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16 juin 2011 4 16 /06 /juin /2011 18:12

LogoVOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE BENOIT XVI A CHYPRE – Discours du Saint Père aux autorités civiles et au Corps diplomatique à Nicosie (Chypre), le 5 juin 2010.

 

Monsieur le Président,

Excellences,
Mesdames et Messieurs,

 

Je suis heureux, dans le cadre de mon voyage apostolique à Chypre, d’avoir l’opportunité de rencontrer les autorités politiques et civiles de la République, ainsi que les membres du Corps diplomatique (…). Chacun de vous s’est engagé (…), dans sa vie publique, à servir le bien d’autrui dans la société, que ce soit sur le plan local, national ou international. C’est une noble vocation que l’Église apprécie. Lorsqu’il est accompli fidèlement, le service public nous permet d’accroître notre sagesse, notre intégrité et notre épanouissement personnel. Platon, Aristote et les stoïciens accordaient une grande importance à un tel épanouissement l’eudemonia – comme un but pour tout être humain. Ils voyaient dans l’aspect moral le moyen d’atteindre ce but. Selon eux, et selon les grands philosophes musulmans et chrétiens qui les ont suivis, la pratique de la vertu consistait à agir conformément à la juste raison, dans la recherche de tout ce qui est vrai, bon et beau.

 

Dans une perspective religieuse, nous sommes membres d’une unique famille humaine, créée par Dieu, et nous sommes appelés à promouvoir l’unité et à construire un monde plus juste et plus fraternel fondé sur des valeurs durables. Dans la mesure où nous accomplissons notre tâche, où nous servons les autres et adhérons à ce qui est juste, nos esprits s’ouvrent à de plus profondes vérités et notre liberté grandit dans son allégeance à ce qui est bon. Mon prédécesseur le Pape Jean-Paul II a écrit, une fois, que l’obligation morale ne devrait pas être vue comme une loi s’imposant elle-même de l’extérieur et requérant l’obéissance, mais plutôt comme une expression de la sagesse de Dieu à laquelle la liberté humaine se soumet volontiers (cf. Veritatis Splendor, n. 41). En tant qu’êtres humains, nous trouvons notre accomplissement ultime en référence à cette Réalité Absolue dont nous rencontrons si souvent le reflet dans notre conscience comme une invitation pressante à servir la vérité, la justice et l’amour.

 

Sur le plan personnel, en tant que fonctionnaires, vous savez l’importance de la vérité, de l’intégrité et du respect dans vos relations avec les autres. Les relations personnelles constituent souvent les premiers pas vers la construction de la confiance et – le temps venu – de solides liens d’amitié entre les personnes, entre les peuples et entre les nations. C’est là une part essentielle de votre rôle, d’hommes politiques comme de diplomates. Dans les pays qui connaissent des situations politiques délicates, de telles relations personnelles, honnêtes et ouvertes, peuvent être le prélude d’un plus grand bien pour des sociétés et des peuples entiers. Laissez-moi vous encourager, vous tous qui êtes présents aujourd’hui, à saisir les opportunités qui s’offrent à vous, à titre personnel et institutionnel, pour construire ce type de relations et, ce faisant, à favoriser le bien plus grand du concert des nations et le bien véritable de ceux que vous représentez.

 

Les anciens philosophes grecs nous enseignent aussi que le bien commun est précisément servi par l’influence de personnes dotées d’une profonde perspicacité morale et de courage. C’est ainsi que les politiques sont purifiées des intérêts égoïstes et des pressions partisanes et qu’elles reposent sur des bases plus solides. Plus encore, les aspirations légitimes de ceux que nous représentons se trouvent protégées et favorisées. La rectitude morale et le respect impartial des autres et de leur bien-être sont indispensables au bien de toute société tandis qu’ils établissent un climat de confiance dans lequel les échanges humains, qu’ils soient religieux, économiques, sociaux et culturels, civils et politiques, acquièrent de la vigueur et de la richesse.

 

Corps diplomatique

 

Mais que signifie en termes concrets respecter et promouvoir la vérité morale dans le monde de la politique et de la diplomatie aux plans national et international? Comment la recherche de la vérité peut-elle apporter une plus grande harmonie dans les régions du globe qui connaissent des troubles? Je voudrais suggérer que cela peut être atteint de trois façons.

 

Premièrement, promouvoir la vérité morale signifie agir de façon responsable sur la base de connaissances factuelles. En tant que diplomates, vous savez d’expérience que ces connaissances vous aident à identifier les injustices et les griefs, de manière à considérer de façon dépassionnée les intérêts de tous ceux qui sont impliqués dans un conflit donné. Quand les parties s’élèvent au-dessus de leur regard particulier sur les événements, elles acquièrent une vision objective et globale. Ceux qui sont appelés à résoudre de tels conflits sont capables de prendre de justes décisions et de promouvoir une réconciliation authentique lorsqu’ils saisissent et reconnaissent l’ensemble de la vérité sur une question spécifique.

 

Une deuxième voie pour promouvoir la vérité morale consiste à déconstruire les idéologies politiques qui voudraient supplanter la vérité. Les expériences tragiques du 20e siècle ont mis à nu l’inhumanité qui s’ensuit lorsque la vérité et la dignité humaine sont niées. De nos jours, nous sommes témoins de tentatives pour promouvoir de supposées valeurs sous le couvert de la paix, du développement et des droits humains. En ce sens, en m’adressant à l’Assemblée Générale des Nations Unies, j’ai attiré l’attention sur des tentatives conduites en certains lieux pour réinterpréter la Déclaration universelle des Droits de l’Homme dans le but de donner satisfaction à des intérêts particuliers qui compromettraient la cohérence interne de la Déclaration et l’éloignerait de son objectif originel (cf. Discours à l’Assemblée Générale des Nations Unies, 18 avril 2008).

 

Troisièmement, promouvoir la vérité morale dans la vie publique appelle à un effort constant pour fonder les lois positives sur les principes éthiques de la loi naturelle. Il fut un temps où le recours à celle-ci était considéré comme évident, mais l’ère du positivisme dans la théorisation contemporaine de la loi réclame la réaffirmation de cet axiome important. Les personnes, les communautés et les États, sans le repère des vérités morales objectives, deviendront égoïstes et sans scrupule et le monde, un lieu plus dangereux à vivre. D’autre part, en étant respectueux des droits des personnes et des peuples, nous protégeons et promouvons la dignité humaine. Quand les politiques que nous soutenons sont appliquées en harmonie avec la loi naturelle qui est commune à notre humanité, nos actions deviennent alors plus saines et contribuent à un environnement de compréhension, de justice et de paix.

 

Monsieur le Président, chers amis, par ces considérations, je réaffirme mon estime et celle de l’Église pour l’important service que vous rendez à la société et pour l’édification d’un avenir sûr pour notre monde. J’invoque sur chacun de vous les bénédictions divines pour qu’elles vous donnent sagesse, force et persévérance dans l’accomplissement de vos fonctions. Merci.

 

 

 

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15 juin 2011 3 15 /06 /juin /2011 17:55

LogoVOYAGE APOSTOLIQUE DU PAPE BENOIT XVI A CHYPRE – Discours du Saint Père lors de la célébration œcuménique à Paphos (Chypre), le 4 juin 2010.

 

Chers Frères et Sœurs en Christ,

 

(…) C’est vraiment une grâce extraordinaire pour nous de nous trouver ensemble en prière dans cette église d’Agia Kyriakis Chrysopolitissa. Nous venons d’entendre la lecture des Actes des Apôtres qui nous rappelle que Chypre a été la première étape des voyages missionnaires de l’Apôtre Paul (cf. Ac 12, 1-4). Mis à part par l’Esprit Saint, Paul ainsi que Barnabé, natif de Chypre, et Marc, le futur Évangéliste, arrivèrent les premiers à Salamine (de Chypre), où ils commencèrent à proclamer la Parole de Dieu dans les synagogues. Après avoir traversé l’île, ils arrivèrent à Paphos où tout près de cet endroit, ils prêchèrent en présence du proconsul romain Sergius Paulus. Ainsi, c’est à partir de ce lieu que le message de l’Évangile commença à se répandre à travers l’Empire, et l’Église, encouragée par la prédication des Apôtres, parvint à s’enraciner dans le monde alors connu.

 

L’Église à Chypre peut justement être fière de ses liens directs avec la prédication de Paul, Barnabé et Marc, et de sa communion dans la foi apostolique, une communion qui l’unit à toutes les Églises qui conservent cette même règle de foi. C’est là la communion, réelle, bien qu’imparfaite, qui nous unit déjà, et qui nous pousse à surmonter nos divisions et à œuvrer pour restaurer l’unité pleine et visible qui est la volonté du Seigneur pour tous ses disciples. C’est pourquoi, suivant les paroles de Paul, « de même que votre vocation vous a tous appelés à une seule espérance, de même il n’y a qu’un seul Corps et un seul Esprit. Il n’y a qu’un seul Seigneur, une seule foi, un seul baptême » (Ep 4, 4-5).

 

La communion ecclésiale dans la foi des Apôtres est à la fois un don et une mission qui nous sont confiés. Dans le passage des Actes que nous venons d’écouter, nous trouvons une image de l’unité de l’Église en prière, et de son ouverture au souffle de l’Esprit de la mission. Comme Paul et Barnabé, par le baptême, chaque Chrétien est mis à part pour porter le témoignage prophétique du Seigneur ressuscité et de l’Évangile de la réconciliation, de la miséricorde et de la paix (…). L’unité de tous les disciples du Christ est un don qui doit être imploré auprès du Père dans l’espérance qu’elle affermira le témoignage de l’Évangile dans le monde d’aujourd’hui. Le Seigneur a prié pour la sainteté et l’unité de ses disciples, précisément pour que le monde puisse croire (cf. Jn17, 21) Il y a juste cent ans, à la Conférence Missionnaire d’Édimbourg, la conscience claire que les divisions entre Chrétiens étaient un obstacle à la diffusion de l’Évangile, a occasionné la naissance du mouvement œcuménique moderne. Aujourd’hui, nous pouvons être reconnaissants à l’égard du Seigneur, qui à travers son Esprit, nous a amenés, spécialement ces dernières décennies, à redécouvrir le riche héritage apostolique qui est commun à l’Est et à l’Ouest, et, à travers un dialogue patient et sincère, à trouver les chemins pour nous rapprocher les uns des autres, en surmontant les controverses passées, et en aspirant à un avenir meilleur.

 

L’Église à Chypre qui a servi de pont entre l’Est et l’Ouest, a beaucoup contribué à ce processus de réconciliation. Le chemin qui a pour but la pleine communion ne sera certainement pas exempt de difficultés, cependant l’Église Catholique et l’Église Orthodoxe de Chypre se sont engagées à avancer sur le chemin du dialogue et de la coopération fraternelle. Que l’Esprit Saint éclaire les esprits et renforce nos résolutions, afin qu’ensemble nous puissions porter le message du Salut aux hommes et aux femmes de notre temps, qui ont soif de la foi qui apporte la vraie liberté et le Salut (cf. Jn8, 32), la vérité qui a pour nom Jésus Christ!

  

Rencontre oecuménique 

Chers sœurs et frères, je ne peux conclure sans évoquer la mémoire des saints qui ont embelli l’Église à Chypre, et, en particulier saint Épiphane, Évêque de Salamine. La sainteté est le signe de la plénitude de la vie chrétienne, d’une profonde docilité intérieure à l’Esprit Saint qui nous appelle à une conversion et à un renouvellement continus tandis que nous nous efforçons d’être toujours plus semblables au Christ notre Sauveur. Conversion et sainteté sont aussi le chemin privilégié par lequel nous ouvrons nos esprits et nos cœurs à la volonté du Seigneur en vue de l’unité de son Église. Tandis que nous rendons grâce pour cette rencontre et pour l’affection fraternelle qui nous unit, demandons à Saint Barnabé et à Saint Épiphane, à Saint Pierre et à Saint Paul, et à tous les saints de Dieu, de bénir nos communautés, de nous conserver dans la foi des Apôtres, et de guider nos pas sur le chemin de l’unité, de la charité et de la paix.

 

 

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13 juin 2011 1 13 /06 /juin /2011 21:52

Conférence de Presse du Pape Benoît XVI à bord de l’avion le conduisant à Chypre, le 4 juin 2010.

 

Père Federico Lombardi : Votre Sainteté, nous vous remercions d'être avec nous, comme à chaque voyage, et de nous offrir votre parole pour guider notre attention en ces jours, qui seront si intenses. La première question revêt malheureusement un caractère obligatoire, en raison de l'événement qui nous a frappés si douloureusement hier, l'assassinat de Mgr Padovese, et qui a été pour vous un motif de profonde douleur. C'est pourquoi, au nom de tous mes collègues, je voulais vous demander de nous dire quelques mots sur la façon dont vous avez accueilli cette nouvelle et dont vous vivez le début de votre voyage à Chypre dans ce climat.

 

AvionSaint-Père : Naturellement, je suis profondément attristé par la mort de Mgr Padovese, qui a également beaucoup contribué à la préparation du synode ; il a apporté sa collaboration et il aurait été un élément très précieux pour ce synode. Nous confions son âme à la bonté du Seigneur. Toutefois, cette ombre n'a rien à voir avec les thèmes mêmes ou avec la réalité du voyage, car nous ne devons pas attribuer ce fait à la Turquie ou aux Turcs. C'est un fait à propos duquel nous disposons de peu d'informations. Ce qui est certain, c'est qu'il ne s'agit pas d'un assassinat politique ou religieux ; il s'agit d'une affaire personnelle. Nous attendons encore tous les éclaircissements mais nous ne voulons pas en ce moment mélanger cette situation tragique avec le dialogue avec l'islam et avec toutes les questions liées à notre voyage. C'est un cas à part, qui nous attriste, mais qui ne devrait en aucune façon entacher le dialogue, sous tous ses aspects, qui sera le thème et l'objectif de ce voyage.

 

Père Federico Lombardi : Votre Sainteté, Chypre est une terre divisée. Vous ne vous rendrez pas dans la partie nord, occupée par les Turcs. Avez-vous un message pour les habitants de cette région? Comment pensez-vous que votre visite puisse contribuer à résoudre la distance qui sépare la partie grecque de la partie turque, et à avancer vers une solution de coexistence pacifique, dans le respect de la liberté religieuse, du patrimoine spirituel et culturel des diverses communautés?

 

Saint-Père : Ce voyage à Chypre représente, sous de nombreux aspects, la continuation du voyage que j'ai accompli l'an dernier en Terre Sainte et également du voyage à Malte de cette année. Le voyage en Terre Sainte était composé de trois parties : la Jordanie, Israël et les Territoires palestiniens. Dans les trois cas, il s'agissait d'un voyage pastoral, religieux, il ne s'agissait pas d'un voyage politique ou touristique. Le thème fondamental était la paix du Christ, qui doit être une paix universelle dans le monde. Le thème était donc, d'une part, l'annonce de notre foi, le témoignage de la foi, le pèlerinage sur ces lieux qui témoignent de la vie du Christ et de toute l'histoire sainte ; et, de l'autre, la responsabilité commune de tous ceux qui croient en un Dieu Créateur du ciel et de la terre, en un Dieu à l'image duquel nous avons été créés. Malte et Chypre ajoutent avec force le thème de Saint Paul, grand croyant, évangélisateur, et également Saint Barnabé, qui est chypriote, et qui a ouvert la voie à la mission de Saint Paul. Le témoignage de notre foi en l'unique Dieu, le dialogue et la paix sont donc les thèmes de fond. La paix doit être considérée dans un sens très profond ; il ne s'agit pas d'un ajout politique à notre activité religieuse, mais la paix est une parole qui vient du cœur de la foi, elle réside dans le cœur de l'enseignement de Saint Paul ; nous pensons à la Lettre aux Ephésiens, où l'on dit que le Christ a apporté la paix, a détruit les murs d'inimitié. Cela demeure un mandat permanent, et ainsi, je ne viens pas avec un message politique, mais avec un message religieux, qui devrait préparer davantage les âmes à trouver l'ouverture à la paix. Ce ne sont pas des choses qui arrivent d'un jour à l'autre, mais il est très important non seulement d'accomplir les pas politiques nécessaires, mais également et surtout, de préparer les âmes à être capables d'accomplir les pas politiques nécessaires, de créer l'ouverture intérieure à la paix, qui, à la fin, vient de la foi en Dieu et de la conviction que nous sommes tous fils de Dieu et frères et sœurs entre nous.

 

Père Federico Lombardi : Vous vous rendez au Moyen-Orient peu de temps après l'attaque israélienne contre la flottille devant Gaza, qui a aggravé les tensions autour du processus de paix déjà difficile. De quelle façon pensez-vous que le Saint-Siège puisse contribuer à surmonter ce moment difficile pour le Moyen-Orient?

 

Saint-Père : Je dirais que nous contribuons surtout de façon religieuse. Nous pouvons également aider à travers les conseils politiques et stratégiques, mais le travail essentiel du Vatican est toujours d'ordre religieux, touche le cœur. Avec tous les épisodes que nous vivons, il y a toujours le danger que l'on perde patience, que l'on dise "maintenant cela suffit", et que l'on ne veuille plus rechercher la paix. Et ici me vient à l'esprit, en cette Année sacerdotale, une belle histoire du curé d'Ars. Aux personnes qui lui disaient : "Il ne sert à rien que j'aille à la confession et à l'absolution aujourd'hui, car après-demain, je suis certain de retomber dans les mêmes péchés", le curé d'Ars répondait : cela ne fait rien, le Seigneur oublie volontairement qu'après-demain, tu commettras les mêmes péchés, il te pardonne à présent complètement, il sera patient et continuera de t'aider, et d'aller à ta rencontre. Ainsi, nous devons en quelque sort imiter Dieu et sa patience. Après tous les cas de violence, ne pas perdre patience, ne pas perdre courage, ne pas perdre la générosité de recommencer ; créer cette disposition du cœur de recommencer toujours à nouveau, dans la certitude que nous pouvons aller de l'avant, que nous pouvons parvenir à la paix, que la solution n'est pas la violence, mais la patience du bien. Créer cette disposition me semble le travail principal que le Vatican, ses organes et le Pape puissent faire.

 

Père Federico Lombardi : Votre Sainteté, le dialogue avec les orthodoxes a accompli de nombreux progrès du point de vue culturel, spirituel, et de la vie. A l'occasion du récent concert qui vous a été offert par le patriarche de Moscou, l'on a ressenti une profonde harmonie entre orthodoxes et catholiques face aux défis lancés au christianisme en Europe par la sécularisation. Quelle est votre position sur le dialogue, notamment du point de vue plus spécifiquement théologique?

 

Saint-Père : Je voudrais avant tout souligner les grands progrès que nous avons accomplis dans le témoignage commun des valeurs chrétiennes dans le monde sécularisé. Il ne s'agit pas uniquement d'une coalition – disons – morale, politique, mais il s'agit véritablement de quelque chose de profondément lié à la foi, car les valeurs fondamentales pour lesquelles nous vivons dans ce monde sécularisé ne sont pas des moralismes, mais sont la physionomie fondamentale de la foi chrétienne. Lorsque nous sommes capables ensemble de témoigner de ces valeurs, de nous engager dans le dialogue, dans le débat de ce monde, dans le débat pour vivre ces valeurs, nous apportons déjà un témoignage fondamental d'une unité très profonde de la foi. Naturellement, il existe également de nombreux problèmes théologiques, mais ici aussi, les éléments d'unité sont forts. Je voudrais indiquer trois éléments qui nous lient [avec les orthodoxes], qui nous voient toujours plus proches, qui nous rendent toujours plus proches. En premier lieu, l'Ecriture, la Bible, n'est pas un livre tombé du ciel, qui est là à présent et que tout le monde utilise, mais c'est un livre qui a mûri dans le peuple de Dieu et qui vit dans ce sujet commun du peuple de Dieu et qui seulement en lui demeure toujours présent et réel, c'est-à-dire que la Bible ne peut pas être isolée, mais la Bible réside dans le lien entre Tradition et Eglise. Cette conscience est fondamentale et appartient au fondement de l'orthodoxie et du catholicisme et nous offre une voie commune. En deuxième lieu, nous disons : la Tradition, qui nous interprète, qui nous ouvre la voie à l'Ecriture, possède également une forme institutionnelle, sacrée, sacramentelle, voulue par le Seigneur, c'est-à-dire l'épiscopat ; elle possède une forme personnelle : c'est-à-dire que le collège des évêques est à la fois témoin et présence de cette Tradition. Et, en troisième lieu, ce que l'on appelle la regula fidei, c'est-à-dire la confession de la foi élaborée par les anciens Conciles est la somme de ce qui se trouve dans l'Ecriture et qui ouvre la "porte" de l'interprétation. Il existe ensuite d'autres éléments : la liturgie, l'amour commun pour la Vierge nous lient profondément, et il devient toujours plus clair pour nous qu'ils représentent les fondements de la vie chrétienne. Nous devons être davantage conscients et approfondir également les détails, mais il me semble que même si les cultures différentes, les situations différentes ont suscité des malentendus et des difficultés, nous grandissons dans la conscience de l'essentiel et de l'unité de l'essentiel. Je voudrais ajouter que, naturellement ce n'est pas la discussion théologique qui crée en soi l'unité ; il s'agit d'une dimension importante, mais toute la vie chrétienne, la connaissance réciproque, l'expérience de la fraternité, apprendre, en dépit de l'expérience du passé, cette fraternité commune, sont des processus qui exigent également une grande patience. Mais il me semble que nous sommes précisément en train d'apprendre la patience, tout comme l'amour, et avec toutes les dimensions du dialogue théologique, nous allons de l'avant, laissant au Seigneur le soin de décider du moment où il nous donnera l'unité parfaite.

 

Père Federico Lombardi : L'un des objectifs de ce voyage est la remise du document de travail du synode des évêques pour le Moyen-Orient. Quelles sont vos attentes et vos espérances principales en ce qui concerne ce synode, pour les communautés chrétiennes et également pour les croyants d'autres confessions dans cette région?

 

Saint-Père : Le premier point important est que divers évêques et chefs d'Eglises se rencontrent ici, car nous avons de nombreuses Eglises – divers rites sont présents dans divers pays, dans des situations diverses – et ils apparaissent souvent isolés, ils disposent également souvent de peu d'informations sur l'autre ; se voir, se rencontrer, et ainsi prendre conscience l'un de l'autre, des problèmes, des différences et des situations communes, se former ensemble un jugement sur la situation, sur le chemin à prendre. Cette communion concrète de dialogue et de vie est un premier point. Un second point est également la visibilité de ces Eglises, c'est-à-dire le fait que l'on voit dans le monde qu'il y a une chrétienté importante et antique au Moyen-Orient, qui souvent ne se voit pas, et que cette visibilité nous aide également à nous rapprocher d'eux, à approfondir notre connaissance réciproque, à apprendre les uns des autres, à nous aider, et à aider ainsi également les chrétiens du Moyen-Orient à ne pas perdre l'espérance, à rester, même si les conditions sont parfois difficiles. Ainsi, – et c'est le troisième point – dans le dialogue entre eux, ils s'ouvrent également au dialogue avec les autres chrétiens orthodoxes, arméniens, etc, et ainsi croît une conscience commune de la responsabilité chrétienne et également une capacité commune de dialogue avec les frères musulmans, qui sont nos frères, malgré les différences ; et il me semble qu'apparaît également un encouragement, en dépit de tous les problèmes, à poursuivre, à travers une vision commune, le dialogue avec eux. Toutes les tentatives en vue d'une coexistence toujours plus fructueuse et fraternelle sont très importantes. Il s'agit donc d'une rencontre interne de ces chrétiens catholiques du Moyen-Orient dans les divers rites, mais il s'agit également d'une rencontre précisément d'ouverture, de capacité renouvelée et de dialogue, de courage et d'espérance pour l'avenir.

 

 

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4 juin 2011 6 04 /06 /juin /2011 12:22

Audience Générale du Pape Benoît XVI sur Saint Albert le Grand, le 24 mars 2010.

 

Chers frères et sœurs,

 

L'un des plus grands maîtres de la théologie médiévale est Saint Albert le Grand. Le titre de « grand » (magnus) avec lequel il est passé à l'Histoire, indique l'étendue et la profondeur de sa doctrine, qu'il associa à la sainteté de sa vie. Mais ses contemporains déjà n'hésitaient pas à lui attribuer des titres d'excellence ; l'un de ses disciples, Ulrich de Strasbourg, le définit comme « merveille et miracle de notre temps ».

 

Il naquit en Allemagne au début du XIIIesiècle, et tout jeune encore, il se rendit en Italie, à Padoue, siège de l'une des plus célèbres universités du Moyen-Âge. Il se consacra à l'étude de ce que l'on appelle les « arts libéraux » : grammaire, rhétorique, dialectique, arithmétique, géométrie, astronomie et musique, c'est-à-dire de la culture générale, manifestant cet intérêt typique pour les sciences naturelles, qui devait bientôt devenir le domaine de prédilection de sa spécialisation. Au cours de son séjour à Padoue, il fréquenta l'église des dominicains, auxquels il s'unit par la suite avec la profession des vœux religieux. Les sources hagiographiques font comprendre qu'Albert a pris cette décision progressivement. Le rapport intense avec Dieu, l'exemple de sainteté des frères dominicains, l'écoute des sermons du bienheureux Jourdain de Saxe, successeur de Saint Dominique à la tête de l'Ordre des prêcheurs, furent les facteurs décisifs qui l'aidèrent à surmonter tout doute, vainquant également les résistances familiales. Souvent, dans les années de notre jeunesse, Dieu nous parle et nous indique le projet de notre vie. Comme pour Albert, pour nous tous aussi, la prière personnelle nourrie par la Parole du Seigneur, l'assiduité aux sacrements et la direction spirituelle donnée par des hommes éclairés sont les moyens pour découvrir et suivre la voix de Dieu. Il reçut l'habit religieux des mains du bienheureux Jourdain de Saxe.

 

Après son ordination sacerdotale, ses supérieurs le destinèrent à l'enseignement dans divers centres d'études théologiques liés aux couvents des Pères dominicains. Ses brillantes qualités intellectuelles lui permirent de perfectionner l'étude de la théologie à l'Université la plus célèbre de l'époque, celle de Paris. Albert entreprit alors l'activité extraordinaire d'écrivain, qu'il devait poursuivre toute sa vie.

 

Des tâches prestigieuses lui furent confiées. En 1248, il fut chargé d'ouvrir une université de théologie à Cologne, l'un des chefs-lieux les plus importants d'Allemagne, où il vécut à plusieurs reprises, et qui devint sa ville d'adoption. De Paris, il emmena avec lui à Cologne un élève exceptionnel, Thomas d'Aquin. Le seul mérite d'avoir été le maître de Saint Thomas d'Aquin suffirait pour que l'on nourrisse une profonde admiration pour Saint Albert. Entre ces deux grands théologiens s'instaura un rapport d'estime et d'amitié réciproque, des attitudes humaines qui contribuent beaucoup au développement de la science. En 1254, Albert fut élu provincial de la « Provincia Teutoniae » – teutonique – des Pères dominicains, qui comprenait des communautés présentes dans un vaste territoire du centre et du nord de l'Europe. Il se distingua par le zèle avec lequel il exerça ce ministère, en visitant les communautés et en rappelant constamment les confrères à la fidélité, aux enseignements et aux exemples de Saint Dominique.

 

Ses qualités n'échappèrent pas au pape de l'époque, Alexandre IV, qui voulut Albert pendant un certain temps à ses côtés à Anagni – où les papes se rendaient fréquemment – à Rome même et à Viterbe, pour bénéficier de ses conseils théologiques. Ce même souverain pontife le nomma évêque de Ratisbonne, un grand et célèbre diocèse, qui traversait toutefois une période difficile. De 1260 à 1262, Albert accomplit ce ministère avec un dévouement inlassable, réussissant à apporter la paix et la concorde dans la ville, à réorganiser les paroisses et les couvents, et à donner une nouvelle impulsion aux activités caritatives.

 

Dans les années 1263-1264, Albert prêcha en Allemagne et en Bohême, envoyé par le pape Urbain IV, pour retourner ensuite à Cologne et reprendre sa mission d'enseignant, de chercheur et d'écrivain. Etant un homme de prière, de science et de charité, il jouissait d'une grande autorité dans ses interventions, à l'occasion de divers événements concernant l'Eglise et la société de l'époque : ce fut surtout un homme de réconciliation et de paix à Cologne, où l'archevêque était entré en opposition farouche avec les institutions de la ville ; il se prodigua au cours du déroulement du IIe Concile de Lyon, en 1274, convoqué par le pape Grégoire X pour favoriser l'union avec les Grecs, après la séparation du grand schisme d'Orient de 1054 ; il éclaircit la pensée de Thomas d'Aquin, qui avait rencontré des objections et même fait l'objet de condamnations totalement injustifiées.

 

Il mourut dans la cellule de son couvent de la Sainte-Croix à Cologne en 1280, et il fut très vite vénéré par ses confrères. L'Eglise le proposa au culte des fidèles avec sa béatification, en 1622, et avec sa canonisation, en 1931, lorsque le papePie XI le proclama Docteur de l'Eglise. Il s'agissait d'une reconnaissance sans aucun doute appropriée à ce grand homme de Dieu et éminent savant non seulement dans le domaine des vérités de la foi, mais dans de très nombreux autres domaines du savoir ; en effet, en regardant le titre de ses très nombreuses œuvres, on se rend compte que sa culture a quelque chose de prodigieux, et que ses intérêts encyclopédiques le conduisirent à s'occuper non seulement de philosophie et de théologie, comme d'autres contemporains, mais également de toute autre discipline alors connue, de la physique à la chimie, de l'astronomie à la minéralogie, de la botanique à la zoologie. C'est pour cette raison que le pape Pie XII le nomma patron de ceux qui aiment les sciences naturelles et qu'il est également appelé « Doctor universalis », précisément en raison de l'ampleur de ses intérêts et de son savoir.

 

Les méthodes scientifiques utilisées par Saint Albert le Grand ne sont assurément pas celles qui devaient s'affirmer au cours des siècles suivants. Sa méthode consistait simplement dans l'observation, dans la description et dans la classification des phénomènes étudiés, mais ainsi, il a ouvert la porte pour les travaux à venir. Il a encore beaucoup à nous enseigner. Saint Albert montre surtout qu'entre la foi et la science, il n'y a pas d'opposition, malgré certains épisodes d'incompréhension que l'on a enregistrés au cours de l'histoire. Un homme de foi et de prière comme Saint Albert le Grand, peut cultiver sereinement l'étude des sciences naturelles et progresser dans la connaissance du micro et du macrocosme, découvrant les lois propres de la matière, car tout cela concourt à abreuver sa soif et à nourrir son amour de Dieu. La Bible nous parle de la Création comme du premier langage à travers lequel Dieu – qui est intelligence suprême – nous révèle quelque chose de lui. Le Livre de la Sagesse, par exemple, affirme que les phénomènes de la nature, dotés de grandeur et de beauté, sont comme les œuvres d'un artiste, à travers lesquelles, par analogie, nous pouvons connaître l'Auteur de la Création (cf. Sg 13, 5). Avec une comparaison classique au Moyen-Âge et à la Renaissance, on peut comparer le monde naturel à un livre écrit par Dieu, que nous lisons selon les diverses approches de la science (cf. Discours aux participants à l'Assemblée plénière de l'Académie pontificale des sciences, 31 octobre 2008). En effet, combien de scientifiques, dans le sillage de Saint Albert le Grand, ont mené leurs recherches inspirés par l'émerveillement et la gratitude face au monde qui, à leurs yeux de chercheurs et de croyants, apparaissait et apparaît comme l'œuvre bonne d'un Créateur sage et aimant! L'étude scientifique se transforme alors en une hymne de louange. C'est ce qu'avait bien compris un grand astrophysicien de notre époque, Enrico Medi, et qui écrivait : « Oh, vous mystérieuses galaxies..., je vous vois, je vous calcule, je vous entends, je vous étudie, je vous découvre, je vous pénètre et je vous recueille. De vous, je prends la lumière et j'en fais de la science, je prends le mouvement et j'en fais de la sagesse, je prends le miroitement des couleurs et j'en fais de la poésie ; je vous prends vous, étoiles, entre mes mains, et tremblant dans l'unité de mon être, je vous élève au-dessus de vous-mêmes, et en prière je vous présente au Créateur, que seulement à travers moi, vous étoiles, vous pouvez adorer »Saint Albert le Grand nous rappelle qu'entre science et foi une amitié existe et que les hommes de science peuvent parcourir à travers leur vocation à l'étude de la nature, un authentique et fascinant parcours de sainteté.

 

Son extraordinaire ouverture d'esprit se révèle également dans une opération culturelle qu'il entreprit avec succès : l'accueil et la mise en valeur de la pensée d'Aristote. A l'époque de Saint Albert, en effet, la connaissance de beaucoup d'œuvres de ce grand philosophe grec ayant vécu au quatrième siècle avant Jésus Christ, en particulier dans le domaine de l'éthique et de la métaphysique, était en effet en train de se répandre. Celles-ci démontraient la force de la raison, elles expliquaient avec lucidité et clarté le sens et la structure de la réalité, son intelligibilité, la valeur et la fin des actions humaines. Saint Albert le Grand a ouvert la porte à la réception complète de la philosophie d'Aristote dans la philosophie et la théologie médiévales, une réception élaborée ensuite de manière définitive par Saint Thomas. Cette réception d'une philosophie, disons, païenne pré-chrétienne, fut une authentique révolution culturelle pour cette époque. Pourtant, beaucoup de penseurs chrétiens craignaient la philosophie d'Aristote, la philosophie non chrétienne, surtout parce que celle-ci, présentée par ses commentateurs arabes, avait été interprétée de manière à apparaître, au moins sur certains points, comme tout à fait inconciliable avec la foi chrétienne. Il se posait donc un dilemme : foi et raison sont-elles ou non en conflit l'une avec l'autre?

 

C'est là que réside l'un des grands mérites de Saint Albert : avec une rigueur scientifique, il étudia les œuvres d'Aristote, convaincu que tout ce qui est vraiment rationnel est compatible avec la foi révélée dans les Saintes Ecritures. En d'autres termes, Saint Albert le Grand a ainsi contribué à la formation d'une philosophie autonome, distincte de la théologie et unie à elle uniquement par l'unité de la vérité. Ainsi est apparue au XIIIe siècle une distinction claire entre ces deux savoirs, philosophie et théologie qui, en dialogue entre eux, coopèrent de manière harmonieuse à la découverte de la vocation authentique de l'homme, assoiffé de vérité et de béatitude : et c'est surtout la théologie, définie par Saint Albert comme une « science affective », qui indique à l'homme son appel à la joie éternelle, une joie qui jaillit de la pleine adhésion à la vérité.

 

Saint Albert le Grand fut capable de communiquer ces concepts de manière simple et compréhensible. Authentique fils de Saint Dominique, il prêchait volontiers au peuple de Dieu, qui était conquis par sa parole et par l'exemple de sa vie.

 

Chers frères et sœurs, prions le Seigneur pour que ne viennent jamais à manquer dans la Sainte Eglise de doctes théologiens, pieux et savants comme Saint Albert le Grand et pour que ce dernier aide chacun de nous à faire sienne la « formule de la sainteté » qu'il adopta dans sa vie : « Vouloir tout ce que je veux pour la gloire de Dieu, comme Dieu veut pour sa gloire tout ce qu'Il veut », soit se conformer toujours à la volonté de Dieu pour vouloir et faire tout, seulement et toujours pour Sa gloire.

 

 

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3 juin 2011 5 03 /06 /juin /2011 13:09

Audience Générale du Pape Benoît XVI sur Saint Bonaventure, le 17 mars 2010 (3e et dernière partie).

 

Chers frères et sœurs,

 

Ce matin, en poursuivant la réflexion de mercredi dernier, je voudrais approfondir avec vous d'autres aspects de la doctrine de Saint Bonaventure de Bagnoregio. Il s'agit d'un éminent théologien, qui mérite d'être placé à côté d'un autre très grand penseur de son époque, Saint Thomas d'Aquin. Tous deux ont scruté les mystères de la Révélation, en mettant en valeur les ressources de la raison humaine, dans ce dialogue fécond entre foi et raison qui caractérise le Moyen-âge chrétien, en en faisant une époque de très grand dynamisme intellectuel, ainsi que de foi et de renouveau ecclésial, rarement mis en évidence. D'autres similitudes les rapprochent : tant Bonaventure, franciscain, que Thomas, dominicain, appartenaient aux Ordres mendiants qui, par leur fraîcheur spirituelle, comme je l'ai rappelé lors de précédentes catéchèses, renouvelèrent, au XIIIe siècle, l'Eglise tout entière et attirèrent de nombreux fidèles. Tous deux servirent l'Eglise avec diligence, avec passion et avec amour, au point d'être envoyés pour participer au Concile œcuménique de Lyon en 1274, l'année même où ils moururent : Thomas tandis qu'il se rendait à Lyon, Bonaventure au cours du déroulement de ce même Concile. Sur la Place Saint-Pierre également, les statues des deux saints sont parallèles, et placées précisément au début de la Colonnade, en partant de la façade de la Basilique vaticane : l'une est située sur le bras gauche, et l'autre sur le bras droit. En dépit de tous ces aspects, nous pouvons saisir chez les deux grands saints deux approches différentes de la recherche philosophique et théologique, qui montrent l'originalité et la profondeur de pensée de l'un et de l'autre. Je voudrais évoquer certaines de ces différences.

 

Une première différence concerne le concept de théologie. Les deux docteurs se demandent si la théologie est une science pratique ou une science théorique, spéculative. Saint Thomas réfléchit sur deux possibles réponses opposées. La première dit : la théologie est une réflexion sur la foi et l'objectif de la foi est que l'homme devienne bon, et vive selon la volonté de Dieu. Le but de la théologie devrait donc être celui de guider sur la voie juste, bonne ; par conséquent, celle-ci, au fond, est une science pratique. L'autre position dit : la théologie cherche à connaître Dieu. Nous sommes l'œuvre de Dieu ; Dieu est au-dessus de nos actions. Dieu opère en nous la juste action. Il s'agit donc en substance non pas de notre action, mais de connaître Dieu, pas notre œuvre. La conclusion de Saint Thomas est : la théologie implique les deux aspects : elle est théorique, elle cherche à connaître Dieu toujours plus, et elle est pratique : elle cherche à orienter notre vie vers le bien. Mais il existe un primat de la connaissance : nous devons avant tout connaître Dieu, puis suit l'action selon Dieu (Summa Theologiae, Ia, q. 1, art. 4). Ce primat de la connaissance par rapport à la pratique est significatif pour l'orientation fondamentale de Saint Thomas.

 

La réponse de Saint Bonaventure est très semblable, mais les accents sont différents. Saint Bonaventure connaît les mêmes arguments dans l'une et dans l'autre direction, comme Saint Thomas, mais pour répondre à la question de savoir si la théologie est une science pratique ou théorique, Saint Bonaventure fait une triple distinction – il étend l'alternative entre théorique (primat de la connaissance) et pratique (primat de la pratique), en ajoutant une troisième attitude, qu'il appelle "sapientielle" et affirme que la sagesse embrasse les deux aspects. Il poursuit : la sagesse recherche la contemplation (comme la plus haute forme de la connaissance) et a pour intention "ut boni fiamus" – que nous devenions bons, surtout cela : devenir bons (cf. Breviloquium, Prologus, n. 5). Puis il ajoute : « La foi est dans l'esprit d'une façon telle qu'elle provoque l'affection. Par exemple : savoir que le Christ est mort "pour nous" ne demeure pas une connaissance, mais devient nécessairement affection, amour" » (Proemium in i Sent., q. 3).

 

C'est dans la même optique que se situe sa défense de la théologie, c'est-à-dire de la réflexion rationnelle et méthodique de la foi. Saint Bonaventure dresse la liste de plusieurs arguments contre le fait de faire de la théologie, peut-être également répandus chez une partie des frères franciscains et présents aussi à notre époque : la raison viderait la foi, elle serait une attitude violente à l'égard de la Parole de Dieu, nous devons écouter et non analyser la Parole de Dieu (cf. Lettre de saint François d'Assise à saint Antoine de Padoue). A ces arguments contre la théologie, qui démontrent les dangers existant dans la théologie elle-même, le saint répond : il existe une manière arrogante de faire de la théologie, un orgueil de la raison, qui se place au-dessus de la Parole de Dieu. Mais la vraie théologie, le travail rationnel de la véritable et de la bonne théologie a une autre origine que l'orgueil de la raison. Celui qui aime veut toujours connaître mieux et davantage l'aimé ; la véritable théologie n'engage pas la raison et sa recherche motivée par l'orgueil, "sed propter amorem eius cui assentit" – [mais elle est] "motivée par l'amour de Celui à qui elle a donné son assentiment" (Proemium in i Sent. 2, qu. 2) et veut mieux connaître l'aimé, telle est l'intention fondamentale de la théologie. Pour Saint Bonaventure, le primat de l'amour est donc déterminant.

 

En conséquence, Saint Thomas et Saint Bonaventure définissent de manière différente la destination ultime de l'homme, son bonheur complet : pour Saint Thomas, le but suprême, vers lequel se dirige notre désir est : voir Dieu. Dans ce simple acte de voir Dieu, tous les problèmes trouvent leur solution : nous sommes heureux, rien d'autre n'est nécessaire. Pour Saint Bonaventure, le destin ultime de l'homme est en revanche : aimer Dieu, la rencontre et l'union de son amour et du nôtre. Telle est pour lui la définition la plus adaptée de notre bonheur.

 

Dans cette optique, nous pourrions également dire que la catégorie la plus élevée pour Saint Thomas est la vérité, alors que pour saint Bonaventure, c'est le bien. Il serait erroné de voir une contradiction dans ces deux réponses. Pour tous les deux, la vérité est également le bien, et le bien est également la vérité ; voir Dieu est aimer et aimer est voir. Il s'agit d'aspects différents d'une vision fondamentalement commune. Ces deux aspects ont formé des traditions différentes et des spiritualités différentes et ils ont ainsi montré la fécondité de la foi, une, dans la diversité de ses expressions.

 

Revenons à Saint Bonaventure. Il est évident que l'accent spécifique de sa théologie, dont je n'ai donné qu'un exemple, s'explique à partir du charisme franciscain : le Poverello d'Assise, au-delà des débats intellectuels de son époque, avait montré à travers toute sa vie le primat de l'amour ; il était une icône vivante et aimante du Christ et, ainsi, il a rendu présente, à son époque, la figure du Seigneur – il a convaincu ses contemporains non par les mots, mais par sa vie. Dans toutes les œuvres de Saint Bonaventure, précisément aussi dans les œuvres scientifiques, d'école, on voit et on trouve cette inspiration franciscaine ; c'est-à-dire que l'on remarque qu'il pense en partant de la rencontre avec le Poverello d'Assise. Mais pour comprendre l'élaboration concrète du thème "primat de l'amour", nous devons encore garder à l'esprit une autre source : les écrits de celui qu'on appelle le Pseudo-Denys, un théologien syriaque du VIe siècle, qui s'est caché sous le pseudonyme de Denys l'Aréopagite, en faisant allusion, avec ce nom, à une figure des Actes des Apôtres (cf. 17, 34). Ce théologien avait créé une théologie liturgique et une théologie mystique, et il avait longuement parlé des différents ordres des anges. Ses écrits furent traduits en latin au IXe siècle ; à l'époque de Saint Bonaventure, nous sommes au XIIIe siècle, apparaissait une nouvelle tradition, qui suscita l'intérêt du saint et des autres théologiens de son siècle. Deux choses attiraient de manière particulière l'attention de Saint Bonaventure.

 

1°) Le Pseudo-Denys parle de neuf ordres des anges, dont il avait trouvé les noms dans l'Ecriture et qu'il avait ensuite classés à sa manière, des anges simples jusqu'aux séraphins. Saint Bonaventure interprète ces ordres des anges comme des degrés dans le rapprochement de la créature avec Dieu. Ils peuvent ainsi représenter le chemin humain, la montée vers la communion avec Dieu. Pour Saint Bonaventure, il n'y a aucun doute : Saint François d'Assise appartenait à l'ordre séraphique, au chœur des séraphins ; c'est-à-dire qu'il était un pur feu d'amour. Et c'est ainsi qu'auraient dû être les franciscains. Mais Saint Bonaventure savait bien que ce dernier degré de proximité avec Dieu ne peut pas être inséré dans un ordre juridique, mais que c'est toujours un don particulier de Dieu. C'est pourquoi la structure de l'ordre franciscain est plus modeste, plus réaliste, mais doit, toutefois, aider les membres à s'approcher toujours davantage d'une existence séraphique d'amour pur. J'ai parlé mercredi dernier de cette synthèse entre sobre réalisme et radicalité évangélique dans la pensée et dans l'action de Saint Bonaventure.

 

2°) Saint Bonaventure, toutefois, a trouvé dans les écrits du Pseudo-Denys un autre élément, encore plus important pour lui. Tandis que pour Saint Augustin l'intellectus, le voir avec la raison et le cœur, est la dernière catégorie de la connaissance, le Pseudo-Denys va encore un peu plus loin : dans l'ascension vers Dieu, on peut arriver à un point où la raison ne voit plus. Mais dans la nuit de l'intellect, l'amour voit encore – il voit ce qui reste inaccessible pour la raison. L'amour s'étend au-delà de la raison, il voit davantage, il entre plus profondément dans le mystère de Dieu. Saint Bonaventure fut fasciné par cette vision, qui correspondait à sa spiritualité franciscaine. C'est précisément dans la nuit obscure de la Croix qu'apparaît toute la grandeur de l'amour divin ; là où la raison ne voit plus, c'est l'amour qui voit. Les paroles de conclusion de l'"itinéraire de l'esprit en Dieu", lors d'une lecture superficielle, peuvent apparaître comme une expression exagérée d'une dévotion sans contenu ; mais lues à la lumière de la théologie de la Croix de Saint Bonaventure, elles sont une expression limpide et réaliste de la spiritualité franciscaine : "Si tu brûles de savoir comment cela advient (l'ascension vers Dieu), interroge la grâce, non la doctrine ; le désir, non l'intellect ; la plainte de la prière, non l'étude de la lettre ;... non la lumière, mais le feu qui enflamme toute chose et transporte en Dieu" (VII, 6). Tout cela n'est pas anti-intellectuel et n'est pas anti-rationnel : cela suppose le chemin de la raison, mais le transcende dans l'amour du Christ crucifié. Avec cette transformation de la mystique du Pseudo-Denys, Saint Bonaventure se place au commencement d'un grand courant mystique, qui a beaucoup élevé et purifié l'esprit humain : c'est un sommet dans l'histoire de l'esprit humain.

 

Cette théologie de la Croix, née de la rencontre entre la théologie du Pseudo-Denys et la spiritualité franciscaine, ne doit pas nous faire oublier que Saint Bonaventure partagea avec Saint François d'Assise également l'amour pour la Création, la joie pour la beauté de la Création de Dieu. Je cite sur ce point une phrase du premier chapitre de l'"Itinéraire" : "Celui... qui ne voit pas les splendeurs innombrables des créatures, est aveugle ; celui qui n'est pas réveillé par les si nombreuses voix, est sourd ; celui qui, pour toutes ces merveilles, ne loue pas Dieu, est muet ; celui qui devant tant de signes ne s'élève pas au premier principe, est stupide" (I, 15). Toute la Création parle à voix haute de Dieu, du Dieu bon et beau ; de son amour.

 

Toute notre vie est donc pour Saint Bonaventure un "itinéraire", un pèlerinage – une ascension vers Dieu. Mais avec nos seules forces nous ne pouvons pas monter vers les hauteurs de Dieu. Dieu lui-même doit nous aider, doit "nous tirer" vers le haut. C'est pourquoi la prière est nécessaire. La prière – ainsi dit le Saint – est la mère et l'origine de l'élévation – "sursum actio", une action qui nous élève, dit Bonaventure. Je conclus donc par la prière, avec laquelle commence son "Itinéraire" : "Prions donc et disons au Seigneur notre Dieu : ‘Conduis-moi, Seigneur, sur ton chemin et je marcherai dans ta vérité. Que mon cœur se réjouisse dans la crainte de ton nom’" (I, 1).

 

 

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31 mai 2011 2 31 /05 /mai /2011 18:28

Audience Générale du Pape Benoît XVI sur Saint Bonaventure, le 10 mars 2010 (2e partie).

 

Chers frères et sœurs,

 

La semaine dernière, j'ai parlé de la vie et de la personnalité de Saint Bonaventure de Bagnoregio. Ce matin, je voudrais poursuivre sa présentation, en m'arrêtant sur une partie de son œuvre littéraire et de sa doctrine.

 

Comme je le disais déjà, Saint Bonaventure a eu, entre autres mérites, celui d'interpréter de façon authentique et fidèle la figure de Saint François d'Assise, qu'il a vénéré et étudié avec un grand amour. De façon particulière, à l'époque de Saint Bonaventure, un courant de Frères mineurs, dits "spirituels", soutenait qu'avec Saint François avait été inaugurée une phase entièrement nouvelle de l'histoire, et que serait apparu l'"Evangile éternel", dont parle l'Apocalypse, qui remplaçait le Nouveau Testament. Ce groupe affirmait que l'Eglise avait désormais épuisé son rôle historique, et était remplacée par une communauté charismatique d'hommes libres, guidés intérieurement par l'Esprit, c'est-à-dire les "Franciscains spirituels". A la base des idées de ce groupe, il y avait les écrits d'un abbé cistercien, Joachim de Flore, mort en 1202. Dans ses œuvres, il affirmait l'existence d'un rythme trinitaire de l'histoire. Il considérait l'Ancien Testament comme l'ère du Père, suivie par le temps du Fils et le temps de l'Eglise. Il fallait encore attendre la troisième ère, celle de l'Esprit Saint. Toute cette histoire devait être interprétée comme une histoire de progrès : de la sévérité de l'Ancien Testament à la liberté relative du temps du Fils, dans l'Eglise, jusqu'à la pleine liberté des Fils de Dieu au cours du temps de l'Esprit Saint, qui devait être également, enfin, le temps de la paix entre les hommes, de la réconciliation des peuples et des religions. Joachim de Flore avait suscité l'espérance que le début du temps nouveau aurait dérivé d'un nouveau monachisme. Il est donc compréhensible qu'un groupe de franciscains pensait reconnaître chez Saint François d'Assise l'initiateur du temps nouveau et dans son Ordre la communauté de la période nouvelle – la communauté du temps de l'Esprit Saint, qui laissait derrière elle l'Eglise hiérarchique, pour commencer la nouvelle Eglise de l'Esprit, qui n'était plus liée aux anciennes structures.

 

Il existait donc le risque d'un très grave malentendu sur le message de Saint François, de son humble fidélité à l'Evangile et à l'Eglise, et cette équivoque comportait une vision erronée du christianisme dans son ensemble.

 

Saint Bonaventure, qui, en 1257, devint ministre général de l'Ordre franciscain, se trouva face à une grave tension au sein de son Ordre même, précisément en raison de ceux qui soutenaient le courant mentionné des "Franciscains spirituels", qui se référait à Joachim de Flore. Précisément pour répondre à ce groupe et pour redonner une unité à l'Ordre, Saint Bonaventure étudia avec soin les écrits authentiques de Joachim de Flore et ceux qui lui étaient attribués et, tenant compte de la nécessité de présenter correctement la figure et le message de son bien-aimé Saint François, voulut exposer une juste vision de la théologie de l'Histoire. Saint Bonaventure affronta le problème précisément dans sa dernière œuvre, un recueil de conférences aux moines de l'étude parisienne, demeuré incomplet et qui nous est parvenu à travers les transcriptions des auditeurs, intitulée Hexaëmeron, c'est-à-dire une explication allégorique des six jours de la Création. Les Pères de l'Eglise considéraient les six ou sept jours du récit sur la Création comme une prophétie de l'Histoire du monde, de l'humanité. Les sept jours représentaient pour eux sept périodes de l'Histoire, interprétées plus tard également comme sept millénaires. Avec le Christ, nous devions entrer dans le dernier, c'est-à-dire dans la sixième période de l'Histoire, à laquelle devrait succéder ensuite le grand sabbat de Dieu. Saint Bonaventure présuppose cette interprétation historique du rapport avec les jours de la Création, mais d'une façon très libre et innovatrice. Pour lui, deux phénomènes de son époque rendent nécessaire une nouvelle interprétation du cours de l'Histoire. Le premier : la figure de Saint François, l'homme entièrement uni au Christ jusqu'à la communion des stigmates, presque un alter Christus, et avec Saint François, la nouvelle communauté qu'il avait créée, différente du monachisme connu jusqu'alors. Ce phénomène exigeait une nouvelle interprétation, comme nouveauté de Dieu apparue à ce moment. Le deuxième : la position de Joachim de Flore, qui annonçait un nouveau monachisme et une période totalement nouvelle de l'Histoire, en allant au-delà de la révélation du Nouveau Testament, exigeait une réponse.

 

En tant que ministre général de l'Ordre des franciscains, Saint Bonaventure avait immédiatement vu qu'avec la conception spiritualiste, inspirée par Joachim de Flore, l'Ordre n'était pas gouvernable, mais allait logiquement vers l'anarchie. Deux conséquences en découlaient selon lui. La première : la nécessité pratique de structures et d'insertion dans la réalité de l'Eglise hiérarchique, de l'Eglise réelle, avait besoin d'un fondement théologique, notamment parce que les autres, ceux qui suivaient la conception spiritualiste, manifestaient un fondement théologique apparent. La seconde : tout en tenant compte du réalisme nécessaire, il ne fallait pas perdre la nouveauté de la figure de Saint François.

 

Comment Saint Bonaventure a-t-il répondu à l'exigence pratique et théorique ? Je ne peux donner ici qu'un résumé très schématique et incomplet sur certains points de sa réponse :

 

1°) Saint Bonaventure repousse l'idée du rythme trinitaire de l'Histoire. Dieu est un pour toute l'Histoire et il ne se divise pas en trois divinités. En conséquence, l'Histoire est UNE, même si elle est un chemin et – selon Saint Bonaventure – un chemin de progrès.

 

2°) Jésus Christ est la dernière parole de Dieu – en Lui Dieu a tout dit, se donnant et se disant lui-même. Plus que lui-même, Dieu ne peut pas dire, ni donner. L'Esprit Saint est l'Esprit du Père et du Fils. Le Seigneur dit de l'Esprit Saint : "...il vous fera souvenir de tout ce que je vous ai dit" (Jn 14, 26) ; "il reprend ce qui vient de moi pour vous le faire connaître" (Jn 16, 15). Il n'y a donc pas un autre Evangile, il n'y a pas une autre Eglise à attendre. L'Ordre de Saint François doit donc lui aussi s'insérer dans cette Eglise, dans sa foi, dans son organisation hiérarchique.

 

3°) Cela ne signifie pas que l'Eglise soit immobile, fixée dans le passé et qu'il ne puisse pas y avoir de nouveauté dans celle-ci. "Opera Christi non deficiunt, sed proficiunt", les œuvres du Christ ne reculent pas, ne disparaissent pas, mais elles progressent", dit le Saint dans la lettre De tribus quaestionibus. Ainsi, Saint Bonaventure formule explicitement l'idée du progrès, et cela est une nouveauté par rapport aux Pères de l'Eglise et à une grande partie de ses contemporains. Pour Saint Bonaventure, le Christ n'est plus, comme il l'avait été pour les Pères de l'Eglise, la fin, mais le centre de l'Histoire ; avec le Christ, l'histoire ne finit pas, mais une nouvelle période commence. Une autre conséquence est la suivante : jusqu'à ce moment dominait l'idée que les Pères de l'Eglise avaient été le sommet absolu de la théologie; toutes les générations suivantes ne pouvaient être que leurs disciples. Saint Bonaventure reconnaît lui aussi les Pères comme des maîtres pour toujours, mais le phénomène de Saint François lui donne la certitude que la richesse de la parole du Christ est intarissable et que chez les nouvelles générations aussi peuvent apparaître de nouvelles lumières. Le caractère unique du Christ garantit également des nouveautés et un renouveau pour toutes les périodes de l'Histoire.

 

Assurément, l'Ordre franciscain – souligne-t-il – appartient à l'Eglise de Jésus Christ, à l'Eglise apostolique et il ne peut pas se construire dans un spiritualisme utopique. Mais, dans le même temps, la nouveauté de cet Ordre par rapport au monachisme classique est valable, et Saint Bonaventure – comme je l'ai dit dans la catéchèse précédente – a défendu cette nouveauté contre les attaques du clergé séculier de Paris : les franciscains n'ont pas de monastère fixe, ils peuvent être présents partout pour annoncer l'Evangile. C'est précisément la rupture avec la stabilité, caractéristique du monachisme, en faveur d'une nouvelle flexibilité, qui restitua à l'Eglise le dynamisme missionnaire.

 

A ce point, il est peut-être utile de dire qu'aujourd'hui aussi, il existe des points de vue selon lesquels toute l'Histoire de l'Eglise au deuxième millénaire aurait été un déclin permanent ; certains voient déjà le déclin immédiatement après le Nouveau Testament. En réalité, "Opera Christi non deficiunt, sed proficiunt", les œuvres du Christ ne reculent pas, mais elles progressent. Que serait l'Eglise sans la nouvelle spiritualité des cisterciens, des franciscains et des dominicains, la spiritualité de Sainte Thérèse d'Avila et de Saint Jean de la Croix, et ainsi de suite? Aujourd'hui aussi vaut l'affirmation suivante : "Opera Christi non deficiunt, sed proficiunt", elles vont de l'avant. Saint Bonaventure nous enseigne l'ensemble du discernement nécessaire, même sévère, du réalisme sobre et de l'ouverture à de nouveaux charismes donnés par le Christ, dans l'Esprit Saint, à son Eglise. Et alors que se répète cette idée du déclin, il y a également l'autre idée, cet "utopisme spiritualiste", qui se répète. Nous savons, en effet, qu'après le Concile Vatican II, certains étaient convaincus que tout était nouveau, qu'il y avait une autre Eglise, que l'Eglise pré-conciliaire était finie et que nous en aurions eu une autre, totalement "autre". Un utopisme anarchique! Et grâce à Dieu, les sages timoniers de la barque de Pierre, le Pape Paul VI et le Pape Jean-Paul II, d'une part ont défendu la nouveauté du Concile et, de l'autre, dans le même temps, ils ont défendu l'unicité et la continuité de l'Eglise, qui est toujours une Eglise de pécheurs et toujours un lieu de Grâce.

 

4°) Dans ce sens, Saint Bonaventure, en tant que ministre général des franciscains, suivit une ligne de gouvernement dans laquelle il était bien clair que le nouvel Ordre ne pouvait pas, comme communauté, vivre à la même "hauteur eschatologique" que Saint François, chez qui il voit anticipé le monde futur, mais – guidé, dans le même temps, par un sain réalisme et par le courage spirituel – il devait s'approcher le plus possible de la réalisation maximale du Sermon de la montagne, qui pour Saint François fut la règle, tout en tenant compte des limites de l'homme, marqué par le péché originel.

 

Nous voyons ainsi que pour Saint Bonaventure gouverner n'était pas simplement un acte, mais signifiait surtout penser et prier. A la base de son gouvernement nous trouvons toujours la prière et la pensée ; toutes ses décisions résultent de la réflexion, de la pensée éclairée par la prière. Son contact intime avec le Christ a toujours accompagné son travail de ministre général et c'est pourquoi il a composé une série d'écrits théologico-mystiques, qui expriment l'âme de son gouvernement et manifestent l'intention de conduire intérieurement l'Ordre, c'est-à-dire de gouverner non seulement par les ordres et les structures, mais en guidant et en éclairant les âmes, en les orientant vers le Christ.

 

 

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30 mai 2011 1 30 /05 /mai /2011 17:14

Audience Générale du Pape Benoît XVI sur Saint Bonaventure, le 3 mars 2010 (1ère partie).

 

Chers frères et sœurs,

 

Aujourd'hui, je voudrais parler de Saint Bonaventure de Bagnoregio. Je vous avoue qu'en vous proposant ce thème, je ressens une certaine nostalgie, car je repense aux recherches que, jeune chercheur, j'ai conduites précisément sur cet auteur, qui m'est particulièrement cher. Sa connaissance a beaucoup influencé ma formation. C'est avec une grande joie que je me suis rendu en pèlerinage, il y a quelques mois, sur son lieu de naissance, Bagnoregio, petite ville italienne dans le Latium, qui conserve avec vénération sa mémoire.

 

Né probablement aux alentours de 1217 et mort en 1274, il vécut au XIIIe siècle, à une époque où la foi chrétienne, profondément imprégnée dans la culture et dans la société de l'Europe, inspira des œuvres durables dans le domaine de la littérature, des arts visuels, de la philosophie et de la théologie. Parmi les grandes figures chrétiennes qui contribuèrent à la composition de cette harmonie entre foi et culture se distingue précisément Bonaventure, homme d'action et de contemplation, de profonde piété et de prudence dans le gouvernement.

 

Il s'appelait Jean de Fidanza. Comme il le raconte lui-même, un épisode qui eut lieu alors qu'il était encore jeune garçon, marqua profondément sa vie. Il avait été frappé d'une grave maladie, et pas même son père, qui était médecin, espérait désormais pouvoir le sauver de la mort. Alors, sa mère eut recours à l'intercession de Saint François d'Assise, canonisé depuis peu. Et Jean guérit.

 

La figure du Poverello d'Assise lui devint encore plus familière quelques années plus tard, alors qu'il se trouvait à Paris, où il s'était rendu pour ses études. Il avait obtenu le diplôme de Maître d'art, que nous pourrions comparer à celui d'un prestigieux lycée de notre époque. A ce moment, comme tant de jeunes du passé et également d'aujourd'hui, Jean se posa une question cruciale : « Que dois-je faire de ma vie? ». Fasciné par le témoignage de ferveur et de radicalité évangélique des frères mineurs, qui étaient arrivés à Paris en 1219, Jean frappa aux portes du couvent franciscain de la ville et demanda à être accueilli dans la grande famille des disciples de Saint François. De nombreuses années plus tard, il expliqua les raisons de son choix : chez Saint François et dans le mouvement auquel il avait donné naissance, il reconnaissait l'action du Christ. Il écrivait ceci dans une lettre adressée à un autre frère : « Je confesse devant Dieu que la raison qui m'a fait aimer le plus la vie du bienheureux François est qu'elle ressemble aux débuts et à la croissance de l'Eglise. L'Eglise commença avec de simples pêcheurs, et s'enrichit par la suite de docteurs très illustres et sages ; la religion du bienheureux François n'a pas été établie par la prudence des hommes mais par le Christ ».

 

C'est pourquoi, autour de l'an 1243, Jean revêtit l'habit franciscain et prit le nom de Bonaventure. Il fut immédiatement dirigé vers les études, et fréquenta la Faculté de théologie de l'université de Paris, suivant un ensemble de cours de très haut niveau. Il obtint les divers titres requis pour la carrière académique, ceux de « bachelier biblique » et de « bachelier sentencier ». Ainsi, Bonaventure étudia-t-il en profondeur l'Ecriture Sainte, les Sentences de Pierre Lombard, le manuel de théologie de l'époque, ainsi que les plus importants auteurs de théologie, et, au contact des maîtres et des étudiants qui affluaient à Paris de toute l'Europe, il mûrit sa propre réflexion personnelle et une sensibilité spirituelle de grande valeur qu'au cours des années suivantes, il sut transcrire dans ses œuvres et dans ses sermons, devenant ainsi l'un des théologiens les plus importants de l'Histoire de l'Eglise. Il est significatif de rappeler le titre de la thèse qu'il défendit pour être habilité à l'enseignement de la théologie, la licentia ubique docendi, comme l'on disait alors. Sa dissertation avait pour titre « Questions sur la connaissance du Christ ». Cet argument montre le rôle central que le Christ joua toujours dans la vie et dans l'enseignement de Bonaventure. Nous pouvons dire sans aucun doute que toute sa pensée fut profondément christocentrique.

 

Dans ces années-là, à Paris, la ville d'adoption de Bonaventure, se répandait une violente polémique contre les frères mineurs de Saint François d'Assise et les frères prédicateurs de Saint Dominique de Guzman. On leur contestait le droit d'enseigner à l'Université, et l'on allait jusqu'à mettre en doute l'authenticité de leur vie consacrée. Assurément, les changements introduits par les ordres mendiants dans la manière d'envisager la vie religieuse, dont j'ai parlé dans les catéchèses précédentes, étaient tellement innovateurs que tous ne parvenaient pas à les comprendre. S'ajoutaient ensuite, comme cela arrive parfois même entre des personnes sincèrement religieuses, des motifs de faiblesse humaine, comme l'envie et la jalousie. Bonaventure, même s'il était encerclé par l'opposition des autres maîtres universitaires, avait déjà commencé à enseigner à la chaire de théologie des franciscains et, pour répondre à qui contestait les ordres mendiants, il composa un écrit intitulé « La perfection évangélique ». Dans cet écrit, il démontre comment les ordres mendiants, spécialement les frères mineurs, en pratiquant les vœux de chasteté et d'obéissance, suivaient les conseils de l'Evangile lui-même. Au-delà de ces circonstances historiques, l'enseignement fourni par Bonaventure dans son œuvre et dans sa vie demeure toujours actuel : l'Eglise est rendue plus lumineuse et belle par la fidélité à la vocation de ses fils et de ses filles qui non seulement mettent en pratique les préceptes évangéliques mais, par la grâce de Dieu, sont appelés à en observer les conseils et témoignent ainsi, à travers leur style de vie pauvre, chaste et obéissant, que l'Evangile est une source de joie et de perfection.

 

Le conflit retomba, au moins un certain temps, et, grâce à l'intervention personnelle du Pape Alexandre IV, en 1257, Bonaventure fut reconnu officiellement comme docteur et maître de l'université parisienne. Il dut toutefois renoncer à cette charge prestigieuse, parce que la même année, le Chapitre général de l'ordre l'élut ministre général.

 

Il exerça cette fonction pendant dix-sept ans avec sagesse et dévouement, visitant les provinces, écrivant aux frères, intervenant parfois avec une certaine sévérité pour éliminer les abus. Quand Bonaventure commença ce service, l'Ordre des frères mineurs s'était développé de manière prodigieuse : il y avait plus de 30.000 frères dispersés dans tout l'Occident avec des présences missionnaires en Afrique du Nord, au Moyen-Orient, et également à Pékin. Il fallait consolider cette expansion et surtout lui conférer, en pleine fidélité au charisme de François, une unité d'action et d'esprit. En effet, parmi les disciples du Saint d'Assise, on enregistrait différentes façons d'interpréter le message et il existait réellement le risque d'une fracture interne. Pour éviter ce danger, le chapitre général de l'Ordre, qui eut lieu à Narbonne en 1260, accepta et ratifia un texte proposé par Bonaventure, dans lequel on recueillait et on unifiait les normes qui réglementaient la vie quotidienne des frères mineurs. Bonaventure avait toutefois l'intuition que les dispositions législatives, bien qu'elles fussent inspirées par la sagesse et la modération, n'étaient pas suffisantes à assurer la communion de l'esprit et des cœurs. Il fallait partager les mêmes idéaux et les mêmes motivations. C'est pour cette raison que Bonaventure voulut présenter le charisme authentique de François, sa vie et son enseignement. Il rassembla donc avec un grand zèle des documents concernant le Poverello et il écouta avec attention les souvenirs de ceux qui avaient directement connu François. Il en naquit une biographie, historiquement bien fondée, du Saint d'Assise, intitulée « Legenda Maior », rédigée également sous forme plus brève, et donc appelée « Legenda Minor ». Le mot latin, à la différence du mot italien, n'indique pas un fruit de l'imagination, mais, au contraire, « Legenda » signifie un texte faisant autorité, « à lire » de manière officielle. En effet, le chapitre des frères mineurs de 1263, qui s'était réuni à Pise, reconnut dans la biographie de Saint Bonaventure le portrait le plus fidèle du fondateur et celle-ci devint, ainsi, la biographie officielle du Saint.

 

Quelle est l'image de François qui ressort du cœur et de la plume de son pieux fils et successeur, Saint Bonaventure? Le point essentiel : François est un alter Christus, un homme qui a cherché passionnément le Christ. Dans l'amour qui pousse à l'imitation, il s'est conformé entièrement à Lui. Bonaventure indiquait cet idéal vivant à tous les disciples de François. Cet idéal, valable pour chaque chrétien, hier, aujourd'hui et à jamais, a été indiqué comme programme également pour l'Eglise du Troisième millénaire par mon prédécesseur, le vénérable Jean-Paul II. Ce programme, écrivait-il dans la Lettre Novo millennio ineunte, est centré « sur le Christ lui-même, qu'il faut connaître, aimer, imiter, pour vivre en lui la vie trinitaire et pour transformer avec lui l'Histoire jusqu'à son achèvement dans la Jérusalem céleste » (n. 29).

 

En 1273, la vie de Saint Bonaventure connut un autre changement. Le Pape Grégoire X voulut le consacrer évêque et le nommer cardinal. Il lui demanda également de préparer un événement ecclésial très important : le IIe concile œcuménique de Lyon, qui avait pour but le rétablissement de la communion entre l'Eglise latine et l'Eglise grecque. Il se consacra à cette tâche avec diligence, mais il ne réussit pas à voir la conclusion de cette assise œcuménique, car il mourut pendant son déroulement. Un notaire pontifical anonyme composa un éloge de Bonaventure, qui nous offre un portrait conclusif de ce grand Saint et excellent théologien : « Un homme bon, affable, pieux et miséricordieux, plein de vertus, aimé de Dieu et des hommes... En effet, Dieu lui avait donné une telle grâce, que tous ceux qui le voyaient étaient envahis par un amour que le cœur ne pouvait pas cacher ».

 

Recueillons l'héritage de ce grand Docteur de l'Eglise, qui nous rappelle le sens de notre vie avec les paroles suivantes : « Sur la terre... nous pouvons contempler l'immensité divine à travers le raisonnement et l'admiration ; dans la patrie céleste, en revanche, à travers la vision, lorsque nous serons faits semblables à Dieu, et à travers l'extase... nous entrerons dans la joie de Dieu ».

 

 

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27 mai 2011 5 27 /05 /mai /2011 16:51

voyage portugalVoyage Apostolique du Pape Benoît XVI au Portugal – Homélie prononcée lors de la Messe célébrée à Porto, le 14 mai 2010.

 

Messe à Porto (14 mai 2010)

 

Chers Frères et Sœurs,

 

« Il est écrit au livre des Psaumes : […] que sa charge passe à un autre. […] Il faut donc que l’un d’entre eux devienne avec nous témoin de sa résurrection » (Ac 1, 20-22). C’est ce que dit Pierre, lisant et interprétant la parole de Dieu parmi ses frères, réunis au Cénacle après l’Ascension de Jésus au ciel. Matthias fut choisi, lui qui avait été témoin de la vie publique de Jésus et de sa victoire sur la mort, lui restant fidèle jusqu’au bout, malgré l’abandon de beaucoup. La « disproportion » entre les forces en présence qui aujourd’hui nous effraie, étonnait déjà il y a 2000 ans ceux qui voyaient et écoutaient le Christ. Il était seul, des berges du Lac de Galilée jusqu’aux places de Jérusalem, seul ou presque seul dans les moments décisifs : seul en union avec le Père, seul dans la force de l’Esprit. Pourtant, à la fin, du même amour qui a créé le monde, la nouveauté du Règne a poussé comme une petite graine qui germe de la terre, comme une étincelle de lumière qui jaillit dans les ténèbres, comme l’aube d’un jour sans crépuscule : c’est le Christ ressuscité. Et il est apparu à ses amis, en leur montrant la nécessité de la Croix pour parvenir à la résurrection.

 

Ce jour-là, Pierre cherchait un témoin de tout cela. Deux ayant été présentés, le Ciel a désigné « Matthias, qui fut associé aux onze Apôtres » (Ac 1, 26). Aujourd’hui nous célébrons sa glorieuse mémoire en cette « Cité invaincue », qui a revêtu des habits de fête pour accueillir le Successeur de Pierre. Je rends grâce à Dieu de m’avoir conduit parmi vous, pour vous rencontrer autour de l’autel. Je vous adresse un salut cordial à vous, frères et amis de la ville et du diocèse de Porto, à ceux qui sont venus de la Province ecclésiastique du nord du Portugal et aussi de la proche Espagne, et à tous les autres qui sont en communion physique ou spirituelle avec notre assemblée liturgique (…).

 

« Il faut que l’un d’entre eux devienne avec nous témoin de sa résurrection », disait Pierre. Et son Successeur actuel répète à chacun de vous : Mes frères et sœurs, il faut que vous deveniez avec moi des témoins de la résurrection de Jésus. En effet, si vous, vous n’êtes pas ses témoins dans votre milieu de vie, qui le sera à votre place ? Le chrétien est, dans l’Église et avec l’Église, un missionnaire du Christ envoyé dans le monde. C’est là la mission qu’on ne peut différer de toute communauté ecclésiale : recevoir de Dieu le Père et offrir au monde le Christ ressuscité, afin que toute situation d’affaiblissement et de mort soit transformée, par l’Esprit Saint, en occasion de croissance et de vie. Dans ce but, dans toute célébration eucharistique, nous écouterons plus attentivement la Parole du Christ et nous goûterons assidûment le Pain de sa présence. Cela fera de nous des témoins et, plus encore, des porteurs de Jésus ressuscité dans le monde, l’apportant aux divers secteurs de la société et à tous ceux qui y vivent et y travaillent, répandant cette « vie en abondance » (cf. Jn 10, 10), qu’il nous a gagnée par sa Croix et sa résurrection et qui rassasie les aspirations les plus légitimes du cœur humain.

 

Nous n’imposons rien, mais nous proposons toujours, comme Pierre nous le recommande dans une de ses lettres : « Traitez toujours saintement dans vos cœurs le Seigneur Christ, toujours prêts à vous expliquer devant tous ceux qui vous demandent de rendre compte de l’espérance qui est en vous » (1 P 3, 15). Et en définitive, tous le demandent, même ceux qui semblent ne pas le demander. Par expérience personnelle et communautaire, nous savons bien que c’est Jésus, celui que tous attendent. En effet, les attentes les plus profondes du monde et les grandes certitudes de l’Évangile se rencontrent dans la mission irrécusable qui nous revient puisque « sans Dieu l’homme ne sait où aller et ne parvient même pas à comprendre qui il est. Face aux énormes problèmes du développement des peuples qui nous pousseraient presque au découragement et au défaitisme, la parole du Seigneur Jésus Christ vient à notre aide en nous rendant conscients de ce fait que : ‘Sans moi, vous ne pouvez rien faire’ (Jn 15, 5) ; elle nous encourage : ‘Je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde’ (Mt 28, 20) » (Benoît XVI, Enc. Caritas in veritate, n. 78).

 

Toutefois, si cette certitude nous console et nous tranquillise, elle ne nous dispense pas d’aller à la rencontre des autres. Nous devons vaincre la tentation de nous limiter à ce que nous avons encore, ou que nous estimons avoir, de nôtre et d’assuré : ce serait à terme une mort, quant à la présence de l’Église dans le monde, laquelle, d’ailleurs, ne peut seulement être que missionnaire dans le mouvement d’effusion de l’Esprit. Depuis ses origines, le peuple chrétien a perçu avec clarté l’importance de communiquer la Bonne Nouvelle de Jésus à tous ceux qui ne le connaissaient pas encore. Au cours de ces dernières années, le cadre anthropologique, culturel, social et religieux de l’humanité a changé : aujourd’hui l’Église est appelée à affronter de nouveaux défis et elle est disposée à dialoguer avec les diverses cultures et les religions, cherchant à construire avec toute personne de bonne volonté la cohabitation pacifique des peuples. Le champ de la mission ad gentes se présente aujourd’hui notablement élargi et il ne peut être défini seulement sur la base de considérations géographiques : en effet, nous sommes attendus non seulement par les peuples non chrétiens et les terres lointaines, mais aussi par les milieux socio-culturels et surtout par les cœurs qui sont les véritables destinataires de l’action missionnaire du peuple de Dieu.

 

Il s’agit d’un mandat dont l’accomplissement doit progresser « par la même route qu’a suivie le Christ, c'est-à-dire par la route de la pauvreté, de l’obéissance, du service et de l’immolation de soi jusqu’à la mort, dont il est sorti victorieux par sa résurrection » (Décret Ad gentes, n. 5). Oui ! Nous sommes appelés à servir l’humanité de notre temps, comptant uniquement sur Jésus, en nous laissant éclairer par sa Parole : « Ce n’est pas vous qui m’avez choisi, c’est moi qui vous ai choisis et établis, afin que vous partiez, que vous portiez du fruit, et que votre fruit demeure » (Jn, 15, 16). Que de temps perdu, que de travail renvoyé à plus tard sur ce point par inadvertance ! Tout se définit à partir du Christ, quant à l’origine et à l’efficacité de la mission : la mission nous la recevons toujours du Christ, qui nous a fait connaître ce qu’il a entendu de son Père, et nous y sommes engagés par l’Esprit, dans l’Église. Comme l’Église elle-même, œuvre du Christ et de son Esprit, il s’agit de renouveler la face de la terre en partant de Dieu, toujours et seulement de Dieu !

 

Chers frères et amis de Porto, levez les yeux vers Celle que vous avez choisie comme patronne de la ville, Notre Dame de Vandoma. L’Ange de l’Annonciation a salué Marie comme « pleine de grâce », signifiant par cette expression que son cœur et sa vie étaient totalement ouverts à Dieu et donc complètement remplis de sa grâce. Qu’Elle vous aide à faire de vous-mêmes un « oui » libre et plein à la grâce de Dieu, afin que vous puissiez être renouvelés et renouveler l’humanité par la lumière et la joie de l’Esprit Saint.  

 

 

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26 mai 2011 4 26 /05 /mai /2011 18:05

voyage portugalVoyage Apostolique du Pape Benoît XVI au Portugal – Discours aux évêques du Portugal, à Fatima le 13 mai 2010.

 

Rencontre avec les évêques du Portugal

 

Vénérables et chers Frères dans l’Épiscopat,

 

Je rends grâce à Dieu pour l’opportunité qu’il me donne de vous rencontrer tous ici dans le cœur spirituel du Portugal qu’est le sanctuaire de Fatima, où une foule de pèlerins provenant des endroits les plus variés de la terre, cherchent à retrouver ou à renforcer en eux-mêmes la certitude du Ciel. Parmi eux, se trouve le Successeur de Pierre qui est venu de Rome en réponse aux invitations répétées qu’il a reçues et poussé par un devoir de reconnaissance à la Vierge Marie. En effet, celle-ci a transmis ici même, aux voyants et aux pèlerins, un amour intense pour le Saint-Père, qui a fructifié dans la prière fervente d’une multitude de personnes sous la conduite de Jésus : Pierre, « j’ai prié pour toi, afin que ta foi ne sombre pas. Toi donc, quand tu seras revenu, affermis tes frères » (Lc 22,32).

 

Comme vous l’entendez, le Pape a besoin de s’ouvrir toujours davantage au mystère de la Croix, en l’embrassant comme l’unique espérance et le moyen ultime pour gagner et réunir dans le Crucifié tous ses frères et sœurs en humanité. Obéissant à la Parole de Dieu, il est appelé à vivre non pas pour lui-même mais pour rendre Dieu présent dans le monde. Je suis réconforté par la détermination avec laquelle vous aussi, vous me suivez de près sans rien craindre d’autre que la perte du Salut éternel de votre peuple, comme le démontrent bien les paroles par lesquelles Mgr Jorge Ortiga a voulu saluer ma venue parmi vous et témoigner de l’inconditionnelle fidélité des Évêques du Portugal au Successeur de Pierre. Je vous remercie de tout cœur. Merci aussi pour tout le dévouement avec lequel vous avez organisé ma Visite. Que Dieu vous récompense, en répandant en abondance sur vous et sur vos diocèses l’Esprit Saint, afin que vous puissiez, d’un seul cœur et d’une seule âme, porter à terme l’objectif pastoral que vous vous êtes fixé, c’est-à-dire, celui d’offrir à chaque fidèle une initiation chrétienne exigeante et belle, qui transmette l’intégrité de la foi et de la spiritualité, enracinée dans l’Évangile et capable de former des fidèles agissants et libres dans la vie publique.

 

En vérité, les temps dans lesquels nous vivons exigent un nouveau dynamisme missionnaire des chrétiens, appelés à former un laïcat mûr qui s’identifie à l’Église et solidaire de la transformation complexe du monde. Il faut d’authentiques témoins de Jésus Christ, surtout dans ces milieux humains où le silence de la foi est plus grand et plus profond : les hommes politiques, les intellectuels, les professionnels de la communication qui professent et promeuvent une orientation culturelle unique, en méprisant la dimension religieuse et contemplative de la vie. Dans ces milieux, il y a des croyants honteux de leur foi qui prêtent leur concours au sécularisme, qui fait obstacle à l’inspiration chrétienne. Dans le même temps, Frères bien-aimés, combien, dans ces milieux, défendent avec courage une pensée catholique vigoureuse, fidèle au Magistère ; qu’ils continuent à bénéficier de vos encouragements et de votre parole éclairante pour vivre, en fidèles laïcs, dans la liberté chrétienne.

 

Sans bâillon, maintenez vive la dimension prophétique dans l’Histoire du monde actuel, parce que « la parole de Dieu n’est pas enchaînée » (2 Tm 2,9). Les personnes réclament la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, qui donne sens à leur vie et sauvegarde leur dignité. En qualité de premiers évangélisateurs, il vous sera utile de connaître et de comprendre les diverses tendances sociales et culturelles, d’évaluer les carences spirituelles et de disposer efficacement les ressources pastorales ; néanmoins, ce qui est décisif, c’est de réussir à inculquer chez toute personne qui évangélise un vrai désir de sainteté, et la conscience que tout résultat dépend essentiellement de l’union avec le Christ et de l’action de son Esprit.

 

En effet, quand aux yeux de beaucoup, la foi catholique n’est plus le patrimoine commun de la société et que, souvent, on la regarde comme une graine étouffée et supplantée par les ‘idoles’ et par les maîtres de ce monde, elle pourra très difficilement toucher les cœurs à travers de simples discours ou des rappels moraux, et encore moins par des allusions générales aux valeurs chrétiennes. Le rappel courageux et intégral des principes est essentiel et indispensable ; toutefois, la simple énonciation du message ne va pas jusqu’au fond du cœur de la personne, ne touche pas sa liberté, ne transforme pas sa vie. Ce qui séduit surtout, c’est la rencontre avec les personnes croyantes qui, par leur foi, attirent vers la grâce du Christ, en Lui rendant témoignage. Je me souviens de ces paroles du Pape Jean-Paul II : « L’Église a besoin surtout de grands courants, mouvements et témoignages de sainteté parmi les ‘fidèles’, parce que c’est de la sainteté que naît tout renouveau authentique de l’Église, tout enrichissement authentique de l’intelligence de la foi et de la suite du Christ, une ré-actualisation vitale et féconde du christianisme dans la rencontre avec les besoins des hommes, une forme renouvelée de présence au cœur de l’existence humaine et de la culture des nations » (Discours pour le XXe anniversaire du Décret conciliaire ‘Apostolatum actuositatem’, 18 novembre 1985).

 

Certains pourraient dire : « ‘l’Église a besoin de grands courants, de mouvements et de témoignages de sainteté…’ mais il n’y en a pas ! » À ce sujet, je vous confesse l’agréable surprise que j’ai eue dans la prise de contact avec les mouvements et les nouvelles communautés ecclésiales. En les observant, j’ai eu la joie et la grâce de voir comment, en un moment de fatigue pour l’Église, en un moment où l’on parlait d’un « hiver de l’Église », l’Esprit Saint suscitait un nouveau printemps, faisant se réveiller chez les jeunes et chez les adultes la joie d’être chrétiens, de vivre au sein de l’Église, qui est le Corps vivant du Christ. Grâce aux charismes, la radicalité de l’Évangile, le contenu objectif de la foi, l’influx vivant de sa Tradition sont communiqués de façon convaincante et sont accueillis comme une expérience personnelle, c’est-à-dire comme une adhésion de la liberté à l’événement présent du Christ.

 

C’est une condition nécessaire, naturellement, que ces nouvelles réalités veuillent vivre au sein de l’Église commune, tout en leur ménageant des espaces pour leur vie propre, de telle façon que celles-ci soient ensuite profitables à toutes les autres. Les porteurs d’un charisme particulier doivent se sentir fondamentalement responsables de la communion, de la foi commune de l’Église et doivent se soumettre à la direction des Pasteurs. Ce sont eux qui doivent garantir l’ecclésialité des mouvements. Les Pasteurs ne sont pas seulement des personnes qui occupent une charge, mais ils sont eux-mêmes porteurs de charismes, ils sont responsables de l’ouverture de l’Église à l’action de l’Esprit Saint. Nous, Évêques, en vertu du sacrement, nous sommes oints par l’Esprit Saint et, par conséquent, le sacrement garantit aussi l’ouverture à ses dons. Ainsi, d’une part, nous devons éprouver la responsabilité d’accueillir ces impulsions qui sont des dons pour l’Église et qui lui confèrent une nouvelle vitalité ; mais, d’autre part, nous devons aussi aider les mouvements à trouver la voie juste, en faisant des corrections avec esprit de compréhension – cette compréhension spirituelle et humaine qui sait conjuguer conduite, reconnaissance et une certaine ouverture et disponibilité à apprendre.

  

 

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25 mai 2011 3 25 /05 /mai /2011 12:01

voyage portugalVoyage Apostolique du Pape Benoît XVI au Portugal – Discours aux organisations de la pastorale sociale, à l’Eglise de la Trinité à Fatima, le 13 mai 2010.

 

Chers Frères et amis,

 

Vous avez entendu Jésus dire : « Va, et toi aussi fais de même » (Lc 10, 37). Il nous exhorte à faire nôtre l’attitude du Bon Samaritain, dont l’exemple vient d’être proclamé, face aux situations où l’aide fraternelle fait défaut. Et quelle est cette attitude ? « C’est ‘un cœur qui voit’. Ce cœur voit où l’amour est nécessaire et il agit en conséquence » (Benoît XVI, Enc. Deus caritas est, n. 31). C’est ce qu’a fait le Bon Samaritain. Jésus ne se limite pas à exhorter ; comme l’enseignent les Saints Pères de l’Eglise, le Bon Samaritain c’est Lui, qui se fait proche de tout homme, et « verse sur ses blessures l’huile de la consolation et le vin de l’espérance » (Préface commune VIII), qui le conduit à l’auberge, qui est l’Église, où il le fait soigner, le confiant à ses ministres et payant en personne, par avance, pour sa guérison. « Va, et toi aussi fais de même ». L’amour inconditionnel de Jésus qui nous a guéris devra maintenant se transformer en amour donné gratuitement et généreusement, à travers la justice et la charité, si nous voulons vivre avec un cœur de Bon Samaritain.

 

J’éprouve une grande joie à vous rencontrer en ce lieu béni que Dieu s’est choisi pour rappeler à l’humanité, par la Vierge, ses desseins d’amour miséricordieux. Je salue avec grande amitié toutes les personnes ici présentes ainsi que les institutions auxquelles elles appartiennent, dans la diversité des visages qui se trouvent unis dans la réflexion sur les questions sociales et surtout dans la pratique de la compassion envers les pauvres, les malades, les détenus, ceux qui vivent seuls et abandonnés, les personnes handicapées, les enfants et les personnes âgées, les migrants, les personnes sans emploi et toutes celles qui connaissent des besoins qui abiment leur dignité de personnes libres. Merci, Monseigneur Carlos Azevedo, pour l’hommage de communion et de fidélité à l’Église et au Pape que vous avez voulu m’offrir aussi bien de la part de cette assemblée de la charité que de la Commission épiscopale de Pastorale sociale que vous présidez et qui encourage sans cesse ces grandes semailles de bonnes œuvres à travers tout le Portugal. Conscients, en tant qu’Église, de ne pas être en mesure d’offrir des solutions pratiques à chaque problème concret, et dépourvus de tout type de pouvoir, déterminés à servir le bien commun, vous êtes prêts à aider et à offrir les moyens du salut à tous.

 

Chers frères et sœurs qui opérez dans le vaste monde de l’entraide, « le Christ nous révèle que ‘Dieu est amour’ (1 Jn 4, 8) et il nous enseigne en même temps que la loi fondamentale de la perfection humaine, et donc de la transformation du monde, est le commandement nouveau de l’amour. A ceux qui croient à la divine charité, il apporte ainsi la certitude que la voie de l’amour est ouverte à tous les hommes » (Const. Gaudium et spes, n. 38). Le déroulement actuel de l’Histoire est fait de crises socio-économiques, culturelles et spirituelles, et il met en évidence l’opportunité d’un discernement orienté par la proposition créative du message social de l’Église. L’étude de sa doctrine sociale qui prend la charité comme principe et force principale, permettra de tracer un processus de développement humain intégral qui implique les profondeurs du cœur et vise à une plus vaste humanisation de la société (cf. Benoît XVI, Enc. Caritas in veritate, n. 20). Il ne s’agit pas d’une simple connaissance d’ordre intellectuel, mais d’une sagesse qui donne saveur et relief, offre une créativité aux voies d’appréhension et d’action visant à affronter une crise aussi vaste et complexe. Puissent les institutions de l’Église, avec toutes les organisations non ecclésiales, perfectionner leurs capacités d’étude et leurs orientations en vue d’une dynamique nouvelle et de grande ampleur, qui conduise vers « cette civilisation de l’amour dont Dieu a semé le germe dans chaque peuple et chaque culture » (ibid. n. 33).

 

Dans sa dimension sociale et politique, cette diaconie de la charité est le propre des fidèles laïcs, appelés à promouvoir organiquement le bien commun, la justice et à configurer de manière droite la vie sociale (cf. Benoît XVI, Enc. Deus caritas est, n. 29). Une des conclusions pastorales, qui ressortent de vos récentes réflexions, est de former une nouvelle génération de leaders serviteurs. Attirer de nouveaux acteurs laïcs dans ce domaine pastoral méritera certainement une attention particulière de la part des pasteurs, attentifs à l’avenir. Celui qui apprend de Dieu Amour sera immanquablement une personne pour les autres. En effet, « l’amour de Dieu se révèle dans la responsabilité envers autrui » (Benoît XVI, Enc. Spe salvi, n. 28). Unis au Christ dans sa consécration au Père, nous sommes saisis par sa compassion pour les multitudes qui demandent justice et solidarité et, comme le Bon Samaritain de la parabole, nous nous engageons à offrir des réponses concrètes et généreuses.

 

Souvent, cependant, il n’est pas facile d’arriver à une harmonie satisfaisante entre la vie spirituelle et l’activité apostolique. La pression exercée par la culture dominante, qui présente avec insistance un style de vie fondé sur la loi du plus fort, sur le gain facile et alléchant, finit par influencer notre mode de penser, nos projets et les perspectives de notre service, avec le risque de les vider de cette motivation de foi et d’espérance chrétiennes qui les avait suscités. Les nombreuses et pressantes demandes d’aide et de soutien que nous adressent les pauvres et les marginaux de la société nous poussent à chercher des solutions qui répondent à la logique de l’efficacité, de la visibilité et de la publicité. Toutefois, cette harmonie est absolument nécessaire, frères bien-aimés, pour pouvoir servir le Christ dans l’humanité qui vous attend. Dans ce monde divisé, s’impose à tous une profonde et authentique unité de cœur, d’esprit et d’action.

 

Parmi de nombreuses institutions sociales au service du bien commun, proche des populations nécessiteuses, on compte celles de l’Église catholique. Il faut que leur orientation soit claire, pour qu’elles adoptent une identité bien évidente : dans l’inspiration de leurs objectifs, dans le choix de leurs ressources humaines, dans leurs méthodes d’action, dans la qualité de leurs services, dans la gestion sérieuse et efficace de leurs moyens. La ferme identité des institutions est un réel service, d’un grand avantage pour ceux qui en bénéficient. Au-delà de l’identité tout en étant lié à elle, il est fondamental d’accorder à l’activité caritative chrétienne une autonomie et une indépendance à l’égard de la politique et des idéologies (cf. Benoît XVI, Enc. Deus caritas est, n. 31b), y compris dans la collaboration avec les organes de l’État pour atteindre des buts communs.

 

Que vos activités d’assistance, d’éducation ou de charité soient complétées par des projets de liberté qui promeuvent l’être humain, dans la recherche de la fraternité universelle. Se situe ici l’engagement urgent des chrétiens dans la défense des droits humains, attentifs à la totalité de la personne humaine dans ses diverses dimensions. J’exprime ma profonde appréciation pour toutes ces initiatives sociales et pastorales qui cherchent à lutter contre les mécanismes socio-économiques et culturels conduisant à l’avortement et qui tiennent clairement compte de la défense de la vie, de la réconciliation, et de la guérison des personnes blessées par le drame de l’avortement. Les initiatives qui ont pour but de sauvegarder les valeurs essentielles et premières de la vie, dès sa conception, et de la famille, fondée sur le mariage indissoluble entre un homme et une femme, aident à répondre à certains des défis les plus insidieux et les plus dangereux qui aujourd’hui se opposent au bien commun. Ces initiatives constituent, avec beaucoup d’autres formes d’engagement, des éléments essentiels pour la construction de la civilisation de l’amour.

 

Tout ceci s’intègre bien au message de la Vierge qui retentit en ce lieu : la pénitence, la prière, le pardon qui visent à la conversion des cœurs. C’est le chemin pour édifier la Civilisation de l’amour, dont Dieu a jeté les semences dans le cœur de tout homme et que la foi dans le Christ Sauveur fait germer.

 

 

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