ne sont pas… retirés (au sens d’enlevés) à Dieu. Tout le chant du Magnificat est justement une louange à Dieu. Car l’homme sauvé et racheté (dont Marie fait partie en vertu de son Immaculée Conception – que nous honorerons demain dans la liturgie catholique), l’homme sauvé et racheté, disais-je, sait qu’il doit tout à son Dieu (cf. 1. Co. 4-7) et que sans lui, il ne peut rien faire (cf. Jn 15. 5) : c’est pourquoi il rend toute gloire à Dieu seul.

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30 novembre 2008 7 30 /11 /novembre /2008 18:00

Chers amis lecteurs,

 

Je souhaiterais approfondir ma réflexion sur le Purgatoire en l’élargissant aux questions de la réparation, du feu purificateur et de la Justice de Dieu.

 

Le Purgatoire, avons-nous dit, est le « lieu » dans lequel nous acquittons notre dette « jusqu’au dernier sou » avant d’aller au Ciel – pour reprendre l’image de Jésus dans le sermon sur la Montagne (cf. Mt 5. 25-26).

 

Quelle est donc cette « dette » que nous devons « payer » ? Que devons-nous « réparer » par nos œuvres de pénitence ici-bas, ou dans l’au-delà du Purgatoire ? Et pourquoi cette exigence de « réparation » ? Le Seigneur n’a-t-il donc pas acquitté pleinement sur la Croix la dette de notre péché (Cf. Col 2. 14)? Que peut-on ajouter à l’œuvre de Dieu ?

 

La dette que le Seigneur nous demande d’acquitter, dirais-je, n’est pas tant celle du péché – que le Seigneur a comblé en surabondance par son sacrifice d’amour sur la Croix –, que celle de « l’amour mutuel » (cf. Rm 13.8), la seule dette que St Paul nous demande d’avoir les uns pour les autres, et que la justice nous commande d’avoir envers ce Dieu qui nous a tant aimé, et dont l’Amour miséricordieux manifesté en Jésus-Christ appelle notre propre réponse d’amour...

 

La vie du Ciel n’est autre qu’une participation à la nature divine (cf. 2 P 1. 4) qui est substantiellement Amour (cf. 1 Jn 4. 8) ; une vie où l’Amour se donne intégralement, se reçoit totalement, et se livre pleinement en retour… sans la moindre ombre d’égoïsme ou de retour sur soi. Au Ciel, tout notre être sera entièrement donné à tous et à Dieu, et tout notre être recevra tout de tous et de Dieu. Nous vivrons dans une communion d’amour dont nous n’avons pas idée sur cette terre, avec une intensité à laquelle beaucoup ne seront sans doute pas suffisamment préparé ici-bas... Le Purgatoire achèvera donc en nous ce que nous aurons commencé sur cette terre : à savoir, transformer notre cœur pour devenir un peu plus à l’image et à la ressemblance de ce Dieu d’Amour qui nous a faits (cf. Gn 1. 26) et qui nous appelle à vivre en Lui.

 

Le seul obstacle au plein accomplissement de notre être dans l'Amour, c'est le péché. Tout péché volontaire a pour effet un rétrécissement de notre charité, de notre capacité à aimer ; un engourdissement de nos sens spirituels. Le Pardon obtenu, il conviendra de retrouver le goût de l'amour ; de nous réapprendre à entendre la Parole de Dieu résonner dans le fond de notre coeur ; de nous ré-habituer à sentir la bonne odeur du Christ (cf. 2 Co 2.15) et à voir le Seigneur dans nos frères et dans les évènements ; de nous appliquer à toucher le Coeur de Dieu par notre vie de foi (cf. Rm 1. 17). Tout cela implique une rééducation, un travail sur soi, qui n'est pas immédiatement impliqué dans le Pardon de Dieu, mais qui en découle directement. La grâce sacramentelle du Pardon est certes porteuse de guérison ; mais elle ouvre aussi la voie à une exigence qui peut paraître superfétatoire à première vue, mais qui, tout bien réfléchi, est une véritable libération pour l’homme : cette exigence, c’est celle de la réparation, de la satisfaction, qui participe de cette rééducation à la vie de foi, d'espérance et de charité.

 

Je voudrais citer ici un important – et long – passage du livre du Père Bernard Bro, dominicain, sur le Sacrement de la Réconciliation : "On demande des pécheurs".

 

« Il faut d’abord reconnaître honnêtement que, par le péché, un désordre a été commis et qu’il demeure. L’histoire humaine se construit dans la conscience des hommes, nos actes ne sombrent pas dans le néant. Cette Histoire est appelée à témoigner de la puissance de bonté de l’Esprit présent en chacun. Et tout péché, à son point précis dans la trame du temps, demeure à jamais comme un échec à l’Ordre, à la Bonté, à la Gloire de Dieu qui devrait se refléter dans la totalité de l’Histoire.

 

« Alors, pour éviter le désordre, on peut, comme le Grand Inquisiteur de Dostoïovsky, supprimer la liberté. Ou bien, au contraire, avec le Christ, renforcer la liberté : redonner à l’homme pouvoir de récupérer, de reprendre son passé, renforcer le pouvoir créateur de bonté dont il est capable.

 

« Il y a eu échec à l’amour, échec à Dieu. L’acte est indestructible, c’est vrai et à jamais : à tel moment, l’égoïsme, la lâcheté m’ont dominé. Mais mon histoire, elle, se poursuit. Ma liberté n’a pas dit son dernier mot, et par la grâce du Christ, justement celle de la confession, elle a encore les moyens de protester contre cet échec à l’Amour. J’ai ce pouvoir inouï de réintégrer mon histoire à celle de la Gloire de Dieu, en dépassant cet acte mauvais, en le jugeant selon la vérité et en l’inscrivant dans un avenir recréateur par des actes nouveaux, exprès, compensateurs du passé.

 

« Telle est la « satisfaction » : merveilleuse occasion offerte à la dignité de l’homme de reprendre son passé. Il y a un décalage entre moi et mon histoire, entre ma personne et mes actes. Mes actes m’engagent, certes, mais une fois accomplis, ils m’échappent, ils s’accumulent derrière moi, ils s’enchaînent dans ma mémoire et dans la mémoire de Dieu pour former mon histoire ; et pourtant, je peux sans cesse dépasser mon histoire, la juger, et en changer le sens total, la valeur, par de nouveaux actes.

 

« Le pécheur réconcilié à Dieu, dans sa personne, traîne pourtant dans son histoire un échec à Dieu, à l’amour. Il a manqué à un moment de son histoire à l’ordre de la bonté, de la création de vie qui devait se refléter dans toute l’histoire humaine, et alors, la charité retrouvée, l’amitié de Dieu nous presse de réparer ce manque.

 

« Il ne s’agit donc pas du tout d’une « taxe », d’un « tarif », mais sans doute de la plus belle victoire de la liberté : l’homme, restauré dans sa dignité, a assez de force, non seulement pour demander son pardon, comme la femme adultère ou Saint Pierre, mais, une fois pardonné, pour coopérer à la restauration de cette amitié.

 

« C’est dans l’amour que j’ai pour moi-même que Dieu m’appelle à intervenir, en me proposant de « réparer ». Il n’y a pas d’amitié sans partage, sans un échange (et donc une justice), et en sauvegardant cet échange et cette justice, je sauve l’amitié.

 

« Par le péché, j’ai porté atteinte à cet échange et, du même coup, je n’ai pas seulement atteint celui qui me faisait confiance dans ce partage en blessant son amitié, mais encore je suis allé contre l’ordre de la justice qui fondait mon amitié.

 

« C’est ici que se comprend toute la grandeur de la réparation : puisque je ne peux pas reconstruire ce que j’ai abîmé, je vais faire beaucoup plus, je vais offrir non pas ce que je ne peux plus « réparer », puisque c’est détruit, mais ma volonté, ma « bonne » volonté. Je rentre en grâce auprès de l’offensé en découvrant qu’il me propose de l’aimer à neuf. Alors, pour réparer, je viens me soumettre à ses conditions, en lui demandant de fixer lui-même ces conditions. Dans une délicatesse infinie, Dieu accepte de tenir compte de ma dignité, de ma liberté, de mon pouvoir recréateur de bonté.

 

« Quand un enfant a détruit quelque objet de valeur, il est bien incapable de le restituer. Deux solutions se présentent : son père pardonne, oublie, mais répare seul en acquérant un objet semblable ; ou bien il propose à son fils de coopérer, ne serait-ce que pour une part infime, à la reconstitution de l’objet détruit. Ainsi, c’est en ami réconcilié, c’est de l’intérieur même de l’amitié divine, en épousant ses lois secrètes, que le pécheur accomplit sa réparation, et non pas comme s’il fallait payer une amende, une taxe fixée de l’extérieur.

 

« Et finalement, le meilleur signe du pardon, ne serait-ce pas qu’il me rend heureux (d’être heureux) de réparer, non pas selon ma justice à moi, mais selon une confiance absolue en Celui « qui sait bien de quoi nous sommes faits » ?

 

« Si cette doctrine est vraie, poursuit le Père Bro, il est grave et coupable de la minimiser. En effet, cette doctrine de la réparation est tellement essentielle au christianisme que, sans elle, il ne serait plus rien, puisque notre salut, tout entier, est le fruit d’une réparation : celle du Christ (…).

 

« En nous invitant au partage de sa vie, et en vertu du même amour qui l’a fait monter sur la Croix, Dieu nous appelle (et ceci pour nous donner davantage) à participer à la réparation elle-même, en achevant dans notre corps que qui manque à la Passion de son Fils. On peut se sentir faible devant une telle perspective : c’est encore mal la comprendre. Il a voulu et veut encore « sauver les pécheurs par les pécheurs » de façon que les pécheurs participent à tous les privilèges de l’innocence, y compris celui-là. Cette doctrine de la réparation affirme donc que le sauvé n’est pas à part du sauveur, mais qu’il est sauvé au point d’être invité à devenir sauveur.

 

« Dans le christianisme, il sauve en participant à la Rédemption elle-même qui est la réparation d’un amour brisé. Quoiqu’on en dise, il y a une dette à payer, mais loin d’être contre l’amour, cette exigence provient de l’amour même. Ce qui répare un amour et réconcilie ceux qui on rompu, c’est de pleurer ensemble sur le mal qui a été fait, ce sont les larmes versées sur cette rupture. »

 

 

En méditant sur cette question de la réparation et sur ce très beau texte du Père Bernard Bro, quelques images me sont venues à l’esprit. Je vous les livre telles qu’elles, en étant bien conscient de leurs limites. Elles peuvent nous aider, je pense, à mieux comprendre en quoi consiste la réparation selon l'Evangile.

 

La première image qui m’est venue est celle de la page blanche. Le Pardon de Dieu, on le sait, efface nos fautes. Nous voilà donc redevenus blancs comme neige (cf. Is 1. 18), tels que nous étions le jour de notre baptême. Mais voilà : Dieu ne nous pardonne pas pour faire de nos vies une page blanche. Il attend de nous que nous réécrivions avec Lui un nouveau chapitre de notre histoire, une nouvelle page d’Amour. Comme disait Bossuet (c’est une citation reprise par le Père Bro dans son livre) : « Quand Dieu efface, c’est qu’il va écrire quelque chose »

 

Deuxième image : le Pardon de Dieu nous sauve de l’égarement du péché, et nous remet sur la bonne route, dans la bonne direction. Mais maintenant, il faut marcher… C’est la marche, pourrait-on dire, qui parachève l’œuvre du Pardon de Dieu. Sans cette marche, le Pardon ne peut déployer tous ses effets ; il manque encore quelque chose. Certes, le Pardon nous a sauvé et restauré dans la grâce de Dieu. Et cela nous suffit sans doute… Mais pas pour Dieu ! Si le Pardon nous est donné, ce n’est pas seulement pour notre satisfaction personnelle ; c’est pour que nous marchions sur la route de l’Amour et que nous illuminions la vie de nos frères (cf. Mt 5. 14.16). La grâce du Salut n’est jamais donnée pour soi-même seulement. Elle est aussi donnée pour les autres et le bonheur de tous. Voilà pourquoi la réparation est si essentielle : elle nous remet en marche avec Dieu sur la route de l’Evangile qui nous conduit tout droit à nos frères. C'est par nous que Dieu veut répandre sa Paix dans le monde entier. C'est par nous et à travers nous qu'il veut se rendre présent aux hommes de ce monde. Alors il faut se mettre en marche. C'est ainsi d'ailleurs qu'André Chouraki traduisait l'expression "Heureux" dans les Béatitudes : "En marche"! Yalla!

 

La troisième image qui m’est venue à l’esprit en réfléchissant sur ce sujet de la réparation, est celle de l’homme qui coule à pic dans l'océan. Le péché, pourrait-on dire, nous enfonce toujours un peu plus, il nous fait couler, couler, couler, toujours plus profondément… Le Pardon de Dieu stoppe cette chute, et nous redonne le dynamisme de vie pour remonter vers la surface. Nous pouvons ainsi prendre appui sur la terre ferme et nous propulser de nouveau vers le haut. Mais le Royaume de l’Amour se trouve à la surface de l’eau. La réparation correspond précisément à cette remontée vers la surface où se trouve la plénitude de l’air, et où je pourrai respirer de nouveau à pleins poumons l’oxygène de l’Amour de Dieu ; sortir des ténèbres des fonds marins pour retrouver la chaleur du Soleil de Justice. La réparation me fait re-parcourir en sens inverse le chemin du péché qui m’a fait descendre jusqu’au fond. Cette remontée peut être longue et pénible, le péché m’ayant peut-être fait descendre très bas, mais la main de Dieu peut intervenir spécialement pour hâter ma remontée : c’est ce qui se passe lorsque nous recevons du Seigneur le don de l’Indulgence.

 

Autre image : celle de l’escalier et de l’ascenseur. Le Seigneur Jésus est la Porte qui nous mène au Ciel. Tous ceux qui franchissent cette Porte sont sauvés (cf. Jn 10. 9). Mais derrière la porte, il y a une ascension à vivre, une montée vers le Ciel de Dieu (qui est élevé, très élevé pour les petites créatures que nous sommes, puisque c’est le lieu de l’Amour absolu). Pour monter, il y a deux moyens : l’escalier ou l’ascenseur. L’escalier est long et pénible à franchir ; il figure la pénibilité des actes de pénitences ici-bas et des souffrances du Purgatoire. L’ascenseur nous fait parvenir au Ciel sans effort. Or, Petite Thérèse nous dit que l’ascenseur, ce sont les bras de Jésus. Eh bien voilà ce qui se produit quand l’âme bien disposée – ou l’âme défunte à qui l’on fait ici-bas ce cadeau – reçoit l’indulgence : elle prend l’ascenseur des bras de Jésus, et monte directement au Ciel en s’épargnant la peine de la rude montée par l’escalier…

 

Dernière image, que m’a suggéré le texte du Père Bernard Bro : celle de la consolation. Le Pardon sèche les larmes de pénitence de l’offenseur ; la réparation rend le sourire à l’offensé.

 

Bien entendu, ce n’est pas la souffrance de l’âme dans le feu du Purgatoire qui apaise l’offensé ! Comme si Dieu prenait plaisir à faire passer sa créature par le creuset de la souffrance pour lui faire « payer » son droit d’entrée dans le Paradis. Non, notre Dieu n’est pas sadique, et ce n’est pas ainsi qu’il faut comprendre le Purgatoire où la réparation opère différemment qu’ici-bas. La réparation dans le Purgatoire n’a pas pour finalité de faire produire à l’âme des actes de charités qu’elle n’a pas pu ou pas voulu réaliser sur la terre. L’âme souffrante au Purgatoire ne peut plus engranger de mérites, ni faire le bien. Sa souffrance est purement passive. Mais le feu du Purgatoire accomplit à la perfection et définitivement ce que les œuvres de réparation sur cette terre contribuent à réaliser dans le cœur de l’homme pécheur (et qui demeure tel dans la condition humaine d’ici-bas) : à savoir, la dilatation de son cœur et de sa capacité à recevoir tout l’amour du Ciel pour vivre éternellement de cet amour sans le moindre retour sur soi.

 

Mais pourquoi alors le tourment du feu ? Pourquoi ce supplice horrible qui est, aux dires de St Augustin, « plus terrible que toutes les souffrances qu'un homme puisse endurer en cette vie. » Le Pape Benoît XVI, dans sa dernière encyclique « Spe Salvi » nous aide à mieux comprendre ce mystère.

 

« Certains théologiens récents, écrit le Saint Père, sont de l'avis que le feu qui brûle et en même temps sauve est le Christ lui-même, le Juge et Sauveur. La rencontre avec Lui est l'acte décisif du Jugement. Devant son regard s'évanouit toute fausseté. C'est la rencontre avec Lui qui, en nous brûlant, nous transforme et nous libère pour nous faire devenir vraiment nous-mêmes. Les choses édifiées durant la vie peuvent alors se révéler paille sèche, vantardise vide et s'écrouler. Mais dans la souffrance de cette rencontre, où l'impur et le malsain de notre être nous apparaissent évidents, se trouve le salut. Le regard du Christ, le battement de son cœur nous guérissent grâce à une transformation assurément douloureuse, comme « par le feu ». Cependant, c'est une heureuse souffrance, dans laquelle le saint pouvoir de son amour nous pénètre comme une flamme, nous permettant à la fin d'être totalement nous-mêmes et par là totalement de Dieu (…). Au moment du Jugement, nous expérimentons et nous accueillons cette domination de son amour sur tout le mal dans le monde et en nous. La souffrance de l'amour devient notre salut et notre joie. Il est clair que la « durée » de cette brûlure qui transforme, nous ne pouvons la calculer avec les mesures chronométriques de ce monde. Le « moment » transformant de cette rencontre échappe au chronométrage terrestre – c'est le temps du cœur, le temps du « passage » à la communion avec Dieu dans le Corps du Christ. »

 

Voilà qui nous éclaire sur le feu du Purgatoire ! Ce feu, nous dit Benoît XVI, n’est autre que Dieu lui-même, dont l’Ecriture nous révèle qu’il est un « feu dévorant » (He 12. 29). Dès lors, on peut imaginer que les âmes des défunts sont toutes dans le feu de l’Amour de Dieu, mais que ce feu agit différemment sur elles selon leur état spirituel. Les âmes des damnées brûlent de douleur dans ce feu de l’Amour de Dieu qui leur est insupportable ! Les âmes du Purgatoire souffrent à mesure que se consument en elles les imperfections et autres saletés. Les âmes du Paradis brûlent d’amour dans ce feu (à l’instar d’Ananias, Azarias et Misaël dans l’Ecriture – cf. Daniel 3), et chantent les louanges de Dieu dans une exultation perpétuelle.

 

Bien sûr, ce ne sont là que quelques images, qui ne rendent pas compte de la réalité qui nous attend au Ciel et qui est bien au-delà de ce que nous pouvons imaginer ici-bas. Mais elles nous aident à comprendre que si le feu du Purgatoire est le Cœur de Jésus lui-même, la sortie du Purgatoire ne peut pas être la sortie du Cœur de Jésus, mais un changement d’état dans ce Cœur de l’Amour éternel. Quand on devient soi-même une flamme d’amour, on ne souffre plus dans le feu de l’Amour divin.

 

Reste la question de la Justice. Dans son petit Journal, Sainte Faustine, après avoir « visité » le Purgatoire et avoir été témoin, dans une vision surnaturelle, de ses terribles supplices, reçu cette parole de Jésus : « Ma miséricorde ne veut pas cela, mais la justice l'exige. » (cf. Petit Journal, § 20).

 

Cette parole m’a beaucoup fait réfléchir. Quelle est donc cette Justice qui semble s’opposer à la Miséricorde divine au point de triompher d’elle, au moins temporairement dans le Purgatoire ?

 

C’est le Cardinal Lustiger qui m’a instruit sur cette question là, dans son très beau livre sur le bonheur, et sa méditation de la 4e béatitude : « Heureux ceux qui ont faim et soif de la Justice, ils seront rassasiés ».

 

« Il ne s’agit pas ici d’avoir et de faire la justice dont on peut rêver, mais d’être juste. La justice dont parle Jésus caractérise celui ou celle qui est juste devant Dieu (…). Cette justice, qui est donc le fait d’être juste, ne repose pas seulement – ni d’abord – sur l’idéal humain d’équité, mais correspond à une conformation de l’homme à Dieu Lui-même. Cette « Justice de Dieu » prend les figures de la perfection et de la sainteté, et ce sont précisément là les « qualités » que l’homme est invité à revêtir (…). Lorsque l’homme est « justifié » ou « sanctifié », lorsqu’il devient parfait aux yeux de Dieu, il est rendu semblable au Fils de Dieu Lui-même. »

 

Si l’on remplace le mot « Justice », dans la parole de Jésus adressée à Sainte Faustine, par le mot « Sainteté », nous commençons à mieux comprendre ce qui se joue dans le Purgatoire – la « conformation de l’homme à Dieu Lui-même » : « Ma miséricorde ne veut pas cela, mais ma Sainteté l’exige ». Dieu a beau aimer, il ne peut pas se « renier » lui-même, et faire qu’il soit autre que ce qu’il est : un feu dévorant, le Trois fois Saint. Cela dit, sa Miséricorde peut apaiser voire mettre un terme aux souffrances causées par ce feu en hâtant la transformation de l’âme en flamme d’amour : telle est la grâce qui nous est faite par le don de l’Indulgence ; grâce que nous pouvons nous appliquer à nous-même ou offrir à nos défunts, spécialement en cette Année Saint Paul.

 

Ne négligeons donc pas ces moyens que le Seigneur nous accorde pour grandir en sainteté : cette grâce qui nous est faite ici-bas d’obtenir Miséricorde et Pardon dans le Sacrement de la Réconciliation (la Confession) – en particulier à l’approche de Noël ; et mettons notre joie dans les œuvres de réparation et de pénitence que nous pourrons réaliser en ce temps de l’Avent pour préparer notre Cœur à recevoir le Seigneur ; redécouvrons en particulier ce trésor des Indulgences qui est grand ouvert en cette année Saint Paul ; apprenons à les recevoir régulièrement pour nous-même et à en offrir pour nos chers défunts. Nous pourrons alors entrer dans la joie de notre Maître, lorsque celui-ci viendra.

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9 novembre 2008 7 09 /11 /novembre /2008 00:00

Le présent article est la suite de "Tout ce que je sais est que je dois bientôt mourir..."


A Medjugorje, les voyants parlent beaucoup du ciel. Il faut dire qu’ils
voient
le ciel en la personne de la Vierge Marie. Dès lors, il ne faut pas s’étonner qu’ils soient habités par le ciel. Certaines de leur réflexion (dont les suivantes, glanées sur le site Chère Gospa  – merci RV !) nous donnent vraiment à réfléchir tant elles sont justes - et pourtant si éloignées de nos pensées premières et habituelles. Voici par exemple ce qu'a dit le voyant Ivan à un journaliste qui l’interviewait :

Le Journaliste : « Que dirais-tu si la Gospa [la Vierge Marie] te proposait de t'emmener avec elle après l'apparition ? »

Ivan (sans hésiter) : « Je la suivrais tout de suite ! »

Le Journaliste : « Mais tu as une épouse et une petite fille ! »

Ivan : « Au Ciel, je pourrai faire beaucoup plus pour elles que je le peux sur terre ! »

La réponse est pour le moins surprenante! et nous donne à réfléchir… Elle nous dit quelque chose de la puissance d’intercession de nos frères et sœurs les Saints – dont le secours peut être plus efficace que celui d’un frère ou une sœur vivant sur cette terre –, et du lien (plus que du « contact »…) pouvant s’établir entre eux et nous par delà la frontière de la mort (qui n’est pas sans me rappeler cette parole de Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus : « Je passerai mon ciel à faire du bien sur la terre »…). Le caractère déconcertant de la réponse d'Yvan, et le fait qu'elle ne soit pas spontanément la nôtre, nous en dit long également sur notre manque de foi en Dieu et en la communion des Saints, et sur notre attachement peut-être excessif aux réalités de cette terre (nous entendions Jésus nous redire encore cette semaine : "Si quelqu'un vient à moi sans me préférer à son père, sa mère, sa femme, ses enfants, ses frères et soeurs, et même à sa propre vie, il ne peut pas être mon disciple"... cf. l'Evangile de mercredi dernier 5 novembre, Lc 14. 26.) Combien d'entre-nous considèrerait ainsi la mort comme un "avantage" ? (cf. Phi 1. 21).

Voici maintenant une petite histoire parue dans le Bulletin de Liaison des Enfants de Medjugorje n° 85 (automne 2008) mettant en scène une autre voyante de Medjugorje, Vicka. Un homme âgé, qu'elle connaissait bien, venait de perdre son épouse après 52 ans de mariage. L'homme était rempli d'amertume et de rage contre Dieu, l'accusant d'avoir "pris" son épouse. Il jurait tant qu'il pouvait et blasphémait contre Dieu. L'entendant parler ainsi, Vicka bondit et, se plaçant bien en face de lui, lui dit avec fermeté : « Cesse de blasphémer ! Au contraire, mets-toi à genoux et rends grâce à Dieu pour ces 52 ans où vous avez pu rester ensemble ! Car cela est un grand don ! » Elle fit mettre l'homme à genoux et continua : « Qu'est-ce que tu crois ? Que vous deviez rester sur terre pour toujours ? » L'homme se calma et rendit grâce à Dieu avec Vicka. Puis il se mit à considérer les choses sous un autre angle.

« Chers enfants,
nous dit la Sainte Vierge à Medjugorje, n'oubliez pas que le but de votre vie, c'est le ciel ! N'oubliez pas que votre demeure, c'est le ciel ! »

Il y a des révoltes devant la souffrance et la mort qui me laissent songeur. Nous savons tous que nous pouvons souffrir beaucoup et que nous allons mourir un jour. Nous le savons, parce que telle est la condition humaine, et qu’il suffit d’ouvrir sa télévision pour voir le triste spectacle de gens souffrir et mourir partout sur la terre. Pourtant, certains se révoltent contre Dieu le jour où la souffrance ou la mort vient les frapper personnellement, eux-mêmes ou quelqu’un qui leur est cher. Cette révolte à retardement me paraît révélateur de cette propension évoquée dans mon précédent article à vivre dans l’ignorance du réel, comme si nous étions inaccessibles à la souffrance et à la mort ; comme si nous n’étions pas concernés par la souffrance et la mort de tant d’hommes et de femmes sur la terre. Et c’est lorsque notre petit monde à nous s’effondre que nous nous révoltons contre Dieu… Nous oublions cette vérité première que Vicka nous rappelle à travers cette anecdote, à savoir que « nous sommes poussières, et que nous retournerons à la poussière » ; que notre patrie définitive n'est pas sur cette terre, mais au ciel. Et qu’il est inéluctable que chacun de nous prenne un jour son grabat, et y marche…

Sur l’enfer, Vicka nous rappelle des vérités essentielles :
« Je voudrais dire ceci : l'Eglise ne peut pas dire ce que les gens veulent entendre, les gens disent qu'ils ne sont pas d'accord avec l'Eglise, mais je peux vous dire cette vérité parce que je l'ai vu de moi-même, c'est que l'enfer n'est pas vide, en enfer il y a beaucoup de gens. La Vierge m'a emmenée là-bas avec mon corps et en me prenant par la main, et j'ai vu qu'il y avait beaucoup de gens en enfer. » (Radio Maria Italia le 2 janvier 2008, traduit par notre ami RV).

Cette parole n’est pas sans rappeler celle que la Vierge Marie avait adressée aux petits voyants de Fatima, le 19 août 1917 : « Priez, priez beaucoup et faites des sacrifices pour les pécheurs, car beaucoup d’âmes vont en enfer, parce qu'il n'y a personne qui se sacrifie ni prie pour elles ».

Nous devons prendre ces avertissements au sérieux. Car contrairement à ce que pense la frange fondamentaliste des protestants évangéliques, il n’existe aucune assurance du Salut éternel pour aucun d’entre nous ! Le Seigneur Jésus, sur la Croix, nous a tout donné, il est vrai ; il nous a ouvert toutes grandes les portes du ciel, et par son sacrifice rédempteur, nous a mérité le ciel. « Tout est accompli » par conséquent… du côté de Dieu! Mais l’Alliance nouvelle scellée dans le sang de Jésus-Christ reste… une Alliance, c’est-à-dire une union de deux volontés libres et consentantes. Nous avons nous aussi maintenant notre part à accomplir, notre OUI à donner ; et la grâce salvifique communiquée par les sacrements - dont la source est le Coeur ouvert de Jésus sur la Croix - nous aidera progressivement à entrer dans ce OUI du Christ qui est le OUI de l'humanité à Dieu (cf. 2 Co 1. 19-21). Mais sans ce OUI de notre part, ce OUI fidèle et quotidien qui nous engage personnellement et jusqu'à notre dernier jour dans la vie du Christ avec le Christ, nous ne pourrons pas être sauvés. « Dieu qui nous a créé sans nous, ne nous sauvera pas sans nous » disait Saint Augustin.

Iront donc en enfer ceux qu’ils l’auront eux-mêmes voulu. Ce n’est pas Dieu qui nous « punit » en nous « condamnant » à l’enfer ; c’est nous qui refusons le Salut de Dieu irrévocablement offert à toute l’humanité par Jésus-Christ sur la Croix. C’est ce que disait Vicka au sujet des damnés dans son interview sur Radio Maria : « Ils y sont allés de leur propre volonté. Dieu n'envoie personne en enfer contre sa volonté. Il nous donne la liberté de choisir et ils ont donc choisi cela et y sont allés. (…) La Vierge nous a dit que ces gens étaient allés là-bas [en enfer] de leur propre volonté. Dieu ne les a pas envoyés là-bas, la Vierge ne les a pas envoyés là-bas. Ils ont voulu aller là-bas, et c'est là-bas qu'ils sont allés. »

Bien sûr, il faut bien comprendre ce que Vicka veut nous dire. Elle ne dit pas que les damnés ont voulu consciemment aller en enfer (même le plus méchant de tous les êtres ne voudrait pas souffrir le supplice des flammes éternelles pour l’éternité – personne ne veut souffrir) ; je crois qu’elle veut nous dire simplement que les damnés ont par les actes de leur vie manifesté qu’ils ne voulaient pas vivre selon Dieu. Et par suite, ils ont obtenu en quelque sorte ce qu’ils voulaient : une vie sans Dieu, une vie loin de Dieu, une vie contre Dieu.

Alors certes, il est permis d'espérer pour tous. L'Eglise, qui canonise certaines personnes et qui affirme infailliblement qu'elles sont au Paradis, ne nous dit rien (mais alors rien du tout) sur les damnés : ni sur leur identité, ni sur leur nombre. Pourtant, l'histoire des hommes fournit nombre d'exemples de personnalités qu'elle aurait pu déclarer comme tel ; de personnes dont on pourrait raisonnablement penser qu'elles sont en enfer (que l'on songe par exemple à Judas ou Hitler). L'Eglise pourtant ne nous dit rien sur les damnés, tout simplement parce qu'elle n'a rien à nous en dire : rien ne lui a été révélé par Dieu à ce sujet. Et si la damnation des hommes ne fait pas l'objet d'une révélation spéciale de la part du Seigneur, ce n'est sans doute pas par hasard ; ce n'est sûrement pas un "oubli" de la part de Dieu! Ce silence de la Révélation divine sur l'identité et le nombre des hommes damnés me paraît une divine invitation à l'espérance dans le Salut de tous ; non pas l'optimisme béât du paresseux spirituel qui attend tout de Dieu en croyant n'avoir pas sa part de souffrance à prendre pour la cause de l'Evangile (cf. 1 Tm 1.8) ; mais la confiance du croyant qui sait que ses prières d'intercession seront entendues, et que ses sacrifices offerts dans la communion des saints ne seront pas vains.

Nous devons donc affirmer avec toute l'Eglise la réelle possibilité de l'enfer pour chacun de nous, ainsi que le devoir de prier et d'espérer pour le salut de tous
(notons bien au passage que le reproche adressé par Marie à Fatima n'est pas dirigé contre les pécheurs inconvertis, mais contre tous ceux  qui ne se sacrifient ni ne prient pour eux...). Mobilisons-nous donc pour le salut des pauvres pécheurs (dont nous sommes) ; offrons nos prières et nos sacrifices au Seigneur qui fait dépendre son action salvatrice de notre propre intercession ; demandons pour chacun de nous (et les uns pour les autres) la grâce d'une "bonne mort" et de la persévérance finale ; et jetons-nous d'autant plus généreusement dans le combat pour le Salut des âmes que la Sainte Vierge a levé à Fatima un coin du voile sur la possibilité de l'enfer, avec cette parole terrible qui devrait nous réveiller et nous faire sortir de notre torpeur : à savoir que "beaucoup d'âmes vont en enfer"... (parole confirmée par Vicka à Medjugorje).

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3 novembre 2008 1 03 /11 /novembre /2008 14:30

Chers amis lecteurs,

En ce début du mois de novembre, l’Eglise nous invite à tourner notre regard vers le ciel. La Toussaint est ainsi l’occasion de nous rappeler notre vocation à la sainteté et au Salut éternel auprès de Dieu, avec toute notre famille du ciel déjà parvenue dans la gloire. La fête du lendemain, 2 novembre, célèbre la mémoire de tous les défunts qui ne sont pas encore dans la pleine lumière et qui vivent un temps de purification : c’est un jour de recueillement, de prière et de pieuse visite au cimetière. Le mois de novembre tout entier est traditionnellement mois de prière pour les âmes du Purgatoire. C’est aussi une période de l’année où la liturgie nous donne à méditer les passages évangéliques sur la fin du monde et le retour en gloire du Christ ; un temps où nous sommes particulièrement invités par le Seigneur à la veille du cœur et à l’attente vigilante du Bien-aimé, dont la venue est aussi sûre que l’aurore (cf. Os. 6. 3)...

« Tu es poussière et tu retourneras à la poussière »
nous dit l’Ecriture (Gn 3.19). Voilà bien une parole que nous devrions nous redire chaque matin. Car reconnaissons-le : nous ne vivons pas, en général, avec la pensée omniprésente de notre mort. Tant mieux, diraient certains ! Oui, peut-être… sauf que nous nous comportons du coup comme des êtres immortels, tout à fait insouciants de leur fin dernière... Nous oublions que tout, pour chacun de nous, peut s’arrêter brutalement, dès aujourd’hui ; que la frontière qui nous sépare de l’autre rive est ténue – et il faut malheureusement parfois un accident grave et imprévu pour être rappelé à cette cruelle réalité…

Je ne sais pas grand-chose du monde qui m’entoure, disait Pascal, de ce que sont les immensités cosmiques qui m’environnent et dans lesquelles je suis comme perdu au milieu de nulle part... Je ne sais pas pourquoi je suis ici plutôt que là, ni pourquoi je vis en ce temps là plutôt qu’à un autre. Tout ce que je sais est que je dois bientôt mourir et tomber pour jamais, ou dans le néant, ou dans les mains de Dieu.

Dieu ou le néant ? Qu’on le veuille ou non, c’est en considération de ces deux possibilités que chacun va - consciemment ou non - orienter sa vie. La question de la mort est une question existentielle que nul ne peut esquiver (nous sommes tous « embarqués » disait Pascal). On peut vouloir fuir cette question (dans le divertissement par exemple) et refuser de la voir en face : mais en réalité, fuir, c’est déjà prendre position : c’est choisir le néant contre Dieu.

Si nous sommes incroyants, nous allons vouloir vivre « à fond » les différents plaisirs que la vie nous offre, sans trop nous soucier des conséquences :
« Mangeons et buvons, car demain nous mourrons »
(1 Co 15. 32). Puisque la vie doit un jour finir, eh bien, autant en « profiter » tant qu’elle est là ; après, il sera trop tard... Dans cette perspective, la vie est considérée comme un fruit à cueillir et à déguster pour soi. D’où cette propension, chez ceux qui n’ont pas d’espérance, à « mordre la vie à pleines dents »… jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien.

Les croyants vont quant-à-eux régler leur vie en considération du Jugement de Dieu. Ils savent que les actes qu’ils posent ne sont pas anodins, qu’ils ont des conséquences ; qu’ils sont ou bien « bons », ou bien « mauvais ». Ils ont lu dans leurs Saintes Ecritures qu’ils auront un jour des comptes à rendre pour la vie qu’ils auront choisi de mener. Pour eux, la vie est un don reçu de Dieu ; ils ne s’en considèrent pas comme les propriétaires, mais bien plutôt comme les gérants, les intendants. Dans cette optique, il ne leur est pas possible de faire n’importe quoi ; il leur importe de rechercher la voie juste et bonne qui conduit à la vie, la vraie vie, celle qui porte de bons fruits pour Dieu et pour les autres (car il est un chemin, nous dit la Bible, qui conduit à la vie, et un autre qui conduit à la mort :
« Si tu veux entrer dans la vie
, dit Jésus, observe les commandements » - Mt 19. 17).

J’ai toujours fait partie personnellement de cette seconde catégorie de personnes. Cela ne vous étonnera guère. Pourtant, je n’ai pas toujours été croyant. Mais voilà : j’ai toujours eu l'intime conviction que le bien et le mal ne pouvaient avoir le même poids, la même valeur, ni les mêmes conséquences sur notre destinée ultime. Ma raison se révoltait à l’idée que Hitler et Mère Térésa, par exemple, puissent connaître tous deux la même chute dans l'abîme du néant, sans que leurs actes aient la moindre influence, positive ou négative, sur leur sort éternel. Cette égalité dans la mort me semblait une prime insupportable à l'injustice et au mal.

Je n’ai jamais compris en tous les cas l’attitude de ceux qui vivent leur vie sans réaliser que peut-être un jour, ils auront à rendre des comptes ; qui prennent le mal pour un bien et le bien pour un mal, sans songer un seul instant que cette confusion perverse puisse être sans conséquence pour leur âme ; qui ignorent totalement pour eux-mêmes la possibilité de l’enfer. Mais c’est faire ici le pari de Pascal à l’envers ! je mise tout sur une vie sans Dieu, dans l’espoir de gagner le plaisir immédiat que la vie peut m’offrir, mais avec la perspective – terrible ! – de l'anéantissement final, et le risque – plus effroyable encore ! – de découvrir un jour que je me suis mépris, et que l'enfer existe...

Je comprends que l’on ait des doutes sur l’existence de Dieu, et même que l’on choisisse de ne pas y croire, mais de là à écarter
absolument
le risque de se tromper… « Je crois pas en Dieu, disait le chanteur Renaud, mais j’fais gaffe quand même »… Combien parmi nos contemporains « font gaffe quand même », des fois que… ? « Si les hommes savaient ce qu’est l’éternité, ils feraient l’impossible pour se convertir » disait Hyacinthe, la petite voyante de Fatima.

Le Seigneur m’a fait la grâce, avant ma conversion, en 1997, de faire l’expérience « métaphysique » de la mort et de l’enfer. Ce n’était pas une « vision » (au sens où l’on voit quelque chose avec ses yeux de chair), ni un « songe » (puisque j’était dans un état intermédiaire entre le sommeil et le réveil) ; c’était quelque chose d’indéfinissable, et cependant de beaucoup plus réaliste et effrayant que la réalité elle-même... Je ne savais trop comment définir cela jusqu’au jour où, 10 ans après, je lus ce passage sous la plume d’un philosophe existentialiste allemand :
« Beaucoup de gens bien portants ont fait (…) l’expérience suivante : ils s’éveillent avec le sentiment d’avoir aperçu dans leur sommeil le sens de choses étrangement profondes, et celles-ci se dérobent au moment où ils sont parfaitement éveillés, laissant seulement derrière elles le sentiment de l’impénétrable »
(Karls Jaspers, « Introduction à la Philosophie », Plon, 10/18, 1991, pages 9 et 10).

Dans cette « expérience » de la mort, vécue dans un état de semi-sommeil, mon âme se détachait de mon corps et s’élevait vers le ciel. Je n’étais pas – je le répète – croyant à l’époque, mais mon âme, en montant au ciel, avait une intelligence lucide et instantanée de tout ce qui se passait. Je me souviens que, prenant soudainement conscience de la situation, mon premier réflexe fut de tenter de redescendre sur la terre ; mais ne le pouvant pas, et tandis je continuais à m'élever vers le ciel, je fus pris d’un grand effroi et m'écriai en moi-même : « Qu’ai-je donc fait de ma vie ?! »

Et puis il y eut cette autre expérience, de l’enfer cette fois… Ce sentiment atroce du moment précis où je devrai aller en enfer. Je me vois faire face aux flammes, elles sont là, devant moi ; je ne peux plus reculer, je ne peux plus rien changer, je suis face à ces flammes et c’est MAINTENANT que je dois y aller. Certaines échéances sont tellement lointaines qu’elles en paraissent parfois irréelles. Je me souviens par exemple dans ma jeunesse du baccalauréat ou du service militaire. Ce sont des choses dont on avait beaucoup parlé, mais qui nous semblaient loin, très loin… On y pensait donc, sans y penser... Et puis un beau matin, il a bien fallu que je me lève pour passer mon examen du baccalauréat ; et puis un beau jour, il a bien fallu que j’enfile un treillis militaire pour vivre mon premier parcours du combattant. Aujourd’hui, ces mêmes échéances me paraissent lointaines, oui… mais dans l’autre sens ! Ce que je retiens de tout cela est que tout finit toujours par arriver. Un jour viendra où nous serons face à notre destinée éternelle, sans que nous ne puissions plus rien y changer. AUJOURD’HUI, tout reste possible. Mais demain, il sera trop tard. Et un jour viendra où demain sera notre AUJOURD’HUI.

(à suivre...)

Prochain article : La possibilité de l'enfer

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