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27 décembre 2010 1 27 /12 /décembre /2010 15:41

Extrait du discours du Pape Benoît XVI aux cardinaux et à la curie romaine, le 21 décembre 2009.

 

Messieurs les cardinaux,

vénérés frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,

chers frères et sœurs,

 

La solennité du Saint Noël […] est pour tous les chrétiens une occasion tout à fait particulière de rencontre et de communion. Cet Enfant que nous rencontrons à Bethléem nous invite à faire l'expérience de l'amour immense de Dieu, ce Dieu qui est descendu du ciel et s'est fait proche de chacun de nous pour faire de nous ses fils, membres de sa famille. Ce rendez-vous traditionnel de Noël du Successeur de Pierre avec ses plus proches collaborateurs constitue également une rencontre de famille, qui renforce les liens d'affection et de communion, pour former toujours plus ce « Cénacle permanent » consacré à la diffusion du Royaume de Dieu, comme cela vient d'être rappelé […].

 

Une autre année riche d'événements importants pour l'Eglise et pour le monde touche à son terme. Avec un regard rétrospectif empreint de gratitude, je voudrais en cette heure faire mémoire de quelques points-clés pour la vie ecclésiale. De l'Année de Saint Paul, nous sommes passés à l'Année sacerdotale. De la figure imposante de l'Apôtre des nations qui, frappé par la lumière du Christ ressuscité et par son appel, a apporté l'Evangile aux peuples du monde, nous sommes passés à la figure humble du curé d'Ars qui, pendant toute sa vie, est resté dans le petit village qui lui avait été confié et qui toutefois, précisément dans l'humilité de son service, a rendu largement visible dans le monde la bonté réconciliatrice de Dieu. A partir de ces deux figures se manifeste la vaste portée du ministère sacerdotal et il devient évident que c'est précisément ce qui est petit qui est grand et que, à travers le service apparemment petit d'un homme, Dieu peut accomplir de grandes choses, purifier et renouveler le monde de l'intérieur.

 

Pour l'Eglise, et pour moi personnellement, l'année qui se conclut a été placée en grande partie sous le signe de l'Afrique. Il y a eu avant tout le voyage au Cameroun et en Angola. Il a été émouvant pour moi de ressentir la grande cordialité avec laquelle le Successeur de Pierre, le Vicarius Christi, a été accueilli. La joie festive et l'affection cordiale de ceux qui sont venus à ma rencontre sur toutes les routes ne s'adressaient pas, justement, à un hôte quelconque. Dans la rencontre avec le Pape, on a pu percevoir l'Eglise universelle, la communauté qui embrasse le monde et qui est réunie par Dieu à travers le Christ — la communauté qui n'est pas fondée sur des intérêts humains, mais qui nous est offerte par l'attention bienveillante de Dieu pour nous. Tous ensemble, nous formons la famille de Dieu, frères et sœurs en vertu d'un unique Père : telle a été l'expérience vécue. Et on faisait l'expérience que l'attention pleine d'amour de Dieu dans le Christ pour nous n'appartient pas au passé et ne relève pas non plus de théories savantes, mais est une réalité tout à fait concrète ici et maintenant. C'est précisément Lui qui est au milieu de nous : c'est ce que nous avons perçu à travers le ministère du Successeur de Pierre. Ainsi, nous avons été élevés au-dessus du simple quotidien. Le ciel s'est ouvert, et c'est ce qui transforme un jour en une fête. Et c'est dans le même temps quelque chose de durable. Cela continue à être vrai, également dans la vie quotidienne, que le ciel n'est plus fermé ; que Dieu est proche ; que dans le Christ, nous appartenons tous les uns aux autres.

 

Le souvenir des célébrations liturgiques reste gravé de façon particulièrement profonde dans ma mémoire. Les célébrations de la Sainte Eucharistie ont été de véritables fêtes de la foi. Je voudrais mentionner deux éléments qui me semblent particulièrement importants. Il y avait avant tout une joie partagée, qui s'exprimait également à travers le corps, mais de façon disciplinée et guidée par la présence du Dieu vivant. Ceci indique déjà le deuxième élément : le sens du sacré, du mystère présent du Dieu vivant a façonné, pour ainsi dire, chaque geste. Le Seigneur est présent — le Créateur, Celui auquel tout appartient, dont nous provenons et vers lequel nous marchons. De façon spontanée me sont venues à l'esprit les paroles de Saint Cyprien qui, dans son commentaire au Notre Père, écrit : « Rappelons-nous que nous sommes sous le regard de Dieu posé sur nous. Nous devons plaire aux yeux de Dieu, tant par l'attitude de notre corps que par l'usage de notre voix » (De dom. or. 4 csel III 1, p. 269). Oui, cette conscience était présente : nous étions en présence de Dieu. De cela ne découle ni peur, ni inhibition, pas davantage une obéissance extérieure aux rubriques, et encore moins une façon de se mettre en évidence les uns devant les autres ou d'élever la voix de façon désordonnée. Il régnait plutôt ce que les Pères appellent « sobria ebrietas » :être remplis d'une joie qui demeure toutefois sobre et ordonnée, qui unit les personnes de l'intérieur, en les conduisant à la louange communautaire de Dieu, une louange qui suscite dans le même temps l'amour du prochain, la responsabilité réciproque.

 

Naturellement, la rencontre avec mes frères dans le ministère épiscopal et l'inauguration du synode pour l'Afrique à travers la remise de l'Instrumentum laboris,ont fait bien sûr partie du voyage en Afrique […]. A l'occasion de ma visite en Afrique, la force théologique et pastorale du primat pontifical comme point de convergence pour l'unité de la famille de Dieu a d'abord été rendu évidente. Au cours dusynode, est apparue encore plus fortement l'importance de la collégialité — de l'unité des évêques, qui reçoivent leur ministère précisément du fait qu'ils entrent dans la communauté des successeurs des Apôtres : chacun est évêque, successeur des Apôtres, uniquement dans la mesure où il appartient à la communauté de ceux dans lesquels se poursuit le Collegium Apostolorumdans l'unité avec Pierre et avec son successeur. Comme dans les liturgies en Afrique, puis de nouveau, à Saint-Pierre de Rome, le renouveau liturgique de Vatican II a pris forme de façon exemplaire, ainsi, dans la communion du synode, l'ecclésiologie du Concile a été vécue de façon très concrète. Les témoignages que nous avons pu écouter de la part des fidèles d'Afrique — des témoignages de souffrance et de réconciliation concrète dans les tragédies de l'histoire récente du continent — ont été également émouvants.

 

Le synode s'était proposé comme thème : l'Eglise en Afrique au service de la réconciliation, de la justice et de la paix. Il s'agit d'un thème théologique et surtout pastoral d'une actualité brûlante, mais qui pouvait également être pris à tort pour un thème politique. La tâche des évêques était de transformer la théologie en pastorale, c'est-à-dire en un ministère pastoral très concret, dans lequel les grandes visions de l'Ecriture Sainte et de la Tradition sont appliquées à l'œuvre des évêques et des prêtres à un moment et en un lieu déterminés. Mais il ne fallait pas pour cela céder à la tentation de prendre personnellement en main la politique et de pasteurs, se transformer en guides politiques. En effet, la question très concrète devant laquelle les pasteurs se trouvent continuellement, est précisément celle-ci : comment pouvons-nous être réalistes et pratiques, sans nous arroger une compétence politique qui ne nous revient pas? Nous pourrions également dire : il s'agissait de la question d'une laïcité positive, pratiquée et interprétée de façon juste. Il s'agit là également d'un thème fondamental de l'encyclique, publiée le jour de la fête des Saints Pierre et Paul, « Caritas in veritate », qui a de cette façon repris et développé plus avant la question qui concerne la place théologique et concrète de la doctrine sociale de l'Eglise.

 

 

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25 décembre 2010 6 25 /12 /décembre /2010 08:57

Message Urbi et Orbi du Pape Benoît XVI pour Noël, le 25 décembre 2009.

 

Chers frères et sœurs de Rome et du monde entier,

et vous tous, hommes et femmes aimés du Seigneur!

 

«Lux fulgebit hodie super nos,

Quia natus est nobis Dominus.

- Aujourd’hui, sur nous, la lumière va resplendir,

car le Seigneur nous est né ».

(Missel romain, Nativité du Seigneur – Messe de l’Aurore, Antienne d’ouverture).

 

La liturgie de la Messe de l’Aurore nous a rappelé que, désormais, la nuit est passée, le jour est avancé ; la lumière qui émane de la grotte de Bethléem resplendit sur nous.

 

Toutefois la Bible et la Liturgie ne nous parlent pas de la lumière naturelle, mais d’une autre lumière, spéciale, de quelque façon dirigée et orientée vers un ‘nous’, le même ‘nous’ pour lequel l’Enfant de Bethléem « est né ». Ce ‘nous’ c’est l’Église, la grande famille universelle des croyants dans le Christ, qui ont attendu avec espérance la nouvelle naissance du Sauveur et qui, aujourd’hui, célèbrent dans ce mystère l’actualité permanente de cet événement.

 

Au début, autour de la crèche de Bethléem, ce ‘nous’ était presque invisible aux yeux des hommes. Comme nous le rapporte l’Évangile de saint Luc, il comprenait, en plus de Marie et de Joseph, quelques humbles bergers qui arrivèrent à la grotte, après avoir été avertis par les anges. La lumière du premier Noël fut comme un feu allumé dans la nuit. Autour, tout était sombre, tandis que dans la grotte resplendissait « la vraie Lumière, qui éclaire tout homme » (Jn 1, 9). Toutefois tout se passa dans la simplicité et dans la discrétion, selon le style par lequel Dieu opère dans toute l’Histoire du Salut. Dieu aime allumer des lumières circonscrites, pour éclairer ensuite sur un vaste rayon. La Vérité, comme l’Amour, qui en sont le contenu, s’allument là où la lumière est accueillie, se répandant ensuite en cercles concentriques, presque par contact, dans les cœurs et dans les esprits de ceux qui, s’ouvrant librement à sa splendeur, deviennent à leur tour sources de lumière. C’est l’Histoire de l’Église qui commence son cheminement dans la pauvre grotte de Bethléem, et qui, à travers les siècles, devient Peuple et source de lumière pour l’humanité. Aujourd’hui aussi, à travers ceux qui vont à la rencontre de l’Enfant, Dieu allume encore des feux dans la nuit du monde pour appeler les hommes à reconnaître en Jésus le signe de sa présence salvatrice et libératrice et élargir le ‘nous’ des croyants dans le Christ à l’humanité tout entière.

 

Partout où il y a un ‘nous’ qui accueille l’amour de Dieu, là resplendit la lumière du Christ, même dans les situations les plus difficiles. L’Église, comme la Vierge Marie, offre au monde Jésus, le Fils qu’elle-même a reçu en don, et qui est venu libérer l’homme de l’esclavage du péché. Comme Marie, l’Église n’a pas peur, car cet Enfant est sa force. Mais elle ne le garde pas pour elle : elle l’offre à tous ceux qui le cherchent d’un cœur sincère, aux humbles de la terre et aux affligés, aux victimes de la violence, à ceux qui désirent ardemment le bien de la paix. Aujourd’hui aussi, pour la famille humaine profondément marquée par une grave crise économique, mais d’abord encore morale, et par les douloureuses blessures de guerres et de conflits, sous la forme du partage et de la fidélité à l’homme, l’Église répète avec les bergers : « Allons jusqu’à Bethléem » (Lc 2, 15), là nous trouverons notre espérance.

 

Le ‘nous’ de l’Église vit là où Jésus est né, en Terre Sainte, pour inviter ses habitants à abandonner toute logique de violence et de vengeance et à s’engager avec une vigueur renouvelée et avec générosité sur le chemin d’une coexistence pacifique. Le ‘nous’ de l’Église est présent dans les autres Pays du Moyen Orient. Comment ne pas penser à la situation tourmentée en Irak et à ce petit troupeau de chrétiens qui vit dans la Région? Il souffre parfois de violences et d’injustices mais il est toujours disposé à donner sa propre contribution à l’édification de la cohabitation civile contraire à la logique du conflit et du refus du voisin. Le ‘nous’ de l’Église opère au Sri Lanka, dans la Péninsule coréenne et aux Philippines, comme aussi en d’autres terres asiatiques, comme levain de réconciliation et de paix. Sur le continent africain, il ne cesse d’élever sa voix vers Dieu pour implorer la fin de toutes les exactions en République Démocratique du Congo. Il invite les habitants de la Guinée et du Niger au respect des droits de toute personne et au dialogue. À ceux de Madagascar, il demande de dépasser les divisions internes et de s’accueillir réciproquement. À tous, il rappelle qu’ils sont appelés à l’espérance, malgré les drames, les épreuves et les difficultés qui continuent de les affliger. En Europe et en Amérique septentrionale, le ‘nous’ de l’Église incite à dépasser la mentalité égoïste et techniciste, à promouvoir le bien commun et à respecter les personnes plus faibles, à commencer par celles qui ne sont pas encore nées. Au Honduras, il aide à reprendre le chemin institutionnel. Dans toute l’Amérique Latine, le ‘nous’ de l’Église est facteur identitaire, plénitude de vérité et de charité qu’aucune idéologie ne peut remplacer, appel au respect des droits inaliénables de toute personne et à son développement intégral, annonce de justice et de fraternité, source d’unité.

 

Fidèle au mandat de son Fondateur, l’Église est solidaire de ceux qui sont frappés par les calamités naturelles et par la pauvreté, également dans les sociétés opulentes. Face à l’exode de ceux qui émigrent de leur terre et qui sont poussés au loin par la faim, par l’intolérance ou par la dégradation environnementale, l’Église est une présence qui appelle à l’accueil. En un mot, l’Église annonce partout l’Évangile du Christ malgré les persécutions, les discriminations, les attaques et l’indifférence, parfois hostile, qui – quoi qu’il en soit – lui permettent de partager le sort de son Maître et Seigneur.

 

Chers frères et sœurs, quel grand don de faire partie d’une communion qui estpour tous! C’est la communion de la Sainte Trinité, du cœur de laquelle l’Emmanuel, Jésus, Dieu-avec-nous, est descendu dans le monde. Comme les bergers de Bethléem, contemplons pleins d’émerveillement et de gratitude ce mystère d’amour et de lumière! Joyeux Noël à tous!

 

 

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24 décembre 2010 5 24 /12 /décembre /2010 19:37

En cette nuit de Noël, je vous propose de méditer la magnifique homélie prononcée par le Pape Benoît XVI, lors de la Messe de minuit de la Solennité de la nativité, le 24 décembre 2009.

 

(Au début de la célébration, alors que le cortège faisait son entrée dans la basilique St Pierre de Rome, une femme souffrant de problèmes psychiatriques a franchi les barrières de sécurité et poussé violemment le Pape, le faisant chuter. Aidé du service d'ordre, le Pape a pu se relever et poursuivre son chemin vers l'autel).

 

Chers Frères et Sœurs,

 

« Un enfant nous est né, un fils nous a été donné » (Is 9, 5). Ce qu’Isaïe, regardant de loin vers l’avenir, dit à Israël comme consolation dans ses angoisses et dans l’obscurité, l’Ange, nimbé de lumière, l’annonce aux bergers comme présent : « Aujourd’hui vous est né un Sauveur, dans la ville de David. Il est le Messie, le Seigneur » (Lc 2, 11). Le Seigneur est présent. À partir de ce moment, Dieu est vraiment un « Dieu avec nous ». Il n’est plus le Dieu lointain qui, à travers la Création et au moyen de la conscience, peut de quelque façon être entrevu de loin. Il est entré dans le monde. Il est le Proche. Le Christ ressuscité l’a dit aux siens, à nous : « Et moi, je suis avec vous tous les jours jusqu’à la fin du monde » (Mt 28, 20). Pour vous est né le Sauveur : ce que l’Ange a annoncé aux bergers, Dieu aujourd’hui nous le rappelle par l’Évangile et par ses messagers. C’est une nouvelle qui ne peut nous laisser indifférents. Si elle est vraie, tout est changé. Si elle est vraie, elle me concerne moi aussi. Alors, comme les bergers, je dois dire moi aussi : Allez, je veux aller à Bethléem et voir la Parole qui, là, est advenue. L’Évangile ne nous raconte pas sans raison l’histoire des bergers. Ces derniers nous montrent comment répondre de façon juste à ce message qui nous est aussi adressé. Que nous disent alors ces premiers témoins de l’incarnation de Dieu?

 

Des bergers, il est dit avant tout qu’ils étaient des personnes vigilantes et que le message pouvait les rejoindre précisément parce qu’ils étaient éveillés. Nous devons nous réveiller, parce que le message est arrivé jusqu’à nous. Nous devons devenir des personnes vraiment vigilantes. Qu’est-ce que cela signifie? La différence entre celui qui rêve et celui qui est éveillé consiste tout d’abord dans le fait que celui rêve se trouve dans un monde particulier. Avec son moi, il est enfermé dans ce monde du rêve qui, justement, n’est que le sien et ne le relie pas aux autres. Se réveiller signifie sortir de cet état particulier du moi et entrer dans la réalité commune, dans la vérité qui, seule, nous unit tous. Les conflits dans le monde, les difficultés relationnelles proviennent du fait que nous sommes enfermés dans nos propres intérêts et dans nos opinions personnelles, dans notre minuscule monde intérieur. L’égoïsme, celui du groupe comme celui de l’individu, nous tient prisonnier de nos intérêts et de nos désirs, qui s’opposent à la vérité et nous séparent les uns des autres. Réveillez-vous, nous dit l’Évangile. Venez dehors pour entrer dans la grande vérité commune, dans la communion de l’unique Dieu. Se réveiller signifie ainsi développer sa sensibilité pour Dieu, pour les signes silencieux par lesquels il veut nous guider, pour les multiples indices de sa présence. Il y a des personnes qui disent être religieusement privées « d’oreille musicale ». L’aptitude à percevoir Dieu semble presque un don qui est refusé à certains. Et en effet – notre manière de penser et d’agir, la mentalité du monde contemporain, l’éventail de nos diverses expériences sont de nature à affaiblir la sensibilité à Dieu, à nous priver « d’oreille musicale » pour Lui. Et pourtant dans toute âme est présente, de façon cachée ou ouverte, l’attente de Dieu, la capacité de le rencontrer. Pour obtenir cette vigilance, cet éveil à l’essentiel, nous voulons prier, pour nous-mêmes et pour les autres, pour ceux qui semblent être privés « d’oreille musicale » et chez qui, cependant, le désir que Dieu se manifeste est vif. Le grand théologien Origène a dit : si j’avais eu la grâce de voir comme a vu Paul, je pourrais à présent (durant la Liturgie) contempler une multitude d’anges (cf. in Lc 23, 9). En effet – dans la sainte Liturgie, les anges de Dieu et les saints nous entourent. Le Seigneur lui-même est présent au milieu de nous. Seigneur, ouvre les yeux de nos cœurs, afin que nous devenions vigilants et voyants et qu’ainsi nous puissions aussi porter ta proximité aux autres.

 

Revenons à l’Évangile de Noël. Celui-ci nous raconte que les bergers, après avoir entendu le message de l’ange, se dirent l’un à l’autre : « Allons jusqu’à Bethléem … Ils y allèrent, sans délai » (Lc 2, 15ss). « Il se hâtèrent » dit littéralement le texte grec. Ce qui leur avait été annoncé était si important qu’ils devaient se mettre en route immédiatement. En effet, ce qui leur avait été dit là, allait absolument au-delà de l’ordinaire. Cela changeait le monde. Le Sauveur est né. Le Fils de David attendu est venu au monde dans sa ville. Que pouvait-il y avoir de plus important? Bien sûr, la curiosité les poussait aussi, mais par-dessus tout la fébrilité liée à la grande réalité qui leur avait été communiquée précisément à eux, des petits et des hommes apparemment insignifiants. Ils se pressèrent – sans hésitation. Dans notre vie ordinaire, il n’en va pas ainsi. La majorité des hommes ne considère pas comme prioritaires les affaires de Dieu, celles-ci ne nous pressent pas immédiatement. Et nous aussi, pour l’immense majorité, nous sommes disposés à les renvoyer à plus tard. Avant tout nous faisons ce qui, ici et maintenant, apparaît urgent. Dans la liste des priorités, Dieu se retrouve souvent presqu’à la dernière place. Il sera toujours temps – pense-t-on – de s’en préoccuper. L’Évangile nous dit : Dieu a la plus grande priorité. Si quelque chose dans notre vie mérite urgence, c’est, alors, seulement la cause de Dieu. Une maxime de la Règle de saint Benoît dit : « Ne rien placer avant l’œuvre de Dieu (c’est-à-dire avant l’office divin) ». La Liturgie est, pour les moines, la priorité première. Tout le reste vient après. Toutefois, au fond, cette phrase vaut pour chaque homme. Dieu est important, il est dans l’absolu la réalité la plus importante de notre vie. C’est précisément cette priorité que nous enseignent les bergers. Nous voulons apprendre d’eux à ne pas nous laisser écraser par toutes les choses urgentes de la vie quotidienne. Nous voulons apprendre d’eux la liberté intérieure de mettre au second plan les autres occupations – pour importantes qu’elles soient – pour nous approcher de Dieu, pour le laisser entrer dans notre vie et dans notre temps. Le temps consacré à Dieu et, à partir de Lui, à notre prochain n’est jamais du temps perdu. C’est le temps dans lequel nous vivons vraiment, dans lequel nous vivons en tant que personnes humaines.

 

Certains commentateurs font remarquer que ce sont, en premier lieu, les bergers, les âmes simples qui sont venus auprès de Jésus dans la crèche et qui ont pu rencontrer le Rédempteur du monde. Les sages venus d’Orient, les représentants de ceux qui ont rang et renommée, viendront beaucoup plus tard. Les commentateurs ajoutent : ceci va de soi. Les bergers, en effet, habitaient à côté. Ceux-ci n’avaient qu’à « traverser » (cf. Lc 2, 15) comme on parcourt une courte distance pour se rendre chez les voisins. Les savants, en revanche, habitaient loin. Ceux-ci devaient parcourir un chemin long et difficile, pour arriver à Bethléem. Et ils avaient besoin d’un guide et d’indication. Eh bien, aujourd’hui encore, existent des âmes simples et humbles qui demeurent toutes proches du Seigneur. Celles-ci sont, pour ainsi dire, ses voisins et peuvent facilement aller chez Lui. Mais la majeure partie de nous, hommes modernes, vit loin de Jésus Christ, de Celui qui s’est fait homme, du Dieu venu au milieu de nous. Nous vivons dans les réflexions, dans les affaires et dans les occupations qui nous absorbent entièrement et depuis lesquelles le chemin vers la crèche est très long. De multiples manières, Dieu doit sans cesse nous pousser et nous aider, afin que nous puissions sortir de l’enchevêtrement de nos pensées et de nos engagements et trouver le chemin qui va vers Lui. Mais pour tous, il y a un chemin. Pour tous, le Seigneur dispose des signes adaptés à chacun. Il nous appelle tous, pour que nous aussi puissions dire : Allons, « traversons », allons jusqu’à Bethléem – vers ce Dieu, qui est venu à notre rencontre. Oui, Dieu s’est mis en chemin vers nous. De nous-mêmes, nous ne pourrions le rejoindre. Le chemin dépasse nos forces. Mais Dieu est descendu. Il vient à notre rencontre. Il a parcouru la plus grande partie du chemin. Maintenant, il nous demande : Venez et voyez combien je vous aime. Venez et voyez que je suis ici. Transeamus usque Bethleem, dit la Bible latine. Allons ! Dépassons-nous nous-mêmes! Faisons-nous, de mille manières, voyageurs vers Dieu en étant intérieurement en route vers Lui. Mais aussi par des chemins très concrets – dans la Liturgie de l’Église, dans le service du prochain, où le Christ m’attend.

 

Écoutons encore une fois directement l’Évangile. Les bergers se dirent l’un à l’autre la raison pour laquelle ils se mettent en chemin : « Voyons ce qui est arrivé ». Littéralement, le texte grec dit : « Voyons cette Parole, qui, là, est advenue ». Oui, telle est la nouveauté de cette nuit : la Parole peut être contemplée. Puisqu’elle s’est faite chair. Ce Dieu dont on ne doit faire aucune image, parce que toute image ne pourrait que l’amoindrir, et même le déformer, ce Dieu s’est rendu, Lui-même, visible en Celui qui est sa véritable image, comme dit Paul (cf. 2 Co 4, 4; Col 1, 15). Dans la figure de Jésus Christ, dans toute sa vie et son agir, dans sa mort et dans sa résurrection, nous pouvons regarder la Parole de Dieu et donc le mystère du Dieu vivant Lui-même. Dieu est ainsi. L’ange avait dit aux bergers : « Voilà le signe qui vous est donné : vous trouverez un nouveau-né emmailloté et couché dans une mangeoire » (Lc 2, 12 ; cf. 16). Le signe de Dieu, le signe qui est donné aux bergers et à nous, n’est pas un miracle bouleversant. Le signe de Dieu est son humilité. Le signe de Dieu est qu’Il se fait petit ; devient enfant ; se laisse toucher et sollicite notre amour. Comme nous désirerions, nous les hommes, un signe différent, un signe imposant, irréfutable du pouvoir de Dieu et de sa grandeur. Mais son signe nous invite à la foi et à l’amour, et en conséquence, nous donne l’espérance : ainsi est Dieu. Il possède le pouvoir et Il est la Bonté. Il nous invite à devenir semblables à Lui. Oui, nous devenons semblables à Dieu, si nous nous laissons façonner par ce signe ; si nous apprenons, nous-mêmes, l’humilité et ainsi la vraie grandeur ; si nous renonçons à la violence et ne recourrons qu’aux seules armes de la vérité et de l’amour. Origène, suivant une parole de Jean-Baptiste, a vu l’expression de l’essence du paganisme dans le symbole de la pierre : le paganisme est un manque de sensibilité, il signifie un cœur de pierre qui est incapable d’aimer et de percevoir l’amour de Dieu. Origène dit des païens : « Privés de sentiment et de raison, ils se transforment en pierres et en bois » (in Lc22,9). Le Christ veut, cependant, nous donner un cœur de chair. Quand nous le voyons Lui, le Dieu qui est devenu enfant, notre cœur s’ouvre. Dans la Liturgie de la Sainte Nuit, Dieu vient à nous en tant qu’homme, afin que nous devenions vraiment humains. Écoutons encore Origène : « En effet, à quoi bon pour toi que le Christ soit venu une fois dans la chair, s’Il ne venait pas jusqu’en ton âme? Prions pour qu’il vienne quotidiennement à nous et que nous puissions dire : je vis, mais ce n’est plus moi, c’est le Christ qui vit en moi (Ga 2, 20) » (in Lc22,3).

 

Oui, nous voulons prier pour cela au cours de cette Sainte Nuit. Seigneur Jésus Christ, toi qui es né à Bethléem, viens à nous! Entre en moi, dans mon âme. Transforme-moi. Renouvelle-moi. Fais que moi et nous tous, de pierre et de bois, devenions des personnes vivantes, dans lesquelles ton amour se rende présent et le monde soit transformé.

 

 

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23 décembre 2010 4 23 /12 /décembre /2010 19:19

Audience Générale du Pape Benoît XVI du 23 décembre 2009.

 

Chers frères et sœurs,

 

Avec la neuvaine de Noël, que nous célébrons ces jours-ci, l'Eglise nous invite à vivre de manière intense et profonde la préparation de la Naissance du Sauveur, désormais imminente. Le désir, que nous portons tous dans le cœur, est que la prochaine fête de Noël nous offre, au milieu de l'activité frénétique de notre époque, une joie sereine et profonde pour nous faire toucher du doigt la volonté de notre Dieu et de nous donner un courage nouveau.

 

Pour mieux comprendre la signification du Noël du Seigneur, je voudrais évoquer brièvement l'origine historique de cette solennité. En effet, l'année liturgique de l'Eglise ne s'est pas développée au commencement en partant de la naissance du Christ, mais de la foi en sa résurrection. C'est pourquoi la fête la plus ancienne de la chrétienté n'est pas Noël, mais Pâques ; la résurrection du Christ fonde la foi chrétienne, elle est à la base de l'annonce de l'Evangile et elle fait naître l'Eglise. Etre chrétiens signifie donc vivre de manière pascale, en se laissant prendre dans la dynamique qui voit le jour avec le baptême et qui conduit à mourir au péché pour vivre avec Dieu (cf. Rm 6, 4).

 

Le premier à affirmer avec clarté que Jésus naquit le 25 décembre a été Hippolyte de Rome, dans son commentaire au Livre du prophète Daniel, écrit vers l'an 204. Certains exégètes remarquent ensuite que, ce jour-là, était célébrée la fête de la Consécration du Temple de Jérusalem, instituée par Judas Maccabée en 164 avant Jésus Christ. La coïncidence de dates signifierait alors qu'avec Jésus, apparu comme lumière de Dieu dans la nuit, se réalise véritablement la consécration du temple, l'Avènement de Dieu sur cette terre.

 

Dans la chrétienté, la fête de Noël a pris une forme définitive au IVe siècle, lorsqu'elle prit la place de la fête romaine du Sol invictus, le soleil invincible ; ainsi fut mis en évidence que la naissance du Christ est la victoire de la vraie lumière sur les ténèbres du mal et du péché. Toutefois, l'atmosphère spirituelle particulière et intense qui entoure Noël s'est développée au Moyen-Age, grâce à Saint François d'Assise, qui était profondément amoureux de l'homme Jésus, du Dieu-avec-nous. Son premier biographe, Thomas de Celano, dans la Vita seconda raconte que Saint François « plus que toutes les autres solennités, célébrait avec un ineffable soin le Noël de l'Enfant Jésus, et il appelait fête d'entre les fêtes le jour où Dieu, s'étant fait petit enfant, avait pris la tétée à un sein humain » (Sources franciscaines, n. 199, p. 492). C'est à cette dévotion particulière au mystère de l'Incarnation que doit son origine la fameuse célébration de Noël à Greccio. Elle fut probablement inspirée à Saint François par son pèlerinage en Terre Sainte et par la crèche de Sainte-Marie-Majeure à Rome. Ce qui animait le Poverello d'Assise était le désir de faire l'expérience, de manière concrète, vivante et actuelle, de l'humble grandeur de l'événement de la naissance de l'Enfant Jésus et d'en communiquer la joie à tous.

 

Dans la première biographie, Thomas de Celano parle de la nuit de la crèche de Greccio de manière vivante et touchante, en offrant une contribution décisive à la diffusion de la plus belle tradition de Noël, celle de la crèche. La nuit de Greccio, en effet, a redonné à la chrétienté l'intensité et la beauté de la fête de Noël, et a éduqué le Peuple de Dieu à en saisir le message le plus authentique, la chaleur particulière, et à aimer et adorer l'humanité du Christ. Cette approche particulière de Noël a offert à la foi chrétienne une nouvelle dimension. La Pâque avait concentré l'attention sur la puissance de Dieu qui vainc la mort, inaugure la vie nouvelle et enseigne à espérer dans le monde qui viendra. Avec Saint François et sa crèche étaient mis en évidence l'amour désarmé de Dieu, son humilité et sa bonté qui, dans l'Incarnation du Verbe, se manifeste aux hommes pour enseigner une nouvelle manière de vivre et d'aimer.

 

Thomas de Celano raconte que, en cette nuit de Noël, la grâce d'une vision merveilleuse fut accordée à François. Il vit couché immobile dans la mangeoire un petit enfant, qui fut réveillé du sommeil précisément par la proximité de François. Et il ajoute : « Cette vision n'était pas discordante des faits car, par l'œuvre de sa grâce qui agissait au moyen de son saint serviteur François, l'Enfant Jésus fut ressuscité dans le cœur de beaucoup de personnes qui l'avaient oublié, et il fut profondément imprimé dans leur mémoire pleine d'amour » (Vita prima, op. cit., n. 86, p. 307). Cette évocation décrit avec beaucoup de précision ce que la foi vivante et l'amour de François pour l'humanité du Christ ont transmis à la fête chrétienne de Noël : la découverte que Dieu se révèle sous la tendre apparence de l'Enfant Jésus. Grâce à Saint François, le peuple chrétien a pu percevoir qu'à Noël, Dieu est vraiment devenu l'« Emmanuel », le Dieu-avec-nous, dont ne nous sépare aucune barrière et aucune distance. Dans cet Enfant, Dieu est devenu si proche que nous pouvons le tutoyer et entretenir avec lui une relation confidentielle de profonde affection, de la même façon que nous le faisons avec un nouveau-né.

 

En effet, dans cet Enfant se manifeste Dieu-Amour : Dieu vient sans armes, sans la force, parce qu'il n'entend pas conquérir, pour ainsi dire, de l'extérieur, mais il entend plutôt être librement accueilli par l'homme ; Dieu se fait Enfant sans défense pour vaincre l'orgueil, la violence, la soif de possession de l'homme. En Jésus, Dieu a assumé cette condition pauvre et désarmante pour nous vaincre par l'amour et nous conduire à notre véritable identité. Nous ne devons pas oublier que le titre le plus grand de Jésus Christ est précisément celui de « Fils », Fils de Dieu ; la dignité divine est indiquée par un terme, qui prolonge la référence à l'humble condition de la mangeoire de Bethléem, bien que correspondant de manière unique à sa divinité, qui est la divinité du « Fils ».

 

En outre, sa condition d'Enfant nous indique comment nous pouvons rencontrer Dieu et jouir de sa présence. C'est à la lumière de Noël que nous pouvons comprendre les paroles de Jésus : « Si vous ne changez pas pour devenir comme les petits enfants, vous n'entrerez point dans le Royaume des cieux » (Mt 18, 3). Celui qui n'a pas compris le mystère de Noël, n'a pas compris l'élément décisif de l'existence chrétienne. Celui qui n'a pas accueilli Jésus avec le cœur d'un enfant, ne peut pas entrer dans le royaume des cieux : tel est ce que François a voulu rappeler à la chrétienté de son époque et de tous les temps, jusqu'à aujourd'hui.

 

Nous prions le Père pour qu'il accorde à notre cœur cette simplicité qui reconnaît le Seigneur dans l'Enfant, précisément comme le fit François à Greccio. Il pourrait alors aussi nous arriver ce que Thomas de Celano — se référant à l'expérience des pasteurs dans la Nuit Sainte (cf. Lc 2, 20) — raconte à propos de ceux qui furent présents à l'événement de Greccio : « Chacun s'en retourna chez lui empli d'une joie ineffable » (Vita prima, op. cit., n. 86, p. 479).

 

Tel est le vœu que j'adresse avec affection à vous tous, à vos familles et à ceux qui vous sont chers. Bon Noël à vous tous!

 

 

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18 décembre 2010 6 18 /12 /décembre /2010 13:27

Extrait du discours prononcé par le Pape Benoît XVI à M. Yves Gazzo, représentant de la Commission des Communautés européennes, près le Saint Siège, le 19 octobre 2009.

 

Monsieur l’Ambassadeur,

 

[…] Cette année, l’Europe commémore le 20ème anniversaire de la chute du mur de Berlin. J’ai voulu saluer de façon particulière cet événement en me déplaçant en République tchèque. Sur cette terre éprouvée par le joug d’une douloureuse idéologie, j’ai pu rendre grâce pour le don de la liberté recouvrée qui a permis au continent européen de retrouver son intégrité et son unité.

 

Vous venez de définir, Monsieur l’Ambassadeur, la réalité de l’Union européenne comme « une zone de paix et de stabilité qui réunit 27 États avec les mêmes valeurs fondamentales ». C’est une heureuse présentation. Il est juste cependant de relever que l’Union européenne ne s’est pas dotée de ces valeurs, mais que ce sont plutôt ces valeurs partagées qui l’ont fait naître et qui ont été comme la force de gravitation qui a attiré vers le noyau des Pays fondateurs les différentes Nations qui l’ont successivement rejointe au fil du temps. Ces valeurs sont le fruit d’une longue et sinueuse histoire dans laquelle, nul ne le niera, le Christianisme a joué un rôle de premier plan. L’égale dignité de tous les êtres humains, la liberté de l’acte de foi comme racine de toutes les autres libertés civiques, la paix comme élément décisif du bien commun, le développement humain – intellectuel, social et économique – en tant que vocation divine (cf. Caritas in Veritate, n. 16-19) et le sens de l’Histoire qui en découle sont autant d’éléments centraux de la Révélation chrétienne qui continuent de modeler la civilisation européenne.

 

Lorsque l’Église rappelle les racines chrétiennes de l’Europe, elle n’est pas en quête d’un statut privilégié pour elle-même. Elle veut faire œuvre de mémoire historique en rappelant d’abord une vérité – de plus en plus passée sous silence – à savoir l’inspiration décisivement chrétienne des Pères fondateurs de l’Union européenne. Plus profondément, elle désire manifester aussi que le socle de valeurs provient principalement de l’héritage chrétien qui continue encore aujourd’hui de le nourrir.

 

Ces valeurs communes ne constituent pas un agrégat anarchique ou aléatoire, mais elles forment un ensemble cohérent qui s’ordonne et s’articule, historiquement, à partir d’une vision anthropologique précise. L’Europe peut-elle omettre le principe organique originel de ces valeurs qui a révélé à l’homme à la fois son éminente dignité et le fait que sa vocation personnelle l’ouvre à tous les autres hommes avec qui il est appelé à ne constituer qu’une seule famille ? Se laisser aller à cet oubli, n’est-ce pas s’exposer au risque de voir ces grandes et belles valeurs entrer en concurrence ou en conflit les unes avec les autres ? Ou bien encore celles-ci ne risquent-elles pas d’être instrumentalisées par des individus et des groupes de pression désireux de faire valoir des intérêts particuliers au détriment d’un projet collectif ambitieux – que les européens attendent – ayant le souci du bien commun des habitants du Continent et de l’ensemble de notre monde ? Ce danger est d’ores et déjà perçu et dénoncé par nombre d’observateurs appartenant à des horizons très divers. Il est important que l’Europe ne laisse pas son modèle de civilisation se défaire, pan par pan. Son élan originel ne doit pas être étouffé par l’individualisme ou par l’utilitarisme.

 

Les immenses ressources intellectuelles, culturelles, économiques du continent continueront de porter du fruit si elles demeurent fécondées par la vision transcendante de la personne humaine qui constitue le trésor le plus précieux de l’héritage européen. Cette tradition humaniste, dans laquelle se reconnaissent beaucoup de familles de pensée très différentes parfois, rend l’Europe capable d’affronter les défis de demain et de répondre aux attentes de la population. Il s’agit principalement de la quête du juste et délicat équilibre entre l’efficacité économique et les exigences sociales, de la sauvegarde de l’environnement, et surtout de l’indispensable et nécessaire soutien à la vie humaine depuis la conception jusqu’à la mort naturelles et à la famille fondée sur le mariage entre un homme et une femme. L’Europe ne sera réellement elle-même que si elle sait conserver l’originalité qui a fait sa grandeur et qui est susceptible de faire d’elle, demain, un des acteurs majeurs dans la promotion du développement intégral des personnes que l’Église catholique considère comme l’unique voie susceptible de remédier aux déséquilibres présents de notre monde.

 

Pour toutes ces raisons, Monsieur l’Ambassadeur, le Saint-Siège suit avec respect et grande attention l’activité des Institutions européennes, souhaitant que celles-ci, par leur travail et leur créativité, honorent l’Europe qui est plus qu’un continent, mais une « maison spirituelle » (cf. Discours aux Autorités civiles et au Corps diplomatique, Prague, 26 septembre 2009). L’Église désire « accompagner » la construction de l’Union européenne. C’est pourquoi elle se permet de lui rappeler quelles sont les valeurs fondatrices et constitutives de la société européenne afin qu’elles puissent être promues pour le bien de tous.

 

 

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16 décembre 2010 4 16 /12 /décembre /2010 16:36

Extrait de l’homélie prononcée par le Pape Benoît XVI dans la Chapelle Papale à l’occasion de l’ouverture de la IIe Assemblée spéciale pour l’Afrique du Synode des Evêques, le 4 octobre 2009.

 

Chers frères dans l'épiscopat et dans le sacerdoce,

Mesdames et Messieurs,

Chers frères et sœurs,

 

Pax vobis – la paix soit avec vous! Par cette salutation liturgique, je m'adresse à vous tous, qui êtes rassemblés dans la basilique vaticane, où il y a quinze ans, le 10 avril 1994, le serviteur de Dieu Jean-Paul II a ouvert la première assemblée spéciale pour l'Afrique du synode des évêques. Le fait que nous nous trouvons aujourd'hui à inaugurer la seconde, signifie que celle-ci a certainement été un événement historique, mais pas isolé. Ce fut le point d'arrivée d'un cheminement qui s'est ensuite prolongé, et qui arrive maintenant à une nouvelle étape significative d'analyse et de relance. Rendons grâce au Seigneur pour cela! […]

 

Les lectures bibliques de ce dimanche parlent du mariage. Mais, plus radicalement, elles parlent du dessein de la Création, de l'origine et donc, de Dieu. C'est à ce niveau que converge aussi la seconde lecture, tirée de la Lettre aux Hébreux, là où elle dit : "Celui qui sanctifie – c'est-à-dire Jésus Christ – et ceux qui sont sanctifiés – c'est-à-dire les hommes – viennent tous de la même origine, c'est pourquoi il n'a pas honte de les appeler frères" (He 2, 11). Le primat du Dieu Créateur ressort donc de façon évidente de l'ensemble des lectures, avec cette validité éternelle de son empreinte originelle et la préséance absolue de sa seigneurie, de cette seigneurie que les enfants savent accueillir mieux que les adultes, et c'est pour cela que Jésus les désigne comme le modèle pour entrer dans le royaume des cieux (cf. Mc 10, 13-15). Or, la reconnaissance de la seigneurie absolue de Dieu est certainement l'un des traits saillants et unifiants de la culture africaine. Naturellement, en Afrique, il y a de multiples cultures différentes, mais elles semblent toutes concorder sur ce point : Dieu est le Créateur et la source de la vie. Or, la vie – nous le savons bien – se manifeste en premier lieu dans l'union entre l'homme et la femme et dans la naissance des enfants ; la loi divine, écrite dans la nature, est par conséquent plus forte et l'emporte sur toute loi humaine, selon l'affirmation nette et concise de Jésus : "Que l'homme ne sépare pas ce que Dieu a uni" (Mc 10, 9). La perspective n'est pas d'abord morale : avant même le devoir, elle concerne l'être, l'ordre inscrit dans la Création.

 

Chers frères et sœurs, dans ce sens, la liturgie de la Parole d'aujourd'hui – au-delà de la première impression – se révèle particulièrement adaptée pour accompagner l'ouverture d'une assemblée synodale dédiée à l'Afrique. Je voudrais souligner en particulier certains aspects qui émergent avec force et qui interpellent le travail qui nous attend. Le premier, déjà mentionné : le primat de Dieu, Créateur et Seigneur. Le deuxième : le mariage. Le troisième : les enfants. A propos du premier aspect, l'Afrique est dépositaire d'un trésor inestimable pour le monde entier : son profond sens de Dieu, que j'ai pu percevoir directement dans mes rencontres avec les évêques africains en visite "ad limina", et encore plus lors du récent voyage apostolique au Cameroun et en Angola, dont je conserve un souvenir empli de gratitude et d'émotion […].

 

Lorsque l'on parle des trésors de l'Afrique, notre pensée va immédiatement aux ressources dont le continent est riche et qui sont malheureusement devenues, et continuent parfois de l'être, une source d'exploitation, de conflit et de corruption. La Parole de Dieu nous fait au contraire nous tourner vers un autre patrimoine : le patrimoine spirituel et culturel dont l'humanité a besoin encore plus que de matières premières. "En effet – dirait Jésus – quel avantage, un homme a-t-il à gagner le monde entier s'il le paye de sa vie?" (Mc 8, 36). De ce point de vue, l'Afrique représente un immense "poumon" spirituel, pour une humanité qui semble en crise de foi et d'espérance. Mais ce "poumon" peut aussi tomber malade. Et, à l'heure actuelle, au moins deux pathologies dangereuses sont en train de l'attaquer : avant tout, une maladie déjà diffusée dans le monde occidental, à savoir le matérialisme pratique, associé à la pensée relativiste et nihiliste. Sans parler de la genèse de tels maux de l'esprit, il est toutefois indiscutable que le soi-disant "premier" monde a parfois exporté et continue d'exporter des déchets spirituels toxiques qui contaminent les populations des autres continents, parmi lesquels justement les populations africaines. C'est dans ce sens que le colonialisme, qui a pris fin au plan politique, n'est jamais tout à fait terminé. Mais, justement dans cette perspective, il faut signaler un second "virus" qui pourrait également toucher l'Afrique, à savoir le fondamentalisme religieux, lié à des intérêts politiques et économiques. Des groupes qui s'inspirent des différentes appartenances religieuses sont en train de se répandre sur le continent africain ; ils le font au nom de Dieu, mais selon une logique opposée à la logique divine, c'est-à-dire en enseignant et en pratiquant non pas l'amour et le respect de la liberté, mais l'intolérance et la violence.

 

En ce qui concerne le thème du mariage, le texte du chapitre 2 du Livre de la Genèse nous en a rappelé le fondement perpétuel, que Jésus lui-même a confirmé : "A cause de cela, l'homme quittera son père et sa mère, il s'attachera à sa femme, et tous deux ne feront plus qu'un" (Gn 2, 24). Comment ne pas rappeler l'étonnant cycle de catéchèse, que le serviteur de Dieu Jean-Paul II a dédié à un tel sujet, à partir d'une exégèse, ô combien approfondie, de ce texte biblique? Aujourd'hui, en nous le proposant justement à l'ouverture du synode, la liturgie nous offre la lumière surabondante de la vérité révélée et incarnée dans le Christ, avec laquelle on peut considérer la thématique complexe du mariage dans le contexte ecclésial et social africain. Sur cet autre point cependant, je voudrais offrir brièvement une suggestion qui précède toute réflexion et toute indication de type moral, et qui est liée encore au primat du sens du sacré et de Dieu. Le mariage, tel que la Bible nous le présente, n'existe pas en dehors de la relation avec Dieu. La vie conjugale entre l'homme et la femme, et donc de la famille qui en découle, est inscrite dans la communion avec Dieu et, à la lumière du Nouveau Testament, elle devient une icône de l'Amour trinitaire et le sacrement de l'union du Christ avec l'Eglise. Dans la mesure où elle conserve et développe sa foi, l'Afrique pourra trouver des ressources immenses à donner en faveur de la famille fondée sur le mariage.

 

En incluant également dans l'épisode évangélique le texte sur Jésus et les enfants (Mc 10, 13-15), la liturgie nous invite à considérer d'ores et déjà, dans notre sollicitude pastorale, la réalité de l'enfance qui constitue une grande partie, même si elle est malheureusement souffrante, de la population africaine. Dans la scène où Jésus accueille les enfants, en s'opposant avec indignation à ses propres disciples qui voulaient les éloigner, nous voyons l'image de l'Eglise qui, en Afrique et dans toute autre partie de la terre, manifeste sa maternité surtout à l'égard des plus petits, même lorsqu'ils ne sont pas encore nés. Comme le Seigneur Jésus, l'Eglise ne voit pas en eux avant tout les destinataires d'une aide, et encore moins que jamais d'un piétisme ou d'une manipulation, mais des personnes à part entière qui, par leur façon d'être, montrent la voie maîtresse pour entrer dans le royaume de Dieu, à savoir celle qui consiste à s'en remettre sans condition à son amour.

 

[…] Puisque la croissance de la communauté ecclésiale dans tous les domaines comporte également des défis ad intra et ad extra, le synode est un moment propice pour repenser l'activité pastorale et renouveler l'élan d'évangélisation. Pour devenir lumière du monde et sel de la terre, il faut toujours davantage viser la "haute mesure" de la vie chrétienne, c'est-à-dire la sainteté. Les pasteurs et tous les membres de la communauté ecclésiale sont appelés à être saints ; les fidèles laïcs sont appelés à diffuser le parfum de la sainteté dans la famille, sur les lieux de travail, à l'école et dans tout autre milieu social et politique. Puisse l'Eglise en Afrique être toujours une famille de disciples du Christ authentiques, où les différences entre les ethnies deviennent le motif et le stimulant d'un enrichissement humain et spirituel réciproque.

 

Par son action d'évangélisation et de promotion humaine, l'Eglise peut certainement apporter en Afrique une grande contribution à toute la société, qui connaît malheureusement dans plusieurs pays la pauvreté, les injustices, les violences et les guerres. La vocation de l'Eglise, communauté de personnes réconciliées avec Dieu et entre elles, est d'être prophétie et ferment de réconciliation entre les différents groupes ethniques, linguistiques et aussi religieux, à l'intérieur de chaque nation et sur tout le continent. La réconciliation, don de Dieu que les hommes doivent implorer et accueillir, est un fondement stable sur lequel construire la paix, condition indispensable pour le progrès authentique des hommes et de la société, selon le projet de justice voulu par Dieu. Ouverte à la grâce rédemptrice du Seigneur ressuscité, l'Afrique sera ainsi toujours plus éclairée par sa lumière et, en se laissant guider par l'Esprit Saint, elle deviendra une bénédiction pour l'Eglise universelle, apportant sa contribution qualifiée à l'édification d'un monde plus juste et fraternel.

 

 

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9 décembre 2010 4 09 /12 /décembre /2010 18:53

Rep. TchèqueExtrait du discours prononcé par le Pape Benoît XVI sur l’esplanade de la rue Melnik à Stará Boleslav (République Tchèque), le 28 septembre2009.

 

Chers jeunes,

 

Au terme de cette célébration, je m’adresse directement à vous et, avant toute chose, je vous salue bien affectueusement. Vous êtes venus nombreux de tous les coins du Pays et aussi des Pays voisins ; vous avez « établi votre camp » ici, hier au soir, et vous avez dormi sous des tentes, faisant ensemble une expérience de foi et de fraternité. Merci de votre présence, qui me fait connaître l’enthousiasme et la générosité propres à la jeunesse. Avec vous, le Pape se sent jeune ! Je remercie en particulier votre représentant de ses paroles d’accueil et pour le merveilleux cadeau.

 

Chers amis, il n’est pas difficile de constater que chaque jeune sent en lui une aspiration au bonheur, parfois mélangée à un sentiment de préoccupation ; aspiration qu’exploite souvent cependant, de façon fausse et aliénante, la société de consommation actuelle. Il faut au contraire tenir sérieusement compte de ce désir ardent du bonheur qui exige une réponse vraie et exhaustive. En effet, c’est à votre âge que l’on fait les premiers grands choix, capables d’orienter notre vie vers le bien ou vers le mal. Malheureusement, les jeunes de votre âge qui se laissent séduire par les apparences trompeuses de paradis artificiels pour se retrouver ensuite dans une triste solitude, sont assez nombreux. Néanmoins, il y a aussi de nombreux jeunes gens et jeunes filles qui veulent transformer – comme l’a dit votre porte-parole – la théorie en pratique pour donner son plein sens à leur vie. Je vous invite tous à approfondir l’expérience de Saint Augustin, qui disait que le cœur de tout être est inquiet tant qu’il n’a pas trouvé ce qu’il cherche réellement. Et il a découvert que seul Jésus Christ était la réponse satisfaisante à son désir, et à celui de tout homme, d’une vie heureuse, pleine de sens et de valeurs (cf. Les Confessions I, 1, 1).

 

Comme il l’a fait avec lui, le Seigneur vient à la rencontre de chacun de vous. Il frappe à la porte de votre liberté et ne demande qu’à être accueilli comme un ami. Il veut vous rendre heureux, vous remplir d’humanité et de dignité. La foi chrétienne est la rencontre avec le Christ, Personne vivante qui donne à notre vie une nouvelle perspective et, en conséquence, la direction décisive. Et quand le cœur d’un jeune s’ouvre à ses desseins divins, il n’a pas trop de mal à reconnaître et à suivre sa voix. En effet, le Seigneur appelle chacun par son nom et à chacun il veut confier une mission spécifique dans l’Église et dans la société.

 

Chers jeunes, soyez conscients que le Baptême vous a rendus fils de Dieu et membres de son Corps qui est l’Église. Jésus vous renouvelle constamment son invitation à être ses disciples et ses témoins. Il appelle un grand nombre d’entre vous au mariage et la préparation à ce sacrement constitue un véritable parcours vocationnel. Prenez alors sérieusement en considération l’appel de Dieu à construire une famille chrétienne et appliquez-vous durant le temps de votre jeunesse à construire avec responsabilité votre avenir. La société a besoin de familles chrétiennes, de familles saintes !

 

Si, par contre, le Seigneur vous appelle à le suivre dans le sacerdoce ministériel ou dans la vie consacrée, n’hésitez pas à répondre à son invitation. En particulier, en cette Année Sacerdotale, j’en appelle à vous, chers jeunes : soyez attentifs et disponibles à l’appel de Jésus afin d’offrir votre vie au service de Dieu et de son peuple. L’Église, dans votre pays aussi, a besoin de nombreux et saints prêtres et de personnes entièrement consacrées au Christ, Espérance du monde.

 

L’espérance ! Ce terme, sur lequel je reviens souvent, se marie bien avec la jeunesse. Chers jeunes, vous êtes l’espérance de l’Église ! Elle attend de vous que vous deveniez des messagers de l’espérance, comme cela est arrivé l’année dernière, en Australie, à l’occasion de la Journée Mondiale de la Jeunesse, grande manifestation de foi propre aux jeunes, que j’ai pu vivre personnellement et à laquelle certains d’entre vous ont participé. Vous pourrez venir en plus grand nombre à Madrid, au mois d’août 2011. Je vous invite dès à présent à cette grande rencontre des jeunes avec le Christ dans l’Église.

 

Chers amis, merci encore d’être venus et merci de votre cadeau : l’album de photos qui décrit la vie des jeunes dans vos diocèses. Merci aussi pour la marque de votre solidarité à l’égard des jeunes de l’Afrique, que vous avez voulu me remettre. Le Pape vous demande de vivre avec joie et enthousiasme votre foi ; de grandir dans l’unité entre vous et avec le Christ ; de prier et d’être assidus dans la pratique des Sacrements, en particulier de l’Eucharistie et de la Confession ; de veiller à votre formation chrétienne en restant toujours dociles aux enseignements de vos Pasteurs. Que, par son exemple et son intercession, Saint Venceslas vous guide sur ce chemin et que la Vierge Marie, Mère de Jésus et notre Mère, vous protège toujours ! Je vous bénis tous de tout cœur !

 

 

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8 décembre 2010 3 08 /12 /décembre /2010 19:07

Rep. TchèqueExtrait de l’homélie prononcée par le Pape Benoît XVI à Starà Boleslav (République Tchèque), pour la fête de Saint Venceslas, le 28 septembre 2009.

 

Messieurs les Cardinaux,

Chers frères dans l’Episcopat et dans le Sacerdoce,

Chers frères et sœurs,

Chers jeunes,

 

C’est avec une grande joie que je vous rencontre ce matin, alors que va se conclure mon voyage apostolique dans la bien-aimée République Tchèque, et j’adresse mon cordial salut à vous tous (…).

 

Ce matin le souvenir glorieux du martyre Saint Venceslas, dont j’ai pu vénérer la relique, avant la messe, dans la Basilique qui lui est dédiée, nous réunit autour de l’autel. Il a versé son sang sur votre terre et son aigle que vous avez choisi comme écusson de la visite d’aujourd’hui constitue l’emblème historique de la noble Nation tchèque. Ce grand Saint que vous aimez appeler ‘éternel’ Prince des Tchèques, nous invite à suivre toujours et fidèlement le Christ, il nous invite à être des saints. Lui-même est un modèle de sainteté pour tous, spécialement pour tous ceux qui conduisent le destin des communautés et des peuples. Mais nous nous demandons : de nos jours la sainteté est-elle encore actuelle ? ou n’est-ce pas plutôt un sujet peu attirant et peu important ? Ne recherche-t-on pas davantage aujourd’hui le succès et la gloire des hommes ? Cependant, combien dure et combien vaut le succès terrestre ?

 

Le siècle passé – et votre terre en a été le témoin – a vu tomber de nombreux puissants, qui paraissaient arrivés à des hauteurs presque inaccessibles. Á l’improviste, ils se sont retrouvés privés de leur pouvoir. Celui qui a nié et continue à nier Dieu et, en conséquence, ne respecte pas l’homme, semble avoir une vie facile et accéder au succès matériel. Mais il suffit de gratter la surface pour constater que, dans ces personnes, il y a de la tristesse et de l’insatisfaction. Seul celui qui conserve dans son cœur la sainte ‘crainte de Dieu’ a aussi confiance en l’homme et consacre son existence à construire un monde plus juste et plus fraternel. Aujourd’hui on a besoin de personnes qui soient ‘croyantes’ et ‘crédibles’, prêtes à répandre dans tous les milieux de la société ces principes et ces idéaux chrétiens dont s’inspire leur action. C’est cela la sainteté, vocation universelle de tous les baptisés, qui pousse à accomplir son devoir avec fidélité et courage, regardant non pas son propre intérêt égoïste, mais le bien commun, et recherchant à tout moment la volonté divine.

 

Dans la page évangélique nous avons entendu à ce sujet des paroles très claires : « Quel avantage – affirme Jésus – un homme aura-t-il à gagner le monde entier, s’il le paye de sa vie ? » (Mt 16, 26). Il nous incite ainsi à considérer que la valeur authentique de l’existence humaine n’est pas mesurée seulement aux biens terrestres et aux intérêts passagers, parce que ce ne sont pas les réalités matérielles qui satisfont la soif profonde de sens et de bonheur qu’il y a dans le cœur de toute personne. C’est pourquoi Jésus n’hésite pas à proposer à ses disciples la voie ‘étroite’ de la sainteté : « Qui perd sa vie à cause de moi la gardera » (v. 25). Et il nous répète résolument ce matin : « Si quelqu’un veut marcher derrière moi, qu’il renonce à lui-même, qu’il prenne sa Croix et qu’il me suive » (v. 24). C’est certainement un langage dur, difficile à accepter et à mettre en pratique, mais le témoignage des saints et des saintes assure que c’est possible pour tous, si on a foi dans le Christ et si on s’en remet à lui. Leur exemple encourage celui qui se dit chrétien à être crédible, c’est-à-dire cohérent avec les principes et la foi qu’il professe. Il ne suffit pas en effet d’apparaître bons et honnêtes ; il faut l’être réellement. Bon et honnête est celui qui ne couvre pas de son moi la lumière de Dieu, ne se met pas en avant lui-même, mais laisse Dieu transparaître.

 

C’est cela la leçon de vie de Saint Venceslas, qui eut le courage de préférer le royaume du ciel à la fascination de celui de la terre. Son regard ne se détacha jamais de Jésus Christ, qui souffrit pour nous, nous laissant un exemple, pour que nous en suivions les traces, comme écrit Saint Pierre dans la seconde lecture proclamée tout à l’heure. En disciple docile du Seigneur, le jeune souverain Venceslas demeura fidèle aux enseignements évangéliques que lui avait donnés sa sainte grand-mère, la martyre Ludmila. Les suivant encore avant de s’engager à construire une cohabitation pacifique à l’intérieur de la Patrie et avec les pays voisins, il mit tout en œuvre pour propager la foi chrétienne, appelant des prêtres et construisant des églises. Dans le premier ‘récit’ paléoslave on lit qu’« il servait les ministres de Dieu et il embellissait beaucoup d’églises » et qu’« il faisait du bien à tous les pauvres, vêtait ceux qui étaient nus, nourrissait les affamés, recueillait les voyageurs, selon la parole de l’Evangile. Il ne souffrait pas qu’on fasse du tort aux veuves, il aimait tous les hommes, qu’ils soient pauvres ou riches ». Il apprit du Seigneur à être « miséricordieux et pieux » (Psaume resp.) et animé d’un esprit évangélique il parvint à pardonner même à son frère, qui avait attenté à sa vie. Par conséquent, vous l’invoquez à juste titre comme ‘Héritier’ de votre Nation, et, dans un cantique que vous connaissez bien, vous lui demandez de ne pas permettre qu’elle périsse.

 

Venceslas est mort martyr pour le Christ. Il est intéressant de noter que son frère Boleslas réussit, en le tuant, à s’emparer du trône de Prague, mais la couronne que par la suite ses successeurs se mettaient sur la tête ne portait pas son nom. Elle portait le nom de Venceslas, en témoignage que « le trône du roi qui juge les pauvres dans la vérité restera solide pour l’éternité » (cf. l’Office des lectures de ce jour). Ce fait fut jugé comme une merveilleuse intervention de Dieu, qui n’abandonne pas ses fidèles : « l’innocent vaincu vainc le cruel vainqueur de la même façon que le Christ sur la croix » (cf. La légende de Saint Venceslas), et le sang du martyr n’a appelé ni haine ni vengeance, mais le pardon et la paix.

 

Chers frères et sœurs, en cette Eucharistie, remercions ensemble le Seigneur d’avoir donné à votre Patrie et à l’Eglise ce saint souverain. Prions en même temps pour que, comme lui, nous aussi nous marchions d’un pas alerte vers la sainteté. C’est certainement difficile, parce que la foi est toujours exposée à de multiples défis, mais quand on se laisse attirer par Dieu qui est Vérité, le chemin se fait décidé, parce qu’on fait l’expérience de la force de son amour. Que l’intercession de Saint Venceslas et des autres saints protecteurs des terres tchèques nous obtienne cette grâce. Que Marie, Reine de la paix et Mère de l’Amour nous protège et nous assiste toujours. Amen !

 

 

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7 décembre 2010 2 07 /12 /décembre /2010 18:52

Rep. TchèqueExtrait du discours prononcé par le Pape Benoît XVI au monde académique au Château de Prague (République Tchèque), le 27 septembre 2009.

 

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs les Recteurs et les Professeurs,

Chers étudiants et chers amis,

 

(…) Le rôle des institutions académiques, soutenant et alimentant les valeurs culturelles et spirituelles de la société, enrichit le patrimoine intellectuel de la nation et renforce les fondements de son développement futur. Les changements majeurs qui ont marqué la société tchèque, il y a vingt ans, ont été précipités notamment par les mouvements de réformes qui avaient leur origine à l’université et dans les cercles étudiants. Cette quête de la liberté a continué de guider le travail des étudiants dont la diakonia de la vérité est indispensable au bien-être de toute société.

 

Je m’adresse à vous comme quelqu’un qui a été professeur, attentif au respect de la liberté académique et à la responsabilité dans l’exercice de la raison, et qui est maintenant le Pape qui, dans son rôle de Pasteur, est reconnu comme une voix dans la réflexion éthique de l’humanité. Alors que certains prétendent que les questions soulevées par la religion, la foi et l’éthique n’ont pas leur place dans les frontières de la raison collective, ce point de vue n’est en aucune façon axiomatique. La liberté qui sous-tend l’exercice de la raison – que ce soit dans l’université ou dans l’Église – a une fin : elle est destinée à la recherche de la vérité, et comme telle elle exprime une dimension du Christianisme qui, dans les faits, est à l’origine de l’Université. En effet, la soif de connaissance qui est en l’homme pousse chaque génération à élargir le concept de raison et à se désaltérer à la source bienfaisante de la foi. C’est là précisément le riche héritage de la sagesse classique, assimilé et placé au service de l’Évangile, que les premiers missionnaires chrétiens portèrent à cette région et établirent comme le fondement de l’unité spirituelle et culturelle qui demeure jusqu’à aujourd’hui. Le même esprit a conduit mon prédécesseur le Pape Clément VI à fonder la célèbre Université Charles en 1347, qui continue d’offrir une importante contribution aux cercles académique, religieux et culturel les plus larges en Europe.

 

L’autonomie propre de l’université, ou de toute institution culturelle, trouve son sens dans le fait d’être redevable devant l’autorité de la vérité. Cette autonomie peut toutefois être prise en défaut de différentes manières. La grande tradition éducative, ouverte à la transcendance, qui est à la base des universités à travers l’Europe, a été dans ce pays, et dans d’autres, systématiquement subvertie par l’idéologie réductrice du matérialisme, la répression de la religion et la négation de l’esprit humain. Malgré tout, en 1989, le monde a été témoin, dans des circonstances dramatiques, de l’effondrement d’une idéologie totalitaire en faillite et du triomphe de l’esprit humain. L’aspiration à la liberté et à la vérité est une part inaliénable de notre commune humanité. Elle ne peut être éliminée et, comme l’Histoire l’a montré, lorsqu’elle est déniée, c’est au péril de l’humanité même. C’est à cette aspiration que la foi religieuse, les différentes formes de l’art, la philosophie, la théologie et les autres disciplines scientifiques, chacune avec ses propres méthodes, cherchent à répondre, à la fois sur le plan de la réflexion ordonnée que sur celui d’une saine praxis.

 

Mesdames et Messieurs les Recteurs et les Professeurs, conjointement à votre recherche, il est un autre aspect de la mission de l’université dans lequel vous êtes engagés, à savoir la responsabilité d’éclairer l’esprit et le cœur des jeunes d’aujourd’hui. Cette tâche importante n’est bien sûr pas nouvelle. Depuis l’époque de Platon, l’éducation n’a jamais été réduite à une simple accumulation de connaissances ou de compétences techniques, mais elle est paideia, une formation humaine à partir des trésors de la tradition intellectuelle ordonnée à une vie vertueuse. Alors que les grandes universités se développaient à travers l’Europe au cours du Moyen-âge animées par l’idéal d’une synthèse des connaissances, c’était toujours au service d’une authentique humanitas, la perfection de l’individu à l’intérieur de l’unité d’une société justement ordonnée. Il en est ainsi aujourd’hui encore : une fois que l’intelligence des jeunes a été éveillée à la plénitude et à l’unité de la vérité, ils savourent la découverte que la question de leur apprentissage du savoir s’ouvre sur la grande aventure de ce qu’ils doivent être et de ce qu’ils doivent faire.

 

L’idée d’une éducation inclusive, fondée sur l’unité de la connaissance basée sur la vérité, doit être retrouvée. Cela est nécessaire pour contrecarrer la tendance, si manifeste dans la société contemporaine, à la fragmentation du savoir. Avec le développement massif de l’information et des technologies, la tentation existe de délier la raison de la recherche de la vérité. Détachée de l’aspiration humaine fondamentale vers la vérité, la raison commence à perdre son orientation : elle se flétrit, que ce soit sous l’apparence de la modestie en se contentant de ce qui est partiel et provisoire, ou bien sous les dehors de l’assurance, en exigeant l’abandon de toute résistance aux requêtes de ceux qui donnent aveuglement une valeur pratiquement équivalente à toute chose. Le relativisme qui s’ensuit crée un contexte propice où de nouvelles menaces sur l’autonomie des institutions académiques peuvent se cacher. Alors que le temps des interférences de la part du totalitarisme politique est révolu, n’arrive-t-il pas qu’à travers le monde, l’exercice de la raison et la recherche académique soient – plus ou moins subtilement – contraints de se soumettre aux pressions de groupes d’intérêts idéologiques ou de céder aux attraits d’objectifs utilitaristes ou pragmatiques à court terme ? Qu’arrivera-t-il si notre culture se construit seulement sur des arguments en vogue, avec une référence ténue à une authentique et historique tradition intellectuelle, ou bien sur les points de vue qui sont très largement promus et profondément ancrés ? Qu’arrivera-t-il si dans son souci de préserver un sécularisme radical, elle se détache elle-même des racines qui lui donnent vie ? Nos sociétés ne deviendront pas plus raisonnables, plus tolérantes ou plus capables de s’adapter, mais au contraire plus fragiles et moins inclusives, et elles auront toujours plus de difficultés à reconnaître ce qui est vrai, noble et bon.

 

Chers amis, je souhaite vous encourager pour tout ce que vous faites pour répondre à la soif d’idéal et à la générosité des jeunes d’aujourd’hui, non seulement avec des programmes d’études qui leur permettent d’atteindre l’excellence, mais aussi par une expérience d’idéaux partagés et d’aide mutuelle dans le grand effort de l’apprentissage. Le talent de l’analyse ainsi que ceux qui sont requis pour formuler des hypothèses, combiné avec l’art prudent du discernement, fournissent un antidote efficace aux attitudes de repli, de désengagement et même d’aliénation que l’on rencontre parfois dans nos sociétés prospères, et qui peuvent affecter particulièrement les jeunes. Dans ce contexte d’une vision éminemment humaniste de la mission de l’université, je voudrais brièvement mentionner que la restauration du lien distendu entre science et religion a été une préoccupation majeure de mon prédécesseur, le Pape Jean-Paul II. Comme vous le savez, il a favorisé une compréhension plus juste de la relation entre la foi et la raison en les présentant comme les deux ailes qui permettent à l’esprit humain de s’élever vers la contemplation de la vérité (cf. Fides et ratio, Proemium). L’une soutient l’autre et chacune a son propre champ d’action (cf. ibid., n.17), même s’il en est certains qui voudraient détacher l’une de l’autre. Les tenants de cette exclusion positiviste du divin du domaine de la raison universelle ne font pas que nier ce qui est une des convictions les plus profondes des croyants, ils font obstacle au vrai dialogue des cultures qu’ils appellent pourtant de leurs vœux. Une compréhension de la raison qui est sourde au divin et qui relègue les religions au rang des sous-cultures, est incapable d’entrer dans le dialogue des cultures dont notre monde a un besoin si urgent. En définitive, la fidélité à l’homme exige la fidélité à la vérité qui, seule, est la garantie de la liberté (Caritas in Veritate, n. 9). La confiance en la capacité humaine de rechercher la vérité, de la trouver et de vivre selon elle a conduit à la fondation des grandes universités européennes. Nous devons réaffirmer cela avec force aujourd'hui pour donner courage aux énergies intellectuelles qui sont nécessaires en vue de travailler pour un avenir vraiment digne de l’homme, un avenir où il puisse s’épanouir.

 

 

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4 décembre 2010 6 04 /12 /décembre /2010 10:17

 

Rep. TchèqueExtrait du discours prononcé par le Pape Benoît XVI lors de la rencontre œcuménique à l’archevêché de Prague, le 27 septembre 2009.

 

(…) Chers amis, l’Europe continue de connaître de nombreux changements. Il est difficile de croire que deux décennies seulement nous séparent de la chute des anciens régimes, ouvrant la voie à une difficile mais fructueuse transition vers des structures politiques plus participatives. Durant cette période, les chrétiens se sont joints à d’autres bonnes volontés pour rebâtir un ordre politique juste et ils continuent d’entretenir aujourd’hui le dialogue dans le but de préparer des voies nouvelles vers la compréhension mutuelle, la coopération pour la paix et la promotion du bien commun.

 

Néanmoins, sous de nouvelles formes, se font jour des tentatives pour marginaliser l’influence du christianisme dans la vie publique – parfois sous le prétexte que ses enseignements porteraient atteinte au bien-être de la société. Ce phénomène doit nous inciter à prendre le temps de la réflexion. Comme je l’ai suggéré dans mon Encyclique sur l’Espérance chrétienne, la séparation artificielle de l’Évangile avec la vie publique et intellectuelle devrait nous pousser à engager une mutuelle « autocritique de la modernité » et « autocritique du christianisme moderne », regardant spécifiquement l’espérance que chacun peut offrir au genre humain (cf. Spe Salvi, n. 22). Nous devons nous demander ce que l’Évangile a à dire à la République tchèque et aussi à l’ensemble de l’Europe aujourd’hui dans une période marquée par la prolifération planétaire des points de vue.

 

Le Christianisme a beaucoup à offrir sur le plan pratique et éthique, puisque l’Évangile ne cesse pas d’inspirer à des hommes et à des femmes le choix de se mettre au service de leurs frères et sœurs. Peu le contesteraient. Toutefois, ceux qui fixent leur regard sur Jésus de Nazareth avec les yeux de la foi savent que Dieu offre quelque chose qui est plus profond, quoiqu’inséparable de l’ « économie » de l’amour à l’œuvre en ce monde (cf. Caritas in Veritate, n. 2) : Il offre le Salut.

 

Le terme possède de multiples significations, mais il exprime quelque chose de fondamental et d’universel concernant l’aspiration humaine au bien-être et à la plénitude. Il évoque l’ardent désir de réconciliation et de communion qui jaillit des profondeurs de l’esprit humain. C’est la vérité centrale de l’Évangile et le but vers lequel tout effort d’évangélisation et toute attention pastorale est dirigé. Et c’est le critère à partir duquel les chrétiens réorientent constamment leur visée lorsqu’ils s’efforcent de guérir les blessures des divisions passées. Pour cela, comme le Docteur Černý l’a noté, le Saint-Siège a été heureux d’accueillir, en 1999, le Symposium International sur Jean Hus afin de faciliter une discussion sur l’Histoire religieuse complexe et turbulente de ce Pays et de l’Europe en général (Cf. Jean-Paul II, Discours au Symposium International sur Jean Hus, 1999). Je prie afin que de telles initiatives œcuméniques puissent porter des fruits non seulement pour la poursuite de l’Unité des Chrétiens, mais aussi pour le bien de la société européenne tout entière.

 

Nous prenons confiance dans le fait de savoir que la proclamation par l’Église du Salut en Jésus Christ est à la fois toujours ancienne et toujours nouvelle, nourrie de la sagesse du passé et débordant d’espérance pour l’avenir. Quand l’Europe écoute l’Histoire du Christianisme, elle entend sa propre Histoire. Sa notion de justice, de liberté et de responsabilité sociale, en même temps que les institutions culturelles et juridiques établies pour préserver ces idées et les transmettre aux générations futures, sont modelées par l’héritage chrétien. En vérité, sa mémoire du passé anime ses aspirations pour l’avenir.

 

C’est pourquoi, en fait, les chrétiens s’inspirent de figures telles que Saint Adalbert et Sainte Agnès de Bohème. Leur engagement à répandre l’Évangile était motivé par la conviction que les chrétiens ne devraient pas trembler de peur devant le monde mais plutôt partager avec assurance le trésor des vérités qui leur a été confié. De même, les chrétiens aujourd’hui, s’ouvrant aux réalités présentes et souscrivant à tout ce qui est bon dans la société, doivent avoir le courage d’inviter les hommes et les femmes à la conversion radicale qui suit la rencontre avec le Christ et qui inaugure une vie nouvelle de grâce.

 

Dans cette perspective, nous comprenons plus clairement pourquoi les chrétiens sont tenus de se rassembler pour rappeler à l’Europe ses racines. Ce n’est pas parce que ces racines se seraient depuis longtemps desséchées. Tout au contraire ! C’est parce qu’elles continuent – de façon discrète mais néanmoins fructueuses – à alimenter le continent d’une sève spirituelle et morale qui lui permet d’entrer dans un dialogue constructif avec les hommes appartenant à d’autres cultures et à d’autres religions. Précisément parce que l’Évangile n’est pas une idéologie, il n’a pas la prétention d’enfermer les réalités socio-politiques toujours changeantes dans des schémas rigides. Au contraire, il transcende les vicissitudes de ce monde et répand une lumière nouvelle sur la dignité de la personne humaine, à toutes les époques. Chers amis, demandons au Seigneur d’instiller en nous un esprit de courage pour partager les vérités éternelles du salut qui ont façonné, et qui continueront de façonner, le progrès social et culturel de ce continent.

 

Le Salut procuré par les souffrances, la mort, la résurrection et l’ascension aux cieux de Jésus ne fait pas que nous transformer, nous qui croyons en lui, mais il nous somme de partager cette Bonne Nouvelle avec les autres. Illuminés par les dons de l’Esprit que sont la connaissance, la sagesse et le discernement (cf. Is 11, 1-2 ; Ex 35, 31), que notre capacité à saisir la vérité enseignée par Jésus Christ nous pousse à travailler sans répit en faveur de l’unité qu’il désire pour tous ses enfants renés dans le Baptême, et également pour le genre humain tout entier.

 

 

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